Cette ouverture au public à une autre saveur comparé aux autres jours... Je regarde Adrian et son équipe faire la mise en place du buffet. Les serveurs qu'il a engagé en extra, vont et viennent dans la galerie des plateaux de verres à la main. Il est presque 18h30 et tout est déjà sous contrôle.
Après sa révélation, sur le fait qu'il était en réalité son propre patron, Adrian a essayé de se rattraper en me couvrant d'attention. Je dois admettre que j'ai été déçue de la façon dont il l'a annoncé. Il fait de la rétention d'informations, et j'ai eu l'impression qu'il n'avait pas assez confiance en moi pour me laisser pénétrer son univers. De prime à bord, il n'a pas le profil type du chef d'entreprise rigoureux, mais il n'en est pas moins efficace. Sa trattoria marche très bien, et commence à se faire une réputation dans le quartier et bien qu'il n'ai ouvert que depuis six mois, j'ai du mal à imaginer Camden sans lui.
— Tout va bien, vous avez besoin de quelque chose ? Lui demandais-je en m'approchant de lui.
— Non. Tout va bien. On est prêt. Il n'y a aucune préparation à faire, on a juste à servir. Comme on est pas loin, si il manque quelque chose, j'irai le chercher.
— Je suis contente que tu sois là... comme ça, tu pourras profiter de la soirée en ma compagnie... Dis-je, d'une voix sensuelle.
— Te surveiller plutôt... Eric n'est pas arrivé ? Dit-il, avec ironie.
— Non. Et si tu restes pour me surveiller, comme tu dis, autant rentrer chez toi... je n'ai pas besoin de chaperon et tu sais très bien qu'il n'est ici que pour travailler. Dis-je en passant mes bras autour de ses hanches. On a reçu des oeuvres superbes et je voulais te les montrer avant qu'on ne puisse plus se déplacer dans la galerie, si tu veux bien ?
— Hummm... une sorte de visite guidée... je suis preneur. Ce sera l'occasion de me transmettre un peu de ta passion...
— Exactement.
Je le prends par la main et nous commençons à traverser le grand couloir blanc qui mène aux oeuvres. Le premier tableau que je lui montre est une peinture abstraite. Pleines de couleurs et de motifs asiatique.
— La première fois que je l'ai vu, je l'ai aimé. Lui expliquais-je.
— Qu'est-ce-que ça représente ?
— Ce que tu veux. C'est ce qui est bien avec l'art, c'est toi qui décide. Tu peux y mettre ce que tu veux en fonction de ton ressentit, de ton passé, de tes envies...
— Moi j'y vois une soirée en tête à tête, avec une sublime jeune femme brune... elle porterait une petit nuisette en dentelle. Tu sais celle avec les fines bretelles et elle me...
— Chuuuttt... Dis-je, en mettant un doigt sur sa bouche. Je suis au travail. Si tu continues, on devra s'éclipser aux toilettes et je devrai m'occuper de toi...
— Je n'attends que ça...
Alors qu'il s'apprête à m'embrasser, j'entends la voix d'Eric au loin. Il lève les yeux en l'air en signe d'agacement. Je comprends que notre petit interlude romantique vient de s'achever et qu'il est temps de retrouver la réalité.
...
Devant l'une des oeuvres de Skanska, j'explique à Eric à quel point ce serait un bon investissement pour son client, d'acheter cet artiste si il veut commencer un patrimoine artistique.
— Tu me dis que ce mec est inconnu? On ne l'a jamais vu, ni entendu, mais ses dessins se vendent une mine d'or ? Dit-il, dubitatif.
— En gros, c'est ça. C'est surtout un artiste à part, exaltant et complexe, qui à le don de saisir l'insaisissable. C'est maintenant ou jamais pour acquérir son travail car il ne cesse de prendre de la valeur. Quand je suis arrivée ici, il y a quelques mois, un tableau se vendait 5 à 6000 £, maintenant ils ont doublés de valeur !
— C'est une sorte de nouveau Picasso ? Dit-il, en réfléchissant.
— Je sais que Picasso est le seul peintre que tu connaisses... alors disons, oui. En tout cas pour l'art contemporain.
— Ok. Je prends tout les tableaux alors. Dit-il calmement.
— Quoi ? Tu ne peux pas faire ça, tu viens de me dire que tu ne savais pas qui il était et d'un coup tu te mets à tout acheter ?
—Tu viens de me dire que je ferais une erreur si je ne saisissais pas l'occasion, et puis j'ai confiance en ton jugement. Si tu aimes, c'est que c'est bien.
— Tu n'as pas toujours dit ça... Répondis-je, avec espièglerie.
— À présent, je le dis. Donc je prends tout les tableaux de ce Sanka. Dit-il, avec aplomb.
— Skanska. Rectifiais-je. Il faut que tu renchérisses, tu n'es pas le seul à en vouloir... je te conseil de n'en prendre qu'un et après si ton client en veut d'autre, je te tiendrai au courant des nouveaux arrivages...
—J'ai un budget illimité pour ce genre d'achat et je veux l'exclusivité ! Dis-moi un prix et il te sera garantie. Dit-il en me regardant droit dans les yeux.
— Bien... après tout, ce n'est ni ton argent, ni le mien... Si tu veux les trois, je te conseille de faire une offre à 20 000 £.
— Pour le lot ?
— Par tableaux ! Dis-je avec un petit sourire.
Il me regarde hébété.
Je te l'avais dit qu'il commençait à prendre de la valeur...
— Vous avez combien de dessins ?
— Quatre.
— D'accord... Il me reste encore un peu de budget... Dit-il, avec ironie.
...
La galerie se vide peu à peu, Eric est retourné à son hôtel, et c'est avec la satisfaction d'avoir rondement bien mené ces enchères, que je pars rejoindre Adrian. Il range son matériel, en compagnie de son équipe.Il ne reste plus rien du buffet, qui a été dévalisé en un temps record. D'habitude, il y a de quoi nourrir mon immeuble, mais ce soir...
— Moi qui pensais que j'aurais au moins un petit bout de jambon... Dis-je faussement déçue.
— Je n'ai rien pu faire, j'ai même cru à un moment qu'ils s'en prendraient physiquement à moi, si je ne leur donnait pas tout. Dit-il, avec étonnement.
— Et bien... on dirait que vous avez rempli votre mission, monsieur Blake.
— Tu as vendu des tableaux ?
— Oui. Tout les Skanska sont parties les premiers bien sûr, et c'est moi qui ai tout vendu... Eric les a pris pour son client.
Il se raidit un instant en entendant le nom d'Eric, et je roule des yeux en constant son aversion quasi immédiate pour lui.
— Écoute, qu'est-ce-qu'il faut que je fasse pour que tu comprennes qu'il n'y a vraiment rien à redouter de lui ! Tu connais notre passif ensemble... il est là, dans cette ville et je ne peux rien y faire. Autant se comporter en adulte et essayer d'être le plus courtois possible.
Il s'avance vers moi, passe ses mains autour de mon visage pour m'embrasser doucement. Au contact de ses lèvres, je me laisse aller, me délectant de ce moment de délicatesse.
— Tu as raison. Il m'agace, même-ci j'ai pitié de lui. Il avait tout pour être heureux et il a eu la stupidité de tout gâcher... je ne ferais pas son erreur. Dit-il contre mes lèvres.
— Dépêche toi de tout emballer, j'ai hâte de te ramener chez moi... Dis-je, en lui souriant.
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General FictionLorsqu'Ella James quitte sa petite ville natale pour s'installer à Londres après une déception amoureuse, elle décide de pleinement profiter de sa nouvelle existence. Fraîchement diplômée des beaux-arts, elle commence une carrière dans l'une des gal...