Casalnuovo RC

Chapitre 5

En media, "Pale bue eyes", the Velvet Underground

Ce soir, David, mon ancien patron et mentor fête les quinze ans de l'ouverture de sa première boutique. Une grande réception est organisée dans un des hôtels chics de la ville, et bien que je ne travaille plus pour lui, nous sommes restés assez proches, Tom et moi sommes donc invités.

Pour l'occasion, mon amoureux a tenu à m'offrir une robe que je n'aurais en aucun cas pu m'acheter. Nous avons fait les boutiques ensemble jusqu'à dénicher la robe de soirée parfaite. En soie perlée grise, elle est merveilleuse. C'est la première fois que je porte une robe longue, j'ai l'impression d'être une princesse. Alors que je me maquille dans la salle de bains, j'aperçois le reflet de l'homme de ma vie qui me regarde, appuyé dans l'encadrement de la porte. Je lui souris et il s'avance vers moi, fait glisser mes cheveux pour libérer ma nuque sur laquelle il pose ses lèvres. Je suis parcourue de frissons.

— Tu es sublime dans cette robe.

— Justement, tu me la fermes, s'il te plaît.

Dans le miroir, ses lèvres esquissent un sourire coquin tandis qu'il secoue la tête en signe de dénégation.

— Je ne vais pas sortir comme ça...

Ses doigts se posent sur la fermeture éclair mais il la fait doucement glisser vers le bas et rouvre tout ce que j'ai pu fermer seule.

— Tom...

— Lou, on a trente minutes devant nous...

— Vingt, sinon on sera en retard.

— Ça ne se fait pas d'arriver pile à l'heure, et vingt minutes, c'est amplement suffisant pour ce que j'ai derrière la tête.

Un peu plus tard, mes cheveux sont en désordre, mais mes joues plus roses et mes yeux plus brillants. Je me recoiffe rapidement tandis que Tom noue son nœud papillon sur le smoking de couturier qu'il s'est offert lui aussi. Deux kilomètres seulement nous séparent du lieu de réception mais nous ne sommes pas en avance et il commande un taxi pour m'éviter d'avoir à marcher vite avec ma robe et mes talons. J'enfile une paire d'escarpins, attrape ma pochette et ma veste, puis nous quittons mon appartement.

— Attends, fait Tom, en passant devant moi dans les escaliers. Il descend quelques marches, puis, avec son smartphone, me prend en photo. Sourire, Cendrillon !

J'éclate de rire. C'est vrai que ma tenue détonne un peu dans ma cage d'escaliers sombre et exiguë. Il remonte à mon niveau, et m'embrasse, avant de prendre ma main dans la sienne.

— Sweet heart, tu es époustouflante.

***

David avait vingt-neuf ans quand il a ouvert son premier magasin, une jeannerie. Trois ans plus tard, la seconde voyait le jour, une franchise pour jeune femme où j'ai commencé à travailler pour arrondir mes fins de mois lorsque j'étais étudiante, puis une de vêtements pour enfant, et une boutique de prêt à porter haut de gamme en 2010, dont j'ai été responsable tant d'années et enfin deux autres. Quinze ans, six boutiques, trente et un employés réunis, avec leur conjoint, sans compter les quelques anciens, comme moi. Je rejoins mes ex-collègues qui forment un groupe fermé dans un coin, on a beau tous se connaître, ce n'est pas toujours évident d'aller vers les autres. En me voyant arriver, Rihab, Pauline, Mathilde et Lola poussent un cri de joie et sautent dans mes bras. Même si je déjeune régulièrement avec l'une ou l'autre, nous sommes rarement réunies, et donc très heureuses de nous retrouver pour la soirée. Le mari de Mathilde et le copain du moment de Pauline sont là aussi, je les présente à Thomas, avant de papoter avec mes amies. Elles sont toutes élégantes ce soir, comme moi. Pour chacune d'entre nous, c'est la première fois que nous participons à ce genre d'événement et la jeune Lola est tout impressionnée. Elle est venue seule et n'ose même pas attraper une coupe de champagne. Aimablement, Tom lui propose son bras et l'escorte jusqu'au bar. Je les regarde s'éloigner, sourire aux lèvres. Cet homme est une merveille.