Chapitre 38 : Le temps est un luxe

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Adrian

Les dessins s'enchainement mais ne se ressemble pas, quand je regarde ceux que j'ai fait depuis le début, j'ai l'impression de regarder un journal intime. Les corps sensuels des débuts, s'adonnant à la débauche, puis qui lentement deviennent plus intimes, moins furieux. Cette femme irréelle symbole de mes fantasmes puis la passion, le désir... Avant de découvrir la violence et la soumission que l'on peut aussi ressentir lors de l'acte charnel... tout ces tableaux ont été le témoin de ma vie, de la dernière année et demi que je viens de passer. À présent, la jeune femme fantasmatique, a des courbes plus généreuses, un ventre arrondit, mais n'a rien perdu de sa sensualité. Au contraire, elle irradie de toute sa féminité. Elle porte la vie. Elle est le monde. Elle est mon univers. Elle est Ella.

...

Nous nous rendons pour la première fois dans le nouvel appartement de ma mère qui lui a été attribuée par l'hôpital. J'ai hâte de la voir dans ce nouveau lieu, ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu indépendante et je pensais ne jamais la revoir ainsi.

Quand le taxi nous dépose Ella et moi, nous ne rentrons pas dans l'hôpital mais dans le bâtiment à côté, de l'extérieur cela ressemble à n'importe quel immeuble mais il abrite les patients en rémissions. Il y a un code et un interphone. J'appuie sur le nom de ma mère et après quelques secondes, elle nous ouvre. Quand nous atteignons son étage, elle nous attend déjà sur le pallier, souriante. Il n'y que deux étages, ce qui est une bénédiction à la vu de l'état d'Ella.

— Bonjour. Rentrez. Dit-elle, en nous laissant passé dans le hall. Faites comme chez vous. J'ai fini de ranger un peu car la disposition ne me plaisait pas... 

C'est un petit deux pièces avec cuisine ouverte. Il y a un canapé, une table avec quatre chaises, un chambre, les murs sont blancs, c'est assez impersonnel, mais c'est propre et elle a réussi à y apporter sa touche personnel avec les livres qu'Ella lui a offert.

— C'est très jolie ici, tu dois être bien. 

— Oui ! Je suis contente de ne plus être à l'hôpital... et puis lorsque mon petit fils arrivera, vous pourrez me l'emmener dans un endroit qui ne donne pas le cafard. 

Je me raidit à la perspective de lui emmener mon fils car, bien que nous ayons fait la paix avec cette partie de notre vie, je n'ai pas de bons souvenir de ma mère dans mon enfance et je redoute sa réaction face à lui. Je ne dit pas qu'elle est capable de reproduire ce qu'elle a fait avec moi, mais je ne le laisserai pas seul avec elle, en tout cas pas tout de suite.

— Vous avez le temps, il reste encore deux mois... En tout cas, ça sent divinement bon. 

— J'ai préparé le déjeuner. J'espère que ça vous plaira, je sais qu'Adrian est un chef et je compte sur vous pour ne pas être trop critique... Dit-elle amusée.

— Ne t'inquiète pas, si ce n'est pas bon, nous attendrons d'être sortie pour dire ce que nous pensons. Dis-je rassurant.

Ella lève les yeux en l'air et ma mère éclate de rire. Le couvert est déjà mis sur la table et elle nous invitent à nous asseoir. Ella a raison, ça sent vraiment bon, j'ai presque la sensation de reconnaitre cette odeur mais n'arrivent pas à mettre le doigt dessus. Quand elle sort de derrière le plan de travail avec un plat en verre, je souris presque bêtement.

— Une tourte à la viande! Je sais que c'est ton plat préféré. Dit-elle, avec chaleur.

— Tu t'en souviens ? 

— Oui, je m'en souviens... donne-moi ton assiette, je vais te servir. 

Je la lui tend, et me rends compte que je n'arrive pas à me remémorer quand ma mère m'a préparée quelque chose à manger pour la dernière fois. Il y a fait des plats tout prêt à la maison et quand je fus assez grand, j'ai pris en charge les repas.

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