Chapitre 4

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Lyon.

– ... Le général Pétain sympathisa avec l'ennemi. Mais n'oubliez-pas qu'à la seconde guerre mondial, Adolf Hitler c'était LE méchant : il n'acceptait que les blonds aux yeux bleus qui n'étaient pas...

La cloche sonna, annonçant la fin du cours. La plupart des élèves de la classe rangèrent leurs affaires.

– On finit ! hurla le professeur. Donc je disais : qui n'étaient pas de religion juive. Merci à tous et à la prochaine fois.


Illian et Fleur, adolescents de quatorze et quinze ans, sortirent de la salle d'histoire.

– Oh qu'est-ce qu'il est chiant ce prof !

– T'inquiète, le rassura son amie. On ne l'a pas ni jeudi, ni vendredi.

– Trop bien !

– Tu ne le savais pas ? s'étonna-t-elle.

– Non pourquoi ?

– Tu ne connais toujours pas ton emplois du temps par cœur !? Ça fait bientôt cinq mois qu'on est en troisième !

Le jeune homme vêtu d'un pantalon trop large pour lui et d'un imposant manteau d'un gris plutôt clair préféra orienter la conversation vers un autre sujet :

– T'aurais pas un ou deux bonbecs à me filer. J'ai méga la dalle !

– T'as encore pas mangé hier soir ?

Elle semblait tristement habituée par la situation.

– Mon dernier repas c'était hier midi à la cantine et j'ai encore deux heures à poireauter avant de bouffer alors...

– J'ai peut-être un carambar ou deux mais c'est tout... Tiens je n'en ai qu'un.

– Merci.

– Tu veux qu'on aille acheter de la bouffe demain ?

– J'ai pas d'argent désolé.

– C'est pour toi mais t'inquiète j'ai deux euros.

– Oh merci ! s'extasia-t-il, les yeux illuminés d'espoir tandis que son ventre gargouillait.

La jeune femme repensa aux raisons de cette faim instable que possédait son meilleur ami. Elle connaissait l'histoire par cœur. Même si elle la haïssait.

Quand les parents d'Illian s'étaient séparés, lui et sa grande sœur n'étaient encore que de petits enfants. Par on ne sait quel malheur, leur père et sa nouvelle insupportable femme obtinrent la garde du frère et de la sœur et leur mère déménagea, s'éloignant ainsi de l'ancien foyer mais également des deux prunelles de ses yeux. Le choix, elle ne l'avait pas vraiment eu. Sa mutation demeurait en quelque sorte une horrible excuse.

Comble de l'injustice, la belle-mère. Plus injuste qu'elle n'existait pas. Il fallait la comprendre, les soins chez l'esthéticienne et les restaurants à gogo coûtaient cher. Il paraissait évident que c'était le budget de base prévu pour les enfants qui écopait. Résultat : moins de jouets, moins de cadeaux à Noël ainsi qu'aux anniversaires. Au début, cela suffisait. Mais avec le temps, il fallait toujours plus d'argent. Petit à petit, les repas ont commencés à sauter. Tout d'abord un, puis deux, trois... Et bientôt ne resta que les midis, dont la plupart étaient gérés d'avance par le collège.

Marie, la grande sœur, avait déserté ce foyer maudit alors que son jeune frère rentrait en cinquième. Partie en internat dans un lycée spécialisé, elle était alors plus proche du centre-ville ; mais également de sa mère chez qui elle passait quasiment tous ses week-end. « Bon débarras » ne cessait de répéter la belle-mère tandis que le chien qui lui servait de mari acquiesçait en silence.

Le pauvre Illian, maigre comme aucun autre adolescent de son âge, pouvait heureusement compter sur les colis de sa sœur – ceux de sa mère n'arrivant jamais jusqu'à lui – et aux nombreuses aides de sa meilleure amie. Mais malgré cela, il demeurait continuellement aminci.


– T'as réussi le contrôle de français ? demanda Fleur en faisant référence à leur première heure de cours.

– Plus ou moins... Toi je te demande même pas !

Fleur était surdouée mais faisait habituellement exprès d'inclure quelques erreurs pour ne pas sauter de classe, trop peu sociable pour risquer de se retrouver seule. Elle eut un rire bref.

– Cette fois, j'ai mis que du bon ! La dernière fois que j'ai rendu un dix-neuf virgule cinq sur vingts, il m'a battue.

Pour Illian, c'était clair : « il », son père, cet homme qui battait sa propre fille, cet homme qui faisait souffrir sa meilleure amie en lui laissant de longues zébrures dans le bas du dos. 

***

Coucou ! Voici le chapitre 4 (qui est très court ; 720 mots) avec deux nouveaux personnages et bien sûr réécrit avec plein de nouveaux détails ! 😎🎉

A bientôt ! 🥰

Ylli_

Octo/ tome 1 • La rencontreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant