Un peu de temps encore

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Pov Ava

Le brouhaha du self bourdonnant à mes oreilles me dissuadait assez efficacement de sortir de ma bulle. Là, retranchée dans la cale de mon esprit, je me laissais porter par le doux clapotis de mes pensées. Une semaine s'était écoulée depuis la fameuse nuit où Levi s'était échoué devant ma porte. Déjà une semaine depuis ce baiser ... Pourtant, son seul souvenir suffisait à raviver la brûlure qu'il avait laissé sur mes lèvres, comme si Levi venait à peine de les quitter. Une semaine, aussi, que j'étais sans nouvelle de lui. Mais cela ne m'inquiétait pas outre mesure. Même si je ne connaissais rien de son histoire, je le devinais plutôt animal farouche et solitaire qu'il faudrait apprivoiser avec patience et délicatesse. Raison pour laquelle, d'ailleurs, je n'avais pas insisté pour le retenir lorsqu'après m'avoir embrassé il avait déserté mon appartement l'air penaud. Sur le pas de la porte, il m'avait simplement averti dans un murmure qu'il faudrait lui « laisser un peu de temps ». Peut-être que toutes ces choses auraient dû m'inquiéter, m'angoisser, me plonger dans des ruminations interminables ... mais, bizarrement, ce n'était pas le cas. Pour une raison qui m'échappait complètement, j'avais confiance en cet homme.

- Tu as meilleure mine ces derniers jours, me glissa discrètement Bertholdt en m'arrachant à ma bulle.

Mon collègue était assis en face de moi, en bout de table. Nous mangions aujourd'hui avec trois de ses amis, tous internes dans le service de pédiatrie.

- Mmh, tu trouves ? , répondis-je vaguement sans relever les yeux de mon assiette.

Il y eut un court silence durant lequel j'espérais pouvoir retourner puiser à la source de ma mémoire le souvenir brûlant des lèvres de Levi, mais c'était sans compter la ténacité de Bertholdt.

- Qui est Levi Ackerman ? , lâcha-t-il comme on lâche une bombe.

Je m'étouffai à moitié avec ma bouchée de viande.

- Je te demande pardon ?

- J'ai trouvé un compte-rendu d'hospitalisation à ce nom dans notre bureau la semaine dernière, mais après vérification nous n'avons jamais eu ce patient à l'hôpital.

- Oh ... oui ..., bafouillai-je. C'est juste un ancien patient de Trost.

- Un ancien patient soigné pour une plaie par balle, admis en réanimation le jour de la prise d'otage et qui a le même nom de famille que le commissaire de police arrêté ce jour-là ...

- Dr Hoover, mêlez-vous de vos affaires ! , le coupai-je d'un ton plus sec que je ne l'avais voulu.

- Dr Rosenberg, rétorqua-t-il en se penchant vers moi, je ne sais pas à quoi vous jouez, mais faites attention.

Je fermai les yeux quelques instants et poussai un profond soupir.

- Tu n'as aucune raison de t'inquiéter, fis-je dans un sourire crispé qui ne risquait pas de le tromper.

- Ava ... Quand est-ce que tu es convoquée pour témoigner à ce procès ?

Un frisson me courut le long de la colonne. Pourquoi fallait-il qu'il ramène ça sur le tapis tout à coup ?

- Dans un mois, répondis-je plus sèchement encore.

Bertholdt garda le silence mais soutint si intensément mon regard que je me mis à me tortiller nerveusement sur ma chaise. A quoi jouait-il au juste ? Où voulait-il en venir ?

- C'est très aimable de ta part de te soucier de moi, Bertholdt, finis-je par ajouter d'une voix qui entendait clore la discussion. Mais je me répète : je n'ai aucune envie de parler de ça.

Sa voixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant