XIX

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Une question de tradition

As Salam aleykoum. Bonne lecture et n'hésitez pas à voter et commenter s'il vous plaît 🥺.
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Le jour se levait enfin.
On entendait le coup de balais de quelques femmes qui balayaient la cour de leurs concessions et d'autres s'affairaient dans la cuisine.
Bacar était allongé sur son kraka dans la cour,son chapelet en main, il pensait encore à la proposition qu'il venait de recevoir. Il s'imaginait déjà des billets de lasses à la main, vêtu d'un grand boubou et des sandales coûteux au pied. On allait le monter du doigt dans toutes les rues pour dire qu'il était le beau frère d'un riche homme. Il ne put s'empêcher d'esquisser un sourire béat aux lèvres qu'il effaça rapidement.
Il ne devrait pas s'emballer, il ignorait encore la décision de son aîné. Il souhaitait de tout son cœur qu'il accepte la cola de son futur gendre.

Sous la grosse marmite contenant de la bouillie de mil, craquait les brindilles de bois.
Les flammes du feu dansaient dans les pupilles de niaman. Elle paraissait soucieuse et pensive.
Les événements de ces derniers jours l'avaient chamboulé. Désormais elle se levait chaque matin la boule au ventre. Elle savait que c'était juste une question de jour avant que son secret n'éclate au grand jour.
Comment allait on la qualifier ? De fille aux mœurs légères ? De fille sans dignité ?
Elle l'ignorait mais elle savait qu'elle serait le sujet de discussion sur les routes du marché, elle savait qu'on allait la pointer du doigt au bord de la rivière, elle savait qu'on allait la larguer chaque fois qu'elle voudrait donner son avis, elle savait qu'on se gênerait pas de lui lancer à la figure qu'on l'avait pas trouvé comme il se devait, elle savait que sa mère serait déçu d'elle, elle savait qu'elle serait une honte pour sa famille, elle le savait et ce qu'elle savait par dessus tout c'est que personne ne chercherait à connaître dans quelle condition elle avait perdu sa virginité.
Elle passa la journée vide de tout sentiment.
La nuit, le frère aîné de Bacar vint lui faire un compte rendu.

-Bacar j'ai fait des enquêtes sur l'homme qui veut épouser ta fille. Il est pratiquant, ce qui est le plus important en plus c'est un homme intègre et travailleur. Il a deux femmes. Ta fille sera la troisième femme. Ils ont apporté la cola. Informe tes femmes de décider d'un jour. Informe ta fille aussi qu'elle a désormais un mari et qu'elle doit savoir se comporter dans les rues.
-Merci mon frère. Tu sais elle est avant tout ta fille avant d'être la mienne. Si son futur époux est quelqu'un de bien, je ne dois qu'en être heureux.
-Soit, que cela soit ainsi. Je vais rentrer il commence à faire tard.
-Passe la nuit ici, tu sais que tu es chez toi.
-Je sais mon frère mais je dois régler des affaires demain à la première heure.
-Ah d'accord.

Bacar raccompagna son frère à quelques mètres de la maison avant de retourner chez lui.
Il s'installa sur son krata et fit appel à ses femmes.
Elles arrivèrent immédiatement et s'installèrent.

-Comme vous l'avez remarqué il y a quelque jour le griot est venu demander la main de votre fille. Je les ai envoyé chez mon frère car je n'avais pas mon mot à dire. Il a accepté la cola. L'heureux élu se nomme Souleymane, c'est un éleveur. Il habite à quelques kilomètres de nous. Allez voir votre fille et conseillez la. Qu'elle nous fasse pas honte et qu'elle se comporte convenablement dans sa nouvelle famille. Je veux pas entendre des histoires. Nagnouma tu sais ce qui s'est passé avec ta fille, qui Dieu sait si elle est encore en vie ou morte. Expliquez lui l'importance du mariage, sa place dans notre société. Si votre fille échoue dans son ménage c'est ce que vous n'avez pas joué votre rôle de mère. C'est ce que j'avais à vous dire. Termina Bacar.
-Mais ladji de quelle fille tu parles ?
-Je parle de niéléni.

Maïmouna fut déçu que ça ne soit pas du mariage de sa fille dont on parlait. Elle ne comprenait pas comment ça se faisait que niéléni se marit avant sa fille. Alors qu'elle trouvait sa fille plus belle, plus propre et plus charmante que niéléni.
Déçue, elle regagna sa case éclairée par une lampe à pétrole.
Niaman était assise sur la natte, plongée encore dans ses pensées les plus sombres. Elle avait pris la décision de tout déballer à sa mère cette nuit avant qu'elle ne l'apprenne autrement. Elle ruminait dans sa tête mille et une façon de tout dire. Elle savait pas comment commencer surtout qu'il n y a jamais eu de discussion entre sa mère et elle sur la sexualité. A son âge elle n'avait pas le droit de parler de ces genres de choses. Quand les adultes en parlaient, elle s'éloignait d'eux pour ne pas qu'on la traite de fille effrontée et mal élevée.
Elle souffla pour la énième fois et fixa sa mère. Comment lui dire ? Comment va t elle le prendre ? Me croira t elle ? Ces ci étaient les questions qui se bousculaient dans sa tête.
Elle prit son courage à deux mains et se lança.

Une Question de tradition Où les histoires vivent. Découvrez maintenant