Lady Condé [ Ruthless Ravenwell - 1 ]

29 - Tinabella

LUCIUS

Attablés autour d'une bonne tasse de thé, les cinq personnes se regardaient en chiens de faïence. Lucius ne cessait de fixer Lazarus, persuadé qu'elle leur cachait encore de nombreuses choses. Isobel regardait avec attention Charlie, qui semblait dévastée. Après tout, c'était bien normal. Son manoir avait été réduit à rien, tout avait brûlé. Ses belles robes, ses souvenirs, si fugaces soient-ils. Et bientôt, elle perdrait son père, s'ils ne pouvaient pas régler cette affaire.

Au centre de la table, juste à côté de la belle théière blanche, se trouvait la lettre qu'ils n'avaient pas encore pu ouvrir. Elle contenait peut-être des renseignements vitaux mais Lazarus avait d'ors et déjà annoncé qu'il ne pouvait l'ouvrir. Ou elle. Rha, il ne savait plus quoi penser, désormais. Son cœur avait été brisé par une telle trahison mais il n'était pas le plus à plaindre. Il s'occuperait de tout cela plus tard.

"Je ne connais même pas ton nom ..."

Lazarus lâcha un hoquet et releva les yeux. Elle murmura quelque chose de presque inintelligible.

"Tinabella."

Isobel décida de couper court en abattant sa tasse sur sa sous-tasse avec une violence qui aurait dû casser la porcelaine si elle n'avait pas été enchantée auparavant. Si un jour Isobel allait vivre à Lumen, elle ne saurait probablement que détruire tout ce qui l'entourait.

"Bon, tu vas nous expliquer ? Si tu es mêlé à ça depuis le début, tu pourrais au moins nous expliquer pourquoi tu as travaillé avec nous. Tu as reçu des ordres ?"

Lazarus soupira et étendit ses mains pour attraper sa propre tasse de thé. Sa peau couleur de charbon brillait dans la lumière des bougies et Lucius avait du mal à croire que c'étaient les mêmes mains qui lui avaient caressé les joues quelques jours auparavant. Tout allait si vite ... il avait du mal à faire le décompte des jours. Il n'était même plus de du jour où l'exécution de Taesch avait été programmée. Dans quatre jours ? Cinq peut-être ? Le cours du temps avait été perturbé au moment où il avait perdu son père.

"Non, je ne travaille plus pour eux depuis longtemps ! Laissez moi vous expliquer ... C'est compliqué."

Lucius se racla la gorge et ignora le thé, pourtant de grande qualité, qu'on avait laissé devant lui. Il releva des yeux noirs de contrariété sur Lazarus et haussa les épaules.

"Alors explique donc."

LAZARUS

Il poussa un soupir à fendre les pierres. Il était désolé de la façon dont avait tourné les choses et il se détestait pour avoir été aussi stupide. Il devait juste récolter quelques informations. Il était hors de question qu'il s'attache au prince et que celui ci s'entiche de lui. Il avait été stupide et il ne pensait pas que son passé le rattraperait. Mais les filles qui entouraient le prince avaient été plus intelligentes que lui. Il n'avait pas eu une chance, depuis le départ mais, bien sûr, il n'en avait eu aucune idée. Sa mère avait eu raison, finalement. Son arrogance avait causé sa perte.

"Je suis née chez les Pygargue. Ma mère était une servante chez eux et mon père ... eh bien le fils aîné de la famille aimait plus les servantes qu'il n'aurait dû, vu son rang. Quand elle est tombée enceinte de moi, je me suis retrouvé sous le feu des regards et quand je suis né, ç'a été l'occasion pour tout le monde de donner son opinion. La matriarche de la famille, Marie-Thérèse, ne voulait pas de moi sous son toit mais mon père a fini par la convaincre. Puisque j'étais une fille à l'époque -