Vincent regarda pour la cinquième fois l'heure sur son téléphone, anxieux. Le hall de la gare Lille Europe n'était pas bondé, mais beaucoup de voyageurs passaient à côté de lui en traînant leurs valises. Lequel serait la redoutée ?
On attrapa son bras d'un geste vif et Vincent se recula d'un pas par réflexe. Seulement, ce ne fut pas celle qu'il attendait.
Orage le dévisagea avec fureur. Ses yeux bleus étaient recouverts par des lentilles sombres plus vraies que nature.
- Vous ne m'avez même pas prévenue, gronda-t-elle.
- Je n'en ai pas eu l'occasion, je l'ai moi-même su ce matin, siffla Vincent en retour.
Il observa les alentours pour s'assurer que personne ne venait dans leur direction, puis attira Orage derrière un point d'information.
- Ce matin vous donnait quelques heures pour simplement m'envoyer un message, reprit Orage. Heureusement que je vous espionne.
- Vous m'espionnez ? Est-ce que c'est une plaisanterie ?
Orage fronça les sourcils, prête à l'incendier. Vincent leva les yeux au ciel.
- Peu importe, décréta-t-il. Si vous ne partez pas tout de suite vous allez avoir des problèmes.
- Hors de question. Je n'ai pas confiance en vous pour gérer la division londonienne, alors il faudra faire avec moi.
- Vous êtes une magicienne.
- Brillante déduction, Sherlock. Mais ça, vous êtes le seul à le savoir, alors il vous suffit de la fermer.
Vincent haussa les sourcils, les bras croisés. La brûlure sur son visage s'étira.
- Parce que vous pensez qu'ils ne le découvriront pas ? C'est grandement les sous-estimer.
Orage expira, le regard empli de ressentiment.
- C'est vous qui me prenez pour une idiote. J'ai pratiquement trois cent ans. Ce n'est pas pas un chasseur de magicien dans la trentaine qui va m'apprendre ce qu'est le danger, surtout quand il est question de la division londonienne. À partir de maintenant, vous m'écoutez.
Vincent capitula. Après tout, ce n'était pas son problème. Si les londoniens découvraient sa véritable identité, il n'aurait qu'à se retourner contre elle et passer à autre chose.
- Très, bien, je vous écoute. Que fait-on ?
- Premièrement, on se tutoie. Deuxièmement, appelle-moi Mathilde. Troisièmement, est-ce que tu es en couple ?
Vincent manqua de s'étouffer.
- Que...
- Oui ou non ?
- Non, mais quel est l'intérêt de...
- Bien, le coupa Orage. Je serais désormais ta fiancée chasseuse aux yeux des londoniens. Oui, je suis vieille, peut-être que tu préfères les hommes et jouer à ça ne me plaît pas non plus, mais je ne te donne pas le choix. Soit tu m'intègres aux négociations avec eux, soit tu as une crise cardiaque dans les prochaines secondes et je renverse la division de Lille avant dix-huit heures pour en prendre la tête. Clair ?
- On a un accord. Les menaces ne sont pas nécessaires, il aurait juste fallu le temps pour en parler avant. Quand bien même, il est hors de question que je joue ce rôle pour un bon nombre de raisons.
- Avant ? Tu n'as même pas cherché à me prévenir. N'essaie pas de me rejeter la faute. De plus, je me fiche de tes raisons, tu fais ce que je dis un point c'est tout.