Vers le jardin du gouvernement, deux jeunes femmes aux longs cheveux bruns se tenaient sur la place principale, devant le haut clocher aux tuiles rouges. Elles entonnèrent un chant qui m'apaisa.
– Je ne sais pas ce que ça veut dire, mais je trouve ça beau.
– Comme on se retrouve ! dit une voix derrière mon oreille.
C'était Ben qui traînait avec ses potes.
– Alors, tu nous suis, Benito ? demanda Marion.
– Techniquement, c'est moi qui vous ai parlé en premier du circuit que l'on faisait, alors c'est vous qui me suivez. Bonjour, Amanda, ça va ?
– Euh... oui.
Cet homme me troublait. Je le découvrais pour la première fois sous la lumière vive du soleil. Son regard était métallique, il préférait grimacer que de porter des lunettes de soleil. Il me faisait penser au cow-boy des westerns des années 50. Il était aussi sec que nerveux. Le côté animal que j'avais deviné lors de notre rencontre se confirmait.
– Je ne vois pas vos amis, dit-il.
– Dimitri et Yohann boivent des verres avec les habitants de Rotorua, dit Marion.
Les chanteuses jouèrent d'instruments bien plus bruyants.
– Et laisser une si belle plante, murmura-t-il pour que je ne sois que la seule à entendre.
C'était le moment de dire les choses.
– Passe ton chemin, Ben, je suis mariée.
– Je sais reconnaître une alliance.
Je restai sans rien dire.
– Rien n'empêche de goûter à d'autres plaisirs. A plus tard.
Il suivit ses amis qui descendaient vers la côte. J'hésitai entre la colère et l'écœurement. Et une infime partie de moi ne pouvait s'empêcher de ressentir du plaisir à être désirée. Merde, qu'est-ce qui clochait chez moi ?
⁂
Dimitri et Yohann revinrent une heure plus tard et Robine nous mena en contrebas du village vers les sources chaudes. L'odeur du souffre n'était pas très agréable mais notre attention fut détourné par le geyser naturel qui s'élevait plus loin.
– Ces sources géothermiques sont l'attraction phare du coin. Un vrai Spa à ciel ouvert : bassins chauds et mares de boue à volonté ! expliqua-t-elle.
Nous prîmes plusieurs photographies avant de rejoindre l'Elysium que Robine avait garé à proximité, face à un lac. Nous étions sur la terrasse du camping-car, devant l'héliport, le bar à cocktail était sorti.
– Non mais James Bond à côté, c'est rien !
⁂
Il était deux heures du matin. Je me tournais et me retournais dans les draps de soie. Je pensais à Ben et à son insistance. Je n'en revenais pas des gens qui n'avaient aucun scrupule ni aucune gêne à affirmer ce dont il voulait disposer.
Dimitri bougea aussi et je pus voir son visage dans la pénombre. Voilà ce qu'était un homme, un vrai, avec toutes les qualités humaines. Le regarder me calma et balaya tout le reste. Ben n'était qu'un con, arrogant. Si ça lui faisait plaisir de draguer les femmes mariées, c'était son problème. N'empêche qu'il était pathétique, j'étais dans le lit de Dimitri.
Je le serrai fort et embrassai délicatement sa joue pour ne pas le réveiller. Sauf qu'il ouvrit les yeux.
– Ça va, Am' ?
– Excuse-moi, bébé, je n'arrive pas à dormir mais je ne voulais pas te réveiller.
– Moi non plus je n'arrive pas à dormir.
Nous commençâmes à nous embrasser. Soudain, j'eus une idée.
– Dis, tu veux pas qu'on aille faire un plouf dans les bassins d'eau chaude ?
Ni une, ni deux, il se leva et recouvrit son fessier galbé avec son maillot de bain.
J'ouvris la porte discrètement et posai mon doigt sur ma bouche, pour lui faire signe d'être discret. Nous passâmes devant la couchette de Robine qui ronflait et sortîmes de l'Elysium. La pleine lune nous permit d'y voir parfaitement bien dans la nuit claire.
– Am', j'ai trop envie de toi.
Il serra ses mains autour de moi tout en marchant et je sentis son excitation.
– Mais il va falloir être patient car... le premier arrivé demande ce qu'il veut !
Je me dégageai pour piquer un sprint vers les sources chaudes. Maligne que j'étais, j'avais chaussé des baskets alors qu'il avait mis des tongs. J'étais sûre de gagner, et j'imaginai ce que je lui demanderai de me faire.
Je jetai un œil derrière moi, il peinait à avancer et voulut enlever ses tongs, sauf que les cailloux ne l'aidèrent pas. Je riais sans cesser de courir. Je ralentis un peu dans les marches. Les premiers bassins naturels se dévoilèrent après un virage. La vapeur qui s'élevait rendait l'atmosphère à la fois excitante et romantique.
Je me rappelais du bassin en hauteur isolé que j'avais vu quelques heures plus tôt. Le spot parfait pour un bain de minuit coquin. Dimitri arrivait en bas des marches.
Je débouchai sur le bassin mais m'arrêtai net. Il était occupé par deux hommes qui avaient semble-t-il eut la même idée.
Merde !
Gênée, je ne voulus pas les surprendre dans leurs ébats et reculai sans faire de bruit, calmant mon rire et ma respiration saccadée. J'espérai aussi que Dimitri ne pousse pas sa voix. J'allais le rejoindre en descendant à toute allure lorsque je reconnus l'un des hommes dans le bassin.
C'était Yohann.
Notes à moi-même :
1. Développer en format poster la photo de Laura devant le village d'Hobbiton (son cadeau de Noël).
2. Dire à Laura que la musique qu'on écoutait à la soirée d'Halloween chez Killian c'était bien Leave (Get Out) de JoJo !
3. Envoyer Ben au tapis !
4. Yoyo... Qu'est-ce que je fais ? Qu'est-ce que je dis ?
