Chapitre XXIII

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La gare Sud de Bruckstonétait tout ce qu'il y avait de plus angoissant: quatres étagessous-terrains, abritant de longs tunels blancs délavés, éclairéspar de sinistres néons suspendus. Elle faisait face à la banlieuederrière le périphérique qui ne se résumait qu'à des HLM et desusines face à la cité dont on apercevait les lumièresmélancoliques sur les derniers rayons de soleils que quelques nuagesfiltraient. Cet endroit n'avait rien de bon, les agressions étaientnombreuses, et la porte sud de la ville était un véritable carnageautomobile. J'enjamba les deux marches du train afin d'y pénétrer.C'était une sorte de reconstitutions des trains sibériens, danslequel on servait le thé, et qui disposait quelques compartiments.Je trouva la porte vitrée que j'ouvrit. Il y avait une couchetteavec une petite table. J'était seul dans ce train. Je posa mon thésur le bureau, et je m'assit sur le siège. Je sortit ma fiole devodka et en versa un peu dans mon thé. J'alluma un cigarette avalale contenant de la tasse cul-sec. Tout ceci me rappelait ma Russienatale. Les longs trains dans lequel on disposait de la Samovar, unegrande bouilloire Russe dans laquelle on faisait chauffer de l'eauavec du charbon que l'on faisait brûler en dessous. Le traincommença à entamer le trajet, et pénétra dans un tunnel. Jesortait mes papiers. L'homme se trouvait dans le Bronx dans une ruequi n'était même pas indiquée sur la carte. Je regardait tout ceque j'avait synthétisé sans trop comprendre moi-même, la vodka metapait sur la tête, et les quelques médicaments que je prenaitcontre ma gueule de bois constante aussi. Je ne parlait plus trop, jeregardait la vie et le temps défiler devant mes yeux depuis quelquestemps. Je me sentait totalement extérieur au monde – ce qui devaitêtre quelques symptômes premiers de l'alcoolisme – me remettanten question sans cesse. Le gouvernement local avait été dissout.J'avait appelé Burry tout à l'heure à la gare. La police aprèsles élections ont directement intervenus pour démanteler leprojet, et le gouvernement de Donoré avait commencé à infliger dessanctions de grèves sur les salaires, ce qui de fait, pour lamajorité des ouvriers de Bruckston était non seulement uneaberration mais une amputation. Un salaire à cette époque valait àpeine de quoi nourrir une famille, alors j'imaginait que ces grèvesavaient fait un large pas en arrière. J'hésitait moi même àquitter Bruckston et aller vivre à New York jusqu'à la fin de mesjours. Ou en France. Ou même dans mon pays natal, mais qui sait cequi arrive à quelqu'un qui revient d'une dictature dans laquelle ila échappé de peu? Triste sort. Puis dans mespensées, je commença à m'assoupir, jusqu'à mon arrivée àBrooklyn.


J'étaisarrivé assez tôt ; dix heures du soir pour être précis. La neigeavait disparue en étant descendu vers le sud, mais l'air étaitencore bien glacial. Je dormit une demi-nuit dans un hôtel d'unquartier empilé de New York. Je m'était donc rendu en plein dans lequartier du Bronx où tout le monde le dévisageait, et où il auraitbien pût finir planté par le premier venu si il n'avait pas faitplus vite. Lorsqu'il frappa à la porte un homme portant unemoustache et un cigare lui ouvrit et fit signe de rentrer.


« J'éspère,Mr Powinski que vous avez le cœur bien accroché. Whisky ?

Avec plaisir. Je tenait simplement à vous remercier pour l'anonymat que vous venez de percer pour pouvoir m'obtenir ces informations. - Il approuva d'un geste de la tête -

Je sais que vous êtes un journaliste respectable Mr Powinski, mais il faut quand même que je vous avertisse sur quelques points qui seront cruciaux. - en versant l'eau de vie dans les deux verres – Vous savez, j'ai reçu plusieurs lettres de menaces. Je me suis fait poignarder une fois devant chez moi et drogué, agressé, dépouillé. Tout ceci n'est qu'une large plaisanterie pour pouvoir me faire lâcher l'affaire que je menait activement contre les Chapeaux Noirs que... Vous connaissez me semble-t-il ?

Absolument. Mais vous êtes loin d'être le seul.

Évidemment, on ne change pas les méthodes lorsqu'elles sont bonnes. Sachez que le gouvernement est contrôlé partiellement depuis cinq longues années. Et il l'est totalement à ce jour. J'ai connu le Bruckston ou le gouvernement rayonnait, où tout le monde était d'accord. Puis des ligues fascistes on commencé à naître, jusqu'au jour ou sa tête a été trouvée.

Donoré.

Depuis ce jour, et ce bien avant que cet imbécile arrive au gouvernement, nous avons eu des menaces, des enlèvements, et la police a commencé à être totalement laxiste avec ces délits. Chaque mots que l'ont prononçaient risquaient de nous envoyer les pieds dans le béton. C'est pourquoi j'ai commencé à enquêter en secret, avant d'être rapidement rattrapé. - Je bût une longue gorgée de whisky attendant le long discours de mon interlocuteur – Lorsque plusieurs de mes confrères ont disparus j'ai commencé à chercher de tous les côtés. Quelque chose clochait dans la façon dont certains chargés du budget s'exprimaient. On avait le droit à 20% du capital de Bruckston sur des « aides aux quartiers défavorisés ». J'avais beau regardé dans le 14ème, le plus pauvre quartier de Bruckston, ainsi que dans tous les quartiers populaires, et aucun travaux de rénovation à l'horizon, pas même une soupe populaire en plus des autres déjà existantes. J'étais allé jusqu'à faire du porte à porte pour demander si les habitants recevaient un quelconque pension. Je n'ai rien trouvé. C'est alors que je me suis mis à fouiller tous les bureaux de certains confrère pour essayer d'en tirer quelque chose. J'étais aussi allé en « cambrioler » un afin de trouver des résultats de dépenses. Et ce que j'avais découvert m'avais stupéfait. 20% de l'économie de Bruckston partait dans du trafic d'opiacés, d'armes, et par dessus tout de corruption. Je m'était procuré une liste qui citait les deux tiers du gouvernement qui touchaient une prime mirobolante en changeant de positions politiques. Depuis près de cinq je bossait avec des gens qui étaient payés bien plus que moi avec de l'argent sale, tout ça pour contrôler la ville à distance. Et l'ancien premier ministre en faisait partie. Toute la police, était aussi payée, ainsi que d'autres fonctionnaires, et une immense brèche sous cette ville abritait la plus grande économie souterraine de l'histoire. - Il finit son verre et se resservit du whisky – Et tout ça, cela va de soi, dans le silence complet. Personne ne savait. Quand j'ai on a voulu m'assassiner chez moi, et que j'ai réussi à assommer mon assaillant avec une bouteille alors que je m'était dissimulé prudemment derrière la porte, je suis directement parti pour New York. Et je sais que ces salauds peuvent continuer de me chercher, il ne me trouveront pas. »


J'étaisbouche baie. Cela voulait dire que le gouvernement a commencé àêtre corrompu deux ans après mon arrivée à Bruckston ? Jen'arrivait pas à y croire. Tout ces gens qui crevaient la faim, ilsse faisaient escroquer toutes leurs taxes qu'il payaient si gentimenten faveur de la gauche en espérant avoir des aides en retour. Etc'est pour cette raison qu'il n'avaient jamais rien en retour.


« Vousn'avez pas essayer de les rattraper ensuite ?

J'ai en fait engagé plusieurs tueurs à gages et détectives privés depuis New York pour enquêter dessus. Seuls quelques uns en étaient revenus et le peu qui étaient retournés ici m'ont avoué que plus jamais il ne remettraient les pieds dans cette affaire, sans trop me dire pourquoi, mais je voyais bien qu'ils étaient traumatisés. Et puis, j'ai commencé à boire, me rendant totalement alcoolique en pensant à toutes ces morts dont j'avais pût assister et que j'avais indirectement commis en envoyant ces gens là dans cet enfer. Il faut savoir que c'est vous qui m'avez fait connaître les Chapeaux Noirs, pas plus tard qu'hier je pensait simplement à la plus grande fraude financière possible, mais si cela s'étend à un but politique ce sera alors bien plus grave que prévu. Sachez que désormais l'intégralité du gouvernement de Bruckston est corrompu. Donoré est un Chapeau Noir. Il ne vient pas du tout du Canada, il est né Parisien et est issu d'une grande et riche famille influent de ces malfrats. Il est presque déjà trop tard. Le peuple de Bruckston se révoltera, mais plus rien ne pourra arrêter les forces du gouvernement. Même les Etats Unis qui sont que sait-je aussi dans le coup ne lèveront pas le petit doigt. Personne ne reveux d'une guerre mondiale. Appelez à l'aide Mr Powinski. Faites le avant que je meure d'un coma éthylique. Ou il sera trop tard. L'utopie Bruckstonoise est déjà en train de s'éteindre. »


BruckstonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant