Chapitre 17

91 5 0
                                    

Mason

Je déteste la voir pleurer, même lorsque ce n'est qu'une seule larme. Je me rends compte que la vie qu'elle a eu est autant compliqué que la mienne. C'est sûrement pour cette raison que nous nous comprenons.

Je n'ai pas envie de rentrer chez moi, du moins, ce n'est même pas chez moi mais je ne veux pas y aller. Je me sens bien là, avec elle. Je ne me sens pas complètement vide comme d'habitude. Hésitant, je lui demande :
—Heu... je peux rester là, ce soir. Je veux dire, pas dans ton lit, mais juste ici, chez toi ?
—Pourquoi ? T'es SDF ? (Elle sourit, ce qui me fait sourire aussi malgré moi.) C'est pour ça que tu portes toujours la même tenue alors !
—Je ne porte pas toujours la même tenue ! Je porte seulement des jeans noirs parce que... je ne sais pas c'est comme ça. Mais j'ai six jeans noirs identiques. Et pour les t-shirts je ne porte pas toujours des t-shirts blancs, parfois ils sont noirs !
—Waouh ! S'exclame-t-elle en éclatant de rire. Son rire est le plus beau que je n'ai jamais entendu.
—Et ouais, tu peux rester. Tu prendras la chambre de mon frère.
-Ok. Merci.
-C'est la chambre en face de la mienne.
Je me lève, je la regarde droit dans les yeux et lui demande :
—Embrasse moi (elle se lève à son tour).
—Quoi ?
—Embrasse moi, Gaëlle.
Elle ne dit rien et s'avance vers moi. Elle passe sa main sur mon visage, toujours en me fixant de ses yeux bleu-vert, et repousse en arrière mes boucles qui retombaient sur mon front. Elle effleure de ses lèvres les miennes, je ferme les yeux, un frisson me parcourt le corps. Elle entrouvre sa bouche et aspire ma lèvre inférieure, puis elle pose délicatement un baiser sur le coin de mes lèvres. Je souris, elle se recule en souriant elle aussi. Puis je me retourne, sors de sa chambre et me rend dans la chambre d'en face.

J'allume la lumière, parcourt la pièce du regard. Il n'y a aucune affaire appartenant à son frère, il n'y a plus que des affiches d'équipe de hockey sur glace, un poster de ACDC et quelques photos.

Je me déshabille, gardant uniquement mon boxer et éteint la lumière. Je m'allonge et remonte la couverture sur moi. Je fixe pendant un instant le plafond jusqu'à ce que mes paupières se ferment.

J'entends papa, il hurle, sur maman je crois. Je déteste qu'il crie sur maman comme il le fait. Je déteste papa. Pourquoi il crie sur maman comme ça ? Maman n'a pas fait de bêtises, maman ne fait jamais de bêtises. Je n'entends pas ce qu'il dit, pourtant il hurle, très fort. Papa a encore bu trop d'alcool, il boit toujours trop. Maman crie aussi mais sa voix se brise, elle pleure. Ma maman est en train de pleurer, il faut que j'aille la consoler. Je me lève de mon lit, j'allume la lumière et attrape mon doudou dans mes bras. Je pousse la porte. J'entends un fracassement de bouteille et maman qui hurle encore plus fort, mais cette fois elle hurle parce qu'elle souffre. Papa a du lui faire du mal. Papa a du frapper maman. Je ne veux pas que maman ai mal, j'aime maman parce qu'elle est toujours gentille, avec tout le monde, et elle m'aime aussi. Il faut que j'aide maman. Alors je m'avance vers l'escalier en serrant mon doudou dans mes bras. J'ai peur de papa mais je dois sauver maman. Je dois le faire parce qu'elle me sauve toujours. Elle n'a jamais laissé papa me frapper quand il a bu trop d'alcool.
Je vois papa la frapper. Il y a du sang qui coule sur le visage de maman mais papa continue de lui donner des coups. Maman le supplie d'arrêter mais il fait comme s'il ne l'entendait pas. Je hurle mais personne ne m'entend. Maman pleure, elle tourne enfin la tête vers moi en écarquillant les yeux et me crie dessus :
—Mason retourne dans ta chambre ! Immédiatement !
Pourquoi elle est énervée contre moi ? Je n'ai pas fait de bêtises et je suis venue la sauver, pourquoi me crie-t-elle dessus ? Je commence à descendre les escaliers, il faut que je la sauve, maman me crie encore dessus et parvient à se dégager de papa. Elle court jusque dans les escaliers, elle monte les marches pour venir me voir mais papa la tire par les cheveux, maman se retient à la rambarde. Je hurle en pleurant :
—Papa arrête ! Papa arrête s'il te plaît ! Arrête de faire mal à maman !
Papa ne m'entend pas alors je hurle encore, maman a peur, comme moi, et elle pleure elle aussi.
Je crie encore plus fort mais papa pousse maman qui dégringole les escaliers. La tête de maman frappe plusieurs fois les marches, ses yeux se sont fermés, elle ne bouge plus. Je la regarde du haut des escaliers, elle est peut-être juste endormie. Son sang tache le sol, et son corps ne bouge toujours pas. Est-ce que maman est morte ? Est-ce que papa a fait mourir maman ?

Papa vient vers moi, je me retourne et me met à courir vers ma chambre mais il me rattrape par le bras et arrache de mes mains mon doudou. Des larmes ruissellent sur mon visage. Je hurle :
—Non papa ! Arrête ! Arrête, s'il te plaît !

VIVRE-Tome1 [Terminé-En relecture et correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant