Le procès

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Pov Levi

Affalé au fond d'un fauteuil club d'un vert dégueulasse, je me contorsionnai pour attraper mon portable dans la poche de ma veste. Pour la énième fois, je vérifiai mes messages. Rien. Je vérifiai l'heure : 14h32. Une demi-heure de retard. Mais putain, où était Ava ? Je basculai en avant, plantant mes coudes sur mes cuisses avant de plonger nerveusement mes doigts dans mes cheveux. Pourquoi n'était-elle pas encore arrivée, bordel ? On n'a pas idée d'arriver en retard le jour de son audition au tribunal ! Mes tripes se ratatinèrent au fond de mon abdomen à l'idée qu'il lui soit arrivé quelque chose ... et, bizarrement, je n'arrivais pas à imaginer d'autre explication à son absence. Mes doigts s'agrippèrent encore un peu plus à mes cheveux. Et si Erwin et moi nous nous étions gourés sur toute la ligne ? Et si Ava était vraiment en danger ?

- Putain ! , crachai-je entre mes dents.

Ne pas avoir de ses nouvelles, ne pas savoir ce qui se passait me rendait fou. Et j'étais complètement impuissant : si elle avait besoin de moi, je ne pouvais absolument rien pour l'aider. J'étais coincé ici. Tout comme elle, j'avais été convoqué au palais de justice à 14h. Cela faisait déjà une bonne demi-heure que j'attendais d'être appelé à la barre, dans une pièce annexe réservée aux témoins. Quelqu'un viendrait me chercher d'une minute à l'autre pour m'escorter jusqu'à la salle d'audience. Qu'est-ce que tu fous, Ava ?! Les yeux rivés au sol, mon cerveau turbinait vainement en quête de réponses à cette foutue question ... réponses qu'il ne trouverait évidemment jamais par lui-même. Je tentai de me rassurer : après tout, elle n'avait pas cherché à me joindre, c'est donc que tout allait bien, non ? La porte s'ouvrit soudain. Je relevai aussitôt la tête pour voir apparaître un grand type à l'air sinistre, revêtu d'un uniforme.

- Monsieur Ackerman, si vous voulez bien me suivre.

Je me levai et vérifiai une dernière fois mon portable. Toujours rien.

- Monsieur, vous n'êtes pas autorisé à avoir votre téléphone durant l'audience, me fit remarquer l'agent. Mais vous pouvez le laisser ici, vos affaires seront gardées.

- Je sais, grognai-je en balançant mon portable sur le fauteuil.

Le grand-type-lugubre me conduisit jusqu'à la salle d'audience, sans un mot et dans une démarche guindée qui me donna furieusement envie de lui préciser qu'un balai servait à nettoyer le sol, bien plus qu'à se le mettre dans le c... Arrivés au pied d'une large porte en bois massif, l'homme poussa un battant et me précéda dans une vaste salle bondée de monde. L'agent me fit remonter l'allée centrale en direction de l'estrade où siégeaient le juge et ses assesseurs. Je profitai du chemin pour jeter un œil aux personnes de l'assemblée venues assistées au procès ainsi qu'aux jurés, à gauche de l'estrade. Quelqu'un m'annonça et l'agent me convia à prendre place à la barre des témoins. Une fois installé, je jetai un coup d'œil au box des accusés. Kenny, affalé sur son siège, me fixait en arborant un putain de sourire. Ce connard avait l'air de bien s'amuser !

- Tch ...

- Monsieur Levi Ackerman, tonna la voix puissante du juge, vous êtes le premier témoin a être auditionné dans ce procès. Je vais d'abord vous demander de prêter serment avant d'entendre votre témoignage. Je vous remercierai de bien vouloir n'exposer que les faits.

J'opinai.

- « Je jure de parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité », récitai-je.

A peine le serment prononcé, j'enchaînai illico. Si monsieur le juge voulait des faits, il allait être servi. Au total, il me fallut une bonne vingtaine de minutes pour relater la prise d'otages, puis encore une dizaine d'autres pour revenir sur l'affaire de Stohess. A la fin de mon récit, le procureur m'adressa quelques questions qui ne me posèrent aucune difficulté. Néanmoins, la partie n'était pas encore finie. Je m'attendais à ce que les questions de l'avocat de Kenny soient autrement plus salées. Erwin m'avait prévenu : la défense chercherait très certainement à remettre en cause la fiabilité de nos témoignages pour permettre, en définitive, l'abandon de certains chefs d'accusation.

Sa voixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant