Chapitre II (partie 1): Un si joli sourire

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Mr Keegan

-    ATCHAA ! 

Le jeune Nathanaël était malade depuis quelques temps déjà. Depuis le jour ou je me suis entretenue avec lui et sa sœur adoptive pour être précis. Lui qui est si timide, je doute qu'il supporte facilement les regards agacés de ses camarades lorsqu'un quinte de toux le prend. Le jour suivant ma demande. Ambre et le cadet Hamilton sont tout deux venus tout deux me voir à la pause, la petite avait des cernes creusés et le teint plus pâle qu'a l'habitude, quand au blondinet il était déjà reniflant. C'était elle qui m'avais adressé la parole, sans que je ne lui ai demandé, ce qui est plutôt rare a vrai dire. Elle avait les yeux brumeux et semblait avoir bien des larmes à cacher. Enfin c'est ce que je me suis dit. On ne sais jamais vraiment bien avec elle.

-    Monsieur, je suis navrée, j'ai demandé à Joséphine et sa réponse était sans appel. Je suis une fille, je m'y attendais.

L'instant d'après, elle partit sans que je n'eu le temps de dire quoi que ce soit. Quand à Nathanaël, je pouvais lire dans ses yeux qu'il était perturbé. Il me regarda, puis la regarda partir, sans savoir ou donner de la tête, il me lança brièvement un petit, tout petit « je suis désolé » avant de se précipiter vers la sortie de la pièce et de laisser l'enseignant sans ambitions que j'étais seul devant les pupitres vides de sa salle de classe trop calme.

Debout, une main sur mon bureaux, je vis le tas de copies des dissertations que je venais de corriger et je vis « Ambre Leward, secondaire, quatrième année, 98/100 ». A cet instant, je le savais, je devais faire quelque chose pour cette enfant.

                                                                                                                                                             *

C'était un dimanche pluvieux, novembre résonnait dans toute sa splendeur faisant tourbillonner ses victimes tachetés de rouge, de fauve et d'ocre. L'averse tambourinait aux fenêtres de l'église et semblait vouloir s'introduire telle une furie. Je m'ennuyais désespérément. Même les adultes s'ennuient, et forcé d'avouer que si l'on m'avait dit ça quelques dizaines d'années plus tôt je n'y aurait pas cru. L'office avait lieu le matin, et je m'y rendais chaque semaines. Il faut dire que tout ces braves gens étaient habitués à leurs coutumes et bien que je n'ai jamais réellement cru en l'existence d'une quelconque force supérieure je m'y rendait chaque semaines sans faire de vagues. J'appréciais les salutations, les enfants turbulents dans leurs habits du dimanche bien trop propres, les rires. Je trouvais fascinant que l'on puisse, et sans même en faire la demande, rassembler tant d'être, d'âmes et de vies autour d'un même parole qui, qu'on le veuille ou non, rentrait par une oreille pour en sortir par l'autre l'instant d'après. Par dessus tout, j'aimais ce bâtiment tellement austère quand venait la pluie et pourtant si chaleureux sous la lumière, je pouvais y rencontrer les familles, les individus, ne plus être le professeur, juste un Homme permis les autres.

Seulement, cette semaines là, ni les Hamilton, ni la jeune Leward n'étaient présents à l'appel, eux qui étaient pourtant - ou du moins en apparences- de fervents croyants.

Il y a des moments dans la vie ou l'on fait des chose qui ne nous ressemblent pas simplement parce qu'elles nous paraissent plus justes. C'était un de ces moments. Je ne sais pas ce qui avait bien pu me passer par l'esprit ce jour là, mais je marchais, d'un pas déterminé vers la maison des Hamilton sans trop réussir à contrôler mes jambes qui avançaient sans tenir compte de la raison. Si jamais je n'avait été de ceux qui se mêlaient de la vie des autres, je l'étais devenu à ce moment précis. Les bruits de craquèlement que provoquaient mes pas sur le gravier me faisaient me rendre compte chaque secondes un peu plus de la folie que j'étais en train d'accomplir. La pluie, qui tombait a flot s'abattait sur mon corps, me fouettant, un peu plus à chaque enjambés. Mon corps était inondé et mes chaussures étaient devenues deux petites mares boueuses. Les gouttelettes sur mes lunettes m'empêchaient de voir précisément ou je mettais les pieds. Tout me retenais. Mais rien ne pouvais retenir ma fougue insolente. J'étais redevenu un jeune homme, un adolescent. Et pire encore, cela ne me dérangeait pas, j'aimais ressentir cette excitation, je me sentais presque - si le mot n'est pas trop fort- renaître.

L'absenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant