Chapitre 24 : Caduceus and Crown

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Roy Mustang tâtonna pour ses clés alors qu'il s'appuyait contre la porte de ses appartements, la fatigue et ses mains meurtries pas tout à fait guéries le rendant maladroit. Le briquet qu'Auric lui avait donné était un poids réconfortant dans sa poche, étant donné que claquer des doigts n'était toujours pas une option. Après avoir lâché son porte-clé encore quelques fois, il réussit finalement à ouvrir la porte et tira sur le cordon de la lampe qui pendait de l'ampoule nue dans le petit hall d'entrée. Le Führer avait gardé une suite bien plus luxueuse et vaste dans le Quartier Général, et c'était à lui de la prendre, mais Roy préférait la familiarité de son propre et humble espace. D'ailleurs, il n'était pas encore Führer, même si la couronne était à portée de main. Comme c'était étrange, de sentir une telle ambivalence à propos de la chose exacte qu'il avait travaillé à atteindre pour la plus grande partie de sa vie adulte – ou pas tant d'ambivalence qu'une sorte d'anticipation malsaine, comme la sensation dans l'estomac d'un plongeur alors qu'il se tient au bord du plongeoir, la respiration profonde avant de sauter. Sachant que c'était le point culminant de tous vos efforts, votre moment de triomphe, et pourtant désolé parce que... eh bien... parce qu'une fois que vous avez franchi ce rebord, tout serait fini, le travail d'années et d'années se précipitant vers son accomplissement en un instant. Et puis le dur travail de préparation pour le prochain plongeon, la prochaine compétition, le prochain chapitre commencerait. Il gloussa avec lassitude alors que la lumière s'allumait et il entra dans la pièce qui semblait simultanément la même et complètement différente après sa longue absence ; tout était à sa place et pourtant traînait avec un air de désolation et d'abandon.
Il n'avait pas utilisé ses quartiers à Centrale depuis la première nuit qu'Auric avait passé à Centrale, et la pièce était toujours dans l'état de désordre contrôlé dans laquelle ils l'avaient laissée – de la poussière de craie sur le sol, là où ils avaient travaillé avec les cercles, deux verres rincés et laissés sur l'égouttoir, la bouteille de whisky à moitié bue sur la table rachitique. Au moins les lits superposés étaient faits ; Roy faisait toujours son lit juste après s'être levé, les habitudes de toute une vie passée dans l'armée étant difficile à effacer, et Auric avait été un hôte étonnamment soigné. La seule vraie preuve qu'il avait été ici était un fil d'or scintillant sur l'oreiller que Roy descendit du lit du dessus, et le t-shirt à col ras emprunté qui avait été plié proprement en trois dans le sens de la longueur et suspendue au-dessus du repose-pied. Il ramassa le t-shirt et marcha jusqu'à la cheminé, tombant sur la chaise qu'il avait occupée cette nuit-là alors qu'il faisait une boule du vêtement et le jetait sur la chaise d'en face où Auric s'était assis toutes ces nuits plus tôt et avait dit à Roy sa peur – qu'il disparaîtrait, sans personne pour se souvenir de lui, effacé de l'existence par le retour d'Ed. Eh bien, Ed était revenu. Et Auric n'était pas vraiment parti, soupçonnait plutôt Roy.
- Parle-lui, Roy, l'avait urgé Roy. Tous ces ronds de jambe l'un autour de l'autre, c'est ridicule. Il est probablement seulement aussi incertain que toi sur où vous vous trouvez tous les deux. Et ça doit être difficile pour lui de gérer les souvenirs d'Auric en plus des siens. Et si Auric était remarquablement habile pour traiter des relations humaines, Ed a toujours eu du mal avec elles, si tu te souviens. Et...
Roy avait levé un sourcil à l'hésitation dans la voix du grand homme, et Maes avait haussé les épaules timidement.
- Et je ne veux vraiment pas que quoi que ce soit gâche l'intronisation que j'ai tant travaillé à organiser – Ed a toujours eu la désagréable habitude de faire exploser les bâtiments quand il est contrarié...
Il avait acquiescé avec fatigue, trop épuisé pour penser à une quelconque réponse pleine d'esprit.
- Je sais. Je le ferai. Après. Je suis juste tellement occupé là maintenant, Maes, et il l'est aussi, et...
Maes s'était alors penché et l'avait secoué doucement par l'épaule avec insistance pour arrêter son bavardage, bien qu'il ait pris soin de n'aggraver aucun des blessures qui guérissaient.
- Roy. Arrête. Tu as besoin de te reposer, et tu ne réfléchis plus bien. Parce que quand tu aimes quelqu'un – oui, aime, ne me regarde pas comme ça – tu prends le temps.
Il secoua la tête avec affection.
- C'est une bonne chose que vous deux tombiez l'un pour l'autre – je ne sais pas qui d'autre te supporterait, toi et tes grandes ambitions, sans faire l'erreur de devenir soit un flagorneur, soit une harpie. Y a-t-il un nom masculin pour harpie ?
Roy avait grogné dans son café à l'image d'un Ed irrité avec des ailes, des serres et une queue fourchue. Désormais il regardait de l'autre côté du vide béant entre les chaises et imaginait une paire d'yeux dorés à moitié amusés qui riaient moqueusement de lui et avec lui. Prendre du temps pour lui... n'exiger rien de moins de lui.
Demain, se promit-il, il devait parler à Ed demain. Pour le moment par contre, il allait dormir un peu. Se levant, il hésita, puis récupéra le t-shirt à l'endroit où il gisait froissée sur la chaise et le porta à son nez. Il sentait le savon, et le café, et l'acier chauffé, et le soleil. Comme Ed. Et alors qu'il se glissait entre les draps et qu'il sentait le sommeil le réclamer de ses doigts impatients, il le serra contre sa poitrine et le respira, mettant sa foi dans une promesse faite sur un champ de bataille pas si lointain.
Demain.

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