Chapitre XVIII

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Je prit le dossier du gars de Cap Carnaval et le balança par la fenêtre. Le vent emportait les feuilles, et la pluie les déchiquetaient. C'était aujourd'hui le 102ème anniversaire de l'armistice à Bruckston. C'était une occasion d'organiser des concerts en pleine rue, pour un éventement qui avait passé deux générations. Comme une sorte de hymne à la paix. Alden Lay s'était produit au carrefour de l'Europe dans le 5ème arrondissement, comme pour la commémoration de la Pluie De Sang. Comme d'habitude, le carrefour était encombré par 100 000 junkies. Le 4ème arrondissement était maintenant presque impraticable en voiture, et la moitié de la ville était un chaos automobile. J'aimait voir Bruckston dans ces jours là. Les actifs de la ville encombrent les rues au quotidiens, et le inactifs les occupent le soir et les jours de fêtes. Une belle dualité de population, même si en réalité une grande majorité étaient comme moi, dans les deux dualités. Et pour ce qui est des forces de l'ordre, même la police de New York n'aurait pas sû gérer la situation. Et puis, un événement comme celui-ci était profitable à tout le monde.

Ce jour là, Alphonse et Sheldon étaient venus avec moi dans les rues. C'était le moment de pas se prendre la tête, mais surtout discuter de ce qu'il s'était passé à Paris. Sheldon m'appris qu'il y a trois jours, le quart des membres du gouvernement Français on été assassinés. Enfin, se seraient suicidé, mais on a du mal à y croire. Plus les choses évoluaient, plus les deux intéressés d'Interpol commençaient à envisager la secte. Pour que des meurtres, non élucidés par la police, il y a forcément de la corruption quelque part. Sheldon m'avait dit que pour vouloir renverser un gouvernement il faut soit être un homme très puissant, soit un parfait sociopathe. Dans le grand boulevard du 4ème arrondissement je fût soudainement plaqué au sol par deux hommes en chemises noires.

"Cette fois ci t'es mort espèce d'enfoiré. Jeff, bute le."

Le Jeff en question était tout chétif pâle et tremblant hésitant sur la gâchette. Alphonse sauta sur l'homme en face.

"Police Française j'ai droit d'intervention alors lâchez moi ça!

- Et merde quel enfoiré! Jeff bute le et applique!"

L'homme se tira une balle dans la bouche. L'autre me regardait avec un air ahurit et lâcha son arme. Encore un qui s'était laissé embobiné.

Deux jours de tentatives d'interrogatoire passèrent, mais l'homme qui avait refusé de se suicider restait de marbre, ne regardant que le mur de sa cellule sans rien dire. Un après midi de juillet, Alphonse m'appela.

-C'est décidé Allan. Vient au troisième rue Wollinski, au bureau de poste. Maintenant, on a vraiment besoin de renseignements, on a trop longtemps hésité. Dit-il sur un ton plus que sérieux.

Il avait raccroché aussitôt. Je finit mon article du journal du gouvernement local qui prenait maintenant bien plus de place aujourd'hui. La grève s'était étendue à quelques milliers de travailleurs et le ème arrondissement de Bruckston s'était arrêté de fonctionner, notamment la centrale à charbon qui laissait le 8ème et le 10ème arrondissement sans électricité. Je prit le long métro qui passait à traver et par dessus les immeubles de Bruckston, s'enfonçant pardois dans de profonds tunnels étroits, dont le délabrement laissait entrevoir quelques morceaux des catacombes de Bruckston. C'était en fait des galeries que l'on avait creusé en découvrant des gisements de glaise pour fabriquer les quartier nord Est de Bruckston, et de la pierre blanche pour le centre et le sud. Elles faisaient plus de 400km de long, et seulement pour la partie découverte. Plusieurs étages de galeries était sous la cité, des centaines de mètres sous terre. Il y avait beaucoup de visiteurs récurrents dans ces tunnels. J'y était déjà allé étant plus jeune, et ils étaient d'autant plus terrifiants que ailleurs. Au premier niveau, il restait des traces d'aménagements de la mines avec d'anciens locaux et salles électriques. Parfois des stations de métro rénovaient ces réseaux pour construire des stations comprenant des restaurants, des cafés, des magasins. Une ville sous la ville. Au deuxième niveau cela ressemblait plus à des mines soutenus de murs de briques. C'était un véritable labyrinthe. Et les deux derniers niveaux étaient des grottes artificielles qui rejoignaient d'autres naturelles. On ne pouvait que y entendre le bruit d'une cascade souterraine, Bruckston était inaudible d'ici. Et, si on suivait ses grottes, on pourrait surement aller jusqu'au Montana, ou en Floride, que sait-je. Mais il faudrait avoir un sens de l'orientation que personne n'aura jamais. En général, les visiteurs interdits peu expérimentées n'y allaient jamais. Mais tout bon habitait de Bruckston se devait de les visiter au moins une fois dans sa vie même si cela était proscrit par la loi.

Janie volait au dessus de l'espace aérien de Bruckston, le manche de son F-100 vers elle. Elle bifurqua en spirale, prenant de l'altitude lentement. Elle pouvait presque apercevoir à travers le brouillard les buildings de Manhattan. Et au nord, l'immensité de Boston. Bruckston était quand à elle gigantesque même vu du ciel. Cela la détendait de patrouiller au dessus de la ville. Même si c'était restreint, et qu'il fallait rester attentif au trafic aérien civil. Elle avait tout lâché pour piloter des avions. Lorsque son fils était mort d'un accident de voiture sur le périphérique Bruckstonois, son mari s'était suicidé quelques semaines plus tard. Et sa fille était partit refaire sa vie quelque part dans San Fransisco. Mais elle n'avait ni l'envie de mourir, ni l'envie de vivre non plus. Elle avait commencé à boire, puis était tourné à le méthamphétamine. Après une longue désintox et trois ans de cauchemars, elle décida de se remettre à vivre, et un peu par hasard, avazit décidée de passer son brevet. 4 ans en plaisance, bénéficiant des allocations, puis en avions militaires, dans l'armée de l'air de Bruckston. C'était des petites forces, mais c'était une branche de l'armée américaine. Même si Bruckston était totalement indépendante, ses forces militaires étaient maigres en cas de grande guerre. Tout en sachant que les États Unis et Bruckston n'étaient pas très amicaux. Enfin, jusqu'à Donoré. Elle repensait à toute son histoire dans le ciel, sans un soupçon de tristesse. Elle avait fait la paix avec tout ça. Puis, dans le ciel un vieux coucou que elle ne pouvait identifier l'interpella. Elle fit rugir le moteur du F-100 et se stabilisa derrière lui, en réduisant les gaz. Elle balança ses ailes, et l'avion voisin répondit. Elle lança un appel radio.

"Ici F-100 Jaguar-250, demandons votre retrait de l'espace aérien militaire. A vous."

La radio fit un silence absolu.

"Je répète ici F-100 Jaguar-250, demandons votre retrait dans l'espace aérien militaire, nous pouvons faire feu."

Une minute passa, et une voix dans la radio retentit.

"Foutue radio de m... heu... Reçu, ne tirez pas."

Elle appuya deux fois sur le combiné. Mais l'avion d'en face ne bougeait pas. C'était une chose dont elle avait toujours redouté: un avion civil qui ne répondait pas ou qui faisait un refus devait être abattu au bout de bien trente minutes, sans conditions. Elle n'avait vraiment pas envie de ça aujourd'hui.

"Je répète, demandons votre retrait dans l'espace aérien militaire, veuillez vous diriger vers le secteur Est. A vous."

L'avion ne bougeait toujours pas. Elle accéléra pour se mettre en face. Elle volait à 150 kilomètres par heure, ce qui était très dangereux pour un F-100. Il fallait faire vite pour identifier le pilote. Mais un main armée d'un pistolet à fusée sortit du cockpit voisin. Le flaire partit comme une vraie balle dans le cockpit de Janie. Elle ne voyait plus rien, aveuglé et étouffant par la fumée rouge qui s'échappait du cockpit. Elle sentit ses jambes prendre feu, et l'avion se déséquilibra, cogna violemment sur l'avion à côté, et une descente raide commença. Elle n'arrivait pas à équilibrer l'avion qui partait dans tout les sens. Elle attrapa le micro, tétanisée, se demandant si tout ceci était réel.

"Mayday, mayday appareil en difficulté je..."

Elle perdit connaissance quand l'avion perdit brutalement de l'altitude. Puis elle revint à elle trois seconde plus tard, à un altitude bien moins élevée. La douleur de ses jambes la fit hurler, et elle n'eut que le temps d'ouvrir le cockpit avant que l'avion ne s'écrase sur un immeuble du 13ème arrondissement de Bruckston. Le coucou s'écrasa plus loin dans la campagne, et son pilote se posa tranquillement en parachute dans l'état de New York quelques kilomètres plus loin.

BruckstonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant