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« Je suis dans le bus »  - Message envoyé -

Je releva la tête de mon portable pour regarder par la fenêtre. Observant défiler sous mes yeux tous ces arbres presque nus. L'hiver approchait et bientôt une couverture blanche recouvrirait leurs écorces fragiles. Je contemplais ce paysage que je connaissais si bien maintenant. Je gardais néanmoins les yeux rivés vers l'extérieur. J'étais comme tout le monde, et ne dérogeait pas à la règle. Regarder dehors, dans les transports, était la seule manière de se donner contenance et de ne pas, par nos gardes, croiser le regard de quelqu'un. Tout simplement parce que « ça ne se fait pas de fixer les gens ».

Je souris. Toutes ces règles de bienséances, bien ancrées dans notre mode de vie mais dont nous ne connaissions pas réellement l'origine. Tout ce que nous savions c'est qu'il fallait s'y plier sous peine, crainte de sortir du lot. Et il ne faut pas sortir du lot. Ceux qui affirmaient l'inverse étaient de véritables crétins. Ils étaient tout comme nous : des moutons. Certains se disaient « différents » et "qu'ils l'assumaient". Peut-être en étaient-ils réellement convaincus ? Le pensaient-ils vraiment ? Seulement c'était faux. Certes, certains artifices ou façon de penser nous distinguaient les uns des autres, mais ceux-ci sans dépasser l'entendement. Il y avait une certaine limite, non dite, factuelle, que personne ne dépassait. Le reste n'était qu'illusion. (illusoire)
C'est marrant ce qu'un trajet en bus et un peu de musique pouvaient nous faire philosopher. Je ferma les yeux et reposa ma tête contre la vitre du bus. « Night de Ludovico Einaudi » dans les écouteurs. Le piano avait toujours eu ce « quelque chose » qui me détendait.

Un soupire m'échappa.

C'était reparti pour une semaine de cours. Les cours n'avaient repris que depuis deux mois et demi, pourtant j'étais déjà complètement débordée par le travail. Bienvenue en psycho. Les rumeurs étaient non fondées ; il fallait bosser, même en psychologie.
Ma vie se résumait à bosser, aller en cours, revenir dans ma chambre universitaire, bosser, aller en cours, rentrer chez mes parents le week-end, revenir en ville,, aller en cours. Loin d'être passionnant. J'aurais tellement aimé être une de ces filles comme dans les livres.

« Vie ta vie comme dans un livre ».
Qui avait bien pu dire ça ? Vu ma culture générale, cela devait sûrement sortir d'un film.
C'est affligeant ma pauvre fille, ne pus-je m'empêcher de penser à cette réflexion.
Mais il aurait fallu que je sois une de ces filles magnifiques sans s'en rendre compte. Mais aussi bonne élève ou du moins super cultivée. Il aurait fallut que je sois dotée d'un quelconque talent, comme en chant, en dessin, en écriture ou encore virtuose de piano. Cette idée me fit sourire à nouveau.
Le hic c'est que, me concernant, je n'étais pas franchement bonne en cours, et pour ce qui était de ma culture, je lisais, certes, mais c'était loin d'être de grands classiques littéraire. Je ne pense pas que les chefs d'œuvres de Wattpad comptaient comme tel.
Pour ce qui est du physique, autant dire que j'évitais de croiser mon regard dans un miroir et les fois où je me maquillais ce n'était pas pour moi, mais plutôt pour ne pas effrayer les gens dans la rue.
Je pourrais faire des efforts, je le savais bien. Arrête de m'habiller de jeans troués, de sweat trop large et de basket usées. « Être plus féminine » comme me le répétait sans cesse ma mère . Mais à quoi bon me faire passer pour une personne que je n'étais pas. Et ce', simplement pour rentrer dans la norme ?
Concernant ma vie universitaire, elle était loin de sortir d'un roman à l'eau de rose. Oui j'étais dans une chambre universitaire; mais réservée aux filles. On oubliera donc le voisin de palier canonissime. La cohabitation se résumait plus aux crêpages de chignon et aux « Qui a volé mon masque aux algues marines ?! » scotché sur la porte du frigo de la cuisine partagée.

Je ne vivais donc réellement que dans un 9m2 plus communément appelé « placard à balais ». Et pour ce qui était de l'étudiant beau comme un dieu mais mystérieux à la fac on oubliera aussi. J'étais là depuis presque trois ans et c'était le « No man's land ». Mais « Haut les cœurs » j'allais survivre à cette année universitaire. Celle-ci et les suivantes ! « Vivons positif » était ma devise. C'est totalement faux.
Ce qui était sûr, en revanche, c'est que ce n'était pas aujourd'hui que j'allais vivre une vie pleine de rebondissements.

C'est sur ces dernières pensées que le chauffeur pila et que par surprise je me pris, de pleins fouet, le siège de devant. Me projetant du même temps dans la réalité, ma réalité. Je me redressa, tira mes écouteurs d'un geste agacé tout en soufflant.

Mia. L'Invasion (Tome 1) En réécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant