Chapitre XXXVII

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Le congrès avait déménagé dans les locaux du gouvernement, ce qui m'avait rappelé beaucoup de souvenirs ; bon ou mauvais, car c'était ici qu'un feu s'était déclaré il y avait de cela quelques mois, dans le second arrondissement. La salle empestait en effet la suie, mais l'amphithéâtre que nous occupions était sur une aile du bâtiment qui avait été préservé de l'incendie. Un amphithéâtre vaste, les murs pleins de fresques et de boiseries, et en haut, d'immenses fenêtres ouverte auprès desquelles flottaient d'épais rideaux rouges. Un juge diplomatique Allemand qui parlait français à la perfection feuilleta ses papiers, et s'adressa à Donoré, qui ne rigolait plus du tout et gardait les yeux fixés sur le plancher, comprenant bien que la situation ne tanguait pas en sa faveur.

"Je me suis rendu aux archives de votre gouvernement hier, et je suis tombé sur ceci. - Il agita une pile de feuilles de papiers au dessus de sa tête – Celui ci indique que le mois de novembre de l'année dernière, un milliard de franc avait disparu des caisses de l'état. J'ai ici un justificatif tâché d'encre noire. C'est ainsi que je vous pose la question Mr. Donoré quel a été la destination de ces fonds?"

Celui ci redressa la tête, et mit tellement de temps à répondre que je crût qu'il allait sortir de l'enceinte du bâtiment sans dire un mot. Mais il finit par se défendre.

"En octobre de cette même année, j'avais proposé une prime pour les agents de service publiques qui... Qui se comportait bien vis à vis de la nouvelle constitution qui avait été instauré après mon élection.

- Une prime? Je crois n'avoir entendu ça nulle part, avez vous rédigé une proposition, ou ne serait-ce qu'un justificatif officiel?

- Non, j'avais simplement décidé ceci avec mon ministre du budget, Mr. Vascilli paix à son âme, et une prime de bonne conduite a été assignée à nos fonctionnaires de police, de l'hôpital, et de l'entretien de la cité si je me souviens bien."

Un avocat se leva, brandissant lui aussi des papiers en l'air, et prit la parole sans aucun consentement de l'assemblée.

"J'ai ici des fiches de paye de décembre, de la police, de l'armée, et des hôpitaux. A aucun moment ces revenus complémentaires ne sont justifiés. D'ailleurs, elle est inexistante pour les services pacifiques, je ne vois que ceci pour les forces armées et les forces de police. Expliquez nous.

- D'ailleurs, reprit le juge, ces primes correspondent à une croissance significative de... D'arrestations, et de condamnations à de lourdes peines."

Donoré se frotta le front, au pied du mur, il commença à bafouiller, les mots lui échappant de la bouche:

"C'est... Une prime. Pour que les services publiques répondent mieux à nos attentes."

Le juge, qui commençait à comprendre où il voulait en venir enleva ses lunettes, et griffonna quelque chose sur un papier.

"Vous me livrez donc là une preuve de corruption des services juridiques et exécutifs. Votre constitution n'a pas été modifiée dans cette optique, Mr. Donoré. Les faits de Mr. Powinski sont donc avérés. Avez vous d'ailleurs quelque chose à dire?"

De loin je fit un signe de la main pour indiquer que non.

"Mr. Donoré?"

Le silence accablant de l'assemblée le laissa sans voix, regardant de nouveau à ses pieds, sans rien dire.

"Mr. Donoré, vous passez au tribunal d'état, vous serez pris en charge par la justice internationale."

Il releva la tête, hors de lui, et approcha du micro.

"Qu'il en soit ainsi. D'ailleurs, je démissionne du gouvernement."

En disant cela, des exclamations de rage, de joie, et de surprise s'élevèrent dans la salle, il descendit de l'estrade pour rejoindre la sortie accompagné de plusieurs policiers américains. Il me fusilla du regard en se levant, et m'avait adressé un geste déplacé.

BruckstonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant