En media, "Walk on the wild side", Lou Reed
Tout au long du trajet, je lutte contre l'envie d'ouvrir une page google, de rechercher des infos, mais je veux être seule. Je sais que ma mère serait en colère si elle savait que j'avais réussi à soutirer l'information au mari de Rosa, surtout si facilement, mais c'est plus fort que moi. J'ai besoin de savoir, de voir son visage, de savoir à quoi ressemble celui qui est mon géniteur, ou au moins, simplement savoir s'il est encore en vie.
— Qu'est-ce que tu fiches, chérie ? me demande ma mère, se retournant vers moi qui traîne quelques pas derrière elles.
— Rien, rien, je cherche mon téléphone, je mens, les joues encore rouges de la surprise de Pasquale.
— C'est pas possible ça, tu es collée à ton mobile toute la journée, mais laisse-le un peu ! Tu as vu ça, maman, elle est terrible hein ! Vous, les jeunes...
Je remonte à leur niveau sans écouter son laïus. Je m'en fiche, j'ai ce que je suis venue chercher.
Arrivées dans la chambre, je fourre mes affaires pêle-mêle dans mon sac avant de clamer :
— Je vais faire un saut en ville, j'ai oublié de prendre un souvenir pour Tom !
— Oh, Loulou, je t'accompagne, tu veux bien ? s'exclame mamie Prune. Je dois rapporter des choses pour mon Pierrot ! Françoise, tu peux terminer ma valise ?
— Ne t'embête pas, mamie, dis-moi ce qu'il faut, je vais te rapporter ce que tu veux.
— Non, je suis contente, et je préfère choisir moi-même. Et puis ma petite, il faut bien que je t'aide, parce que l'italien et toi, ça fait deux, hein !
— Mais moi aussi je veux venir ! proteste ma mère. Attendez-moi, je me dépêche.
Je souffle intérieurement, impossible d'avoir deux minutes juste pour moi.
Je patiente donc pendant que ma mère et ma grand-mère terminent de rassembler leurs vêtements et produits de toilette. C'est dingue, nous sommes arrivées il y a vingt-quatre heures, et on croirait qu'elles sont installées pour des semaines.
Nous repartons vers le centre en fin d'après-midi, faire quelques achats. Je dégote du pesto à la genovese, des biscuits comme ceux de ce midi pour Tom, et du vin. Mes compagnes font quelques courses aussi, uniquement des produits alimentaires, et nous trouvons une petite trattoria où nous attabler pour le dîner. Nous avons beaucoup mangé à midi, et même si l'osso bucco est délicieux, je n'ai guère d'appétit. Je n'attends qu'une chose, que nous allions nous coucher pour enfin avoir un peu de temps pour moi, seule.
Enfin, ma grand-mère baille, fatiguée par ces dernières journées qui lui imposent un autre rythme que celui auquel elle est habituée, et ma mère veut se coucher tôt pour affronter le retour du lendemain.
Il n'est que vingt-deux heures quand nous éteignons la lumière. Je patiente sagement sur mon matelas, jusqu'à ce que j'entende les respirations se ralentir. Je repousse alors avec précaution le drap, et me glisse hors du lit. J'enfile un short et un tee-shirt à la place de ma chemise de nuit, chausse une paire de tongs et, mon téléphone dans la main, je descends sans bruit dans le lobby de l'hôtel.
Il n'y a presque personne, juste un couple d'amoureux et deux hommes, probablement en affaire, qui boivent un verre. Je commande un gin tonic au bar et m'éloigne vers le jardin privé. Le vent frais, venu de la mer, caresse mes épaules et me donne la chair de poule. Je frissonne, j'aurais dû prendre un gilet. Je joue un instant avec mon mobile, avale une gorgée du cocktail, puis enfin, j'ouvre une page de recherche où je tape son nom. Le nom de mon père.
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Casalnuovo RC
DragosteAprès des années d'errance, Louise est enfin heureuse. Elle a retrouvé son Thomas, et ils ont ouvert il y a un an la librairie dont elle rêvait. Mais le passé revient la hanter et commence alors une longue quête d'identité, qui la mènera jusqu'en Ca...