O B S E S S I O N [EN RÉÉCRITURE]

CHAPTER TWELVE.

– Younes ?
– Hum... ?
– On s'est endormis en travaillant.
– Quelle heure est-il ?
– Vingt-trois heures quarante-cinq.
– Merci.

Je me frotte les yeux tout en baillant. Je les ouvre et me relève doucement de ma sieste. Mes yeux se baladent dans la pièce et aperçoivent sur la table tout le bordel que nous avons fait pour essayer de créer un plan. Il y a des feuilles blanches par-ci, des feuilles contenant un plan non terminé par-là, des stylos, des crayons, des feutres noirs et l'ordinateur qui se trouve bien au milieu de ce foutoir. 

Je réveille les autres avec l'aide de Will.

– Réveillez-vous, nous devons rentrer !
– Où sommes-nous ? demande Marcus dans les vapes.
– Au QG.
– Est-ce qu'on peut dormir ici ?
– Hors de question, réveillez-vous, bande de flemmards ! dit Will en criant un peu pour les réveiller.

Dix minutes après, nous étions tous réveillés pour ranger nos plans. Nous évitons de les laisser traîner ici et d'avoir de mauvaises surprises. Ils nous restent quelques détails à régler. Comme par exemple, pouvoir le surveiller pendant plusieurs jours d'affilée, connaître ses faits et gestes et surtout savoir sur le bout des doigts les alentours. On débutera ceci dans deux jours.

LE LENDEMAIN.

"Ma vie, ma vie
Chez moi on t'aime, puis on t'oublie
Chez moi on saigne, puis on grandit
Chez nous respecte ouais, on tire

Ma vie, ma vie,
Devenir quelqu'un pour exister
Car personne nous a invité
Donc on est v'nu tout niquer"

Je suis en train de me défouler dans ma salle de boxe pour sortir toute cette colère que j'ai en moi, surtout depuis que j'ai découvert que ma sœur avait pris contact avec la femme qui nous a donné la vie.

Je tape encore et encore ne sachant pas canaliser ma rage. Cette femme m'a abandonnée, elle nous a abandonnés. Je ne lui pardonnerai jamais de nous avoir fait du mal, mais surtout de revenir des années plus tard telle une fleur. J'aurais préféré qu'elle ne revienne pas. J'aurais préféré qu'elle soit morte.

Oui, ce sont des paroles dures. Oui, j'ai une haine envers elle qui s'est propagée depuis des années, car elle est partie. Partie sans se retourner une dernière fois, nous laissant Yasmine, mon père et moi. Elle est partie sans se soucier de nous.

Je me remémore l'époque où nous étions encore jeunes, mon père avait trouvé le courage de nous avouer qu'elle nous avait abandonnés. Tous les jours, je repérais ma sœur dissimulée dans la salle de bain en train de pleurer. J'essayais de la réconforter autant que je pouvais, mais rien ne changeait. La douleur persistait et était bien ancrée.

Cela me faisait énormément de mal, mais je devais rester fort, surtout en sa présence. Cependant, ce dernier souvenir m'a complètement détruit.

Flashback – Il y a quatorze ans.

Je suis sorti faire un petit tour pour me changer les idées et penser à ma maman. Je me posais beaucoup de questions à son sujet, mais je n'avais pas de réponse, ce qui me posait problème... Pourtant, elle avait fait son choix et je m'obstinais à vouloir comprendre.

– Je suis rentré !

Je crie dans la maison, mais je n'obtiens aucune réponse. Je suppose que mon père est parti se bourrer la gueule, mais ma sœur, ce n'était pas dans son habitude de ne pas me donner de nouvelles.

– Yasmine ? Yasmine ?

Si elle sort, elle me laisse toujours un mot dans la cuisine, mais là, il n'y a rien. Aucune modification n'a été apportée à cette pièce.

Alors que je descendais les escaliers, j'entends des reniflements. En marchant lentement, je m'approche de la porte, cherchant à être certain de ce que j'avais pu interpréter.

Un reniflement supplémentaire retentit.

C'était bien Yasmine qui pleurait. Elle était assise sur le sol, recroquevillée sur elle-même, les yeux rougis par les larmes. J'ai vraiment été bouleversé par cette vision. Ne sachant pas quoi faire, je m'assois à ses côtés pour la serrer dans mes bras.

Nous sommes restés immobiles pendant une bonne dizaine de minutes. Elle opte pour rompre le silence.

– J'ai compris.
– Qu'as-tu compris ?
– Pourquoi maman est partie. 
– Pourquoi ?
– À cause de nous.
– De quoi tu parles ? Ne dit pas bêtise, Yasmine !

Elle reste silencieuse. Sans savoir quoi ajouter, je hausse les épaules tout en lui caressant le dos. J'avais l'impression que mes larmes allaient couler, mais je persiste à ne pas le faire devant elle. Il fallait que je reste fort pour nous deux.

– Pourquoi nous avoir lâchés ? dit-elle, Nous n'avons rien demandé ! Avoir des enfants, ce n'est pas censé être la plus belle chose au monde ?
– Bien sûr que si !
– Alors pourquoi est-elle partie ?
– Je ne sais pas, Yasmine.
– Je viens de te le dire, Younes ! Elle est partie par notre faute ! dit-elle en pleurant à chaudes larmes.

Fin du flashback – quatorze ans.

Yasmine se détestait. Moi aussi, j'ai commencé à me détester, car je pensais vraiment que c'était de notre faute.

La souffrance de ma jumelle était aussi la mienne.

Sa haine envers elle-même et envers les autres la rendait méchante. Elle se battait régulièrement et avait un comportement extrêmement agressif. Rien ne pouvait l'empêcher de sortir de sa chambre, c'était sa pièce préférée.

Elle se détruisait petit à petit mais grâce au Tout-Puissant, même si cela a duré plus d'un an et qu'elle devait aller consulter une psychologue, elle va mieux.

C'est la raison pour laquelle je ne pourrais pardonner à celle qui nous a mises au monde.