PROLOGUE

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Les pas affolés résonnaient dans le boyau étroit.

- Plus vite !

- Je fais ce que je peux t'es marrant !

Tio sortit le premier d'une grotte à moitié obstruée par les congères et la neige fraîche. Un passage avait été dégagé sommairement pour laisser passer deux personnes de front. 

Il stoppa net sa course en s'enfonçant dans la poudreuse. La lumière vive au sommet de ces chaînes de montagne l'aveugla d'autant plus violemment qu'il sortait d'un lieu sombre.

Le ciel était bleu et chargé de nuages au loin, mais la vallée en contrebas noyée dans la brume. Essoufflé et les poumons à vif à cause du froid, il poussa un râle en essayant de dégager son snowboard attaché dans son dos sans détacher son sabre. Attachant rapidement ses bottes à la planche il poussa encore un cri, cette fois beaucoup trop fort :

- Magne ! Magne ! Dio !

On entendit un grondement plus haut sur la montagne.

- C'est bon !

Un jeune homme essoufflé d'une vingtaine d'année déboula en trombe dans la neige. Par-dessus son pantalon gris de snowboard, renforcé sur les genoux et le postérieur, il portait, un manteau serré de cuir blanc et de fourrure, la capuche cachant un visage blanc au nez pointu, une bouche finement dessinée et des cheveux longs et blonds. Il Agrippa lui-aussi un snowboard dans son dos pour s'en équiper prestement. Ses gants de cuir fourrés entravant la prise sur la lanière.

Les deux hommes environ du même âge étaient habillés de manière identique. Pour un œil extérieur, seule la couleur des cheveux différait. Dio le blond, et Tio le brun.

- Tu l'as pas perdu ?! fit Tio de sa voix chaude, reprenant à peine son souffle alors que le dernier sorti crachait ses poumons.

- Non... c'est là, fit-il, tapotant sa sacoche en cuir, ceinte à son côté, à côté du piolet clipsé à sa ceinture.

- Go ! La neige déboule !

- La faute à qui !

Le jeune homme brun ne répondit pas, son œil noir, à lapupille étrangement fendue, semblait rieur.

- C'est quoi ces yeux violacés ?! Le grand air !? dit-il en riant.

L'autre, dont les iris violettes prenaient des teintes ardentes sous le soleil, ne répondit pas. 

Ils enfilèrent tous les deux leur masque pour protéger, et masquer, leurs yeux. Tio donna une tape sur l'épaule de son compagnon trop sérieux et s'élança dans la pente abrupte, traçant déjà une première courbe dans la poudreuse intacte. 

Au-dessus d'eux un glissement de neige était en train de se précipiter vers leur emplacement. Plus de temps à perdre. Dio s'élança à son tour, créant une seconde trace en lacet autour de la première.

Comme une hélice d'ADN dessinée dans la neige.

La pente était si raide qu'ils ne pouvaient voir leurs trois poursuivants s'éjecter du trou et armés d'arbalètes chargées. Elles ne purent pas être pointées sur les deux fuyards que déjà l'avalanche en emportait deux, un troisième restait coincé dans le trou rebouché.

Sur cette face de la montagne il serait relativement aisé de passer sur un versant sur lequel la coulée de neige ne continuerait pas. Mais il fallait faire vite et bien. L'adrénaline courait dans les extrémités de leur corps. Toute estimation fausse de la pente serait fatale, tout retard les emporterait dans la vague blanche qui les suivait de près.

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