Pov Levi
Ava était là, penchée au-dessus de moi, concentrée à exercer une pression sur ma cuisse. Je m'efforçai de raccrocher sur elle mon regard et mon attention, luttant contre cette somnolence qui m'entraînait là où je risquais de ne jamais revenir. Je crevais d'envie de lui parler, de l'appeler par son nom et de lui donner le mien, de tenir ma promesse. En fait, je crevais d'envie de dire n'importe quoi qui aurait pu faire stopper ces putains de larmes qui dévalaient ses joues. Mais parler, c'était lui avouer que l'homme qui était en train de se vider de son sang sous ses yeux et sous ses mains, était justement celui qu'elle attendait depuis plus d'une heure et demie. Celui à qui elle voulait parler, parce que ça comptait pour elle, parce que c'était même ce qui comptait le plus pour elle, en ce moment, apparemment. Derrière ma cagoule, je me pinçai les lèvres. Non, je ne pouvais franchement pas lui faire ce coup-là. Pas à elle. Mon silence était sûrement lâche, mais je ne voulais pas lui infliger une perte supplémentaire.
Ouais, c'était bien mieux comme ça.
Bordel, ce qu'on pouvait se ramollir quand on passait l'arme à gauche ! Je me retrouvais échoué là comme une merde, à me peler les miches sur ce sol dégueulasse, et les seules pensées qui occupaient mon cerveau embrumé la concernaient elle. J'avais toujours été une brêle question relations humaines et étrangement condamné à ne comprendre les choses que trop tard. Après tout, il avait fallu que je vois Isabel baigner dans son sang pour réaliser à quel point je tenais à elle. Et aujourd'hui, c'était probablement en crevant à mon tour que je me rendais compte que je n'étais pas si glacial et insensible que ça. Si Erwin avait su quel genre de pensées traversait ma tête en ce moment, il se serait bien foutu de ma gueule.
Alors que je m'apprêtai à lâcher prise et laisser le destin faire sa petite affaire, une voix dans mon oreillette me ramena du côté des vivants.
- Levi ? Levi, tu m'entends ? Réponds, putain ! , s'inquiétait Erwin.
Tiens, quand on parle du loup.
Immédiatement, un mouvement dans mon champs de vision me tira un peu plus hors des brumes de mon esprit anémié. Quelqu'un s'accroupit à côté de moi, m'ôta mon micro et mon oreillette sans s'encombrer de la moindre délicatesse. Je poussai un grognement.
Qui était ce con ?
La question en amena une autre à laquelle je n'avais toujours trouvé aucune réponse : qui m'avait tiré dessus ?
- Erwin, c'est Kenny Ackerman, fit une voix grave. Nous sommes tous les deux dans le bureau des internes avec le terroriste qui retient Ava en otage. Nous tentons de négocier avec lui. La situation est tendue. N'intervenez surtout pas, on s'en occupe. Concentrez-vous sur les autres otages.
Il y eut un court silence, avant que la voix ne reprenne :
- C'est parce qu'il a enlevé son micro et son oreillette quand il a quitté le reste du groupe. Je sais pas ce qui lui a pris. Il était dans un état second. C'est pour ça que j'ai préféré le suivre.
Comme pour confirmer les propos de la voix, et mes pires craintes au passage, Kenny fit son apparition dans mon champs de vision. Il s'approcha d'Ava et s'arrêta près d'elle. Trop près.
- Ne vous inquiétez pas, Erwin, on s'occupe d'Ava, ajouta-t-il en lançant à cette dernière un regard entendu.
Kenny, putain !
Je poussai un grognement mais dont la rage s'étrangla en grande partie dans ma gorge asséchée. Étrangement, maintenant que je comprenais la situation, je n'étais plus tout à fait près à me laisser partir. Pas tant que ce fou furieux menaçait Ava. Et pas sans lutter contre ce destin à la con.
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Sa voix
FanfictionIl arrive que la vie vous place parfois au mauvais endroit au mauvais moment. Moi, par exemple, elle m'a piégé dans le service de réanimation de l'hôpital de Trost où je travaille, prise en otage par cinq terroristes. Mais cette même vie absurde vo...