Chapitre X (partie 2): Mettre un pied devant l'autre dans l'obscurité

4 3 0
                                    

Henry

Je pouvais entendre le rire de ma sœur transpercer les murs de pierre de notre maison. Elle avait toujours eu ce rire là, un rire bien moins prétentieux que ce que l'on aurait pu croire ; un rire vrai, sans prétentions. Un rire que ne convient pas aux salons.

Moi, je n'était pas le bienvenue parmi eux. Ils ne me le feraient pas remarquer, bien sur. Mais dès que je suis là, avec eux, sur les divans, l'atmosphère se teintait de gêne et jamais Victoire ne riait. Après tout, je lui avais volé, des années durant, la patience et l'affection de mes parents et ce n'était pour elle que vengeance.

Aucun des précepteurs que je n'avais eu étant enfant n'avait réussit à dompter mes songes et la seule capable d'apaiser mes cris ou mes pleures était ma mère avec son visage doux et ses mains réconfortantes. Ce fus autant d'attention qu'elle ne donna pas à son mari, en dormant avec moi pour m'apaiser, et à sa fille, puisqu'elle n'avait plus le temps pour les poupée. Je crois, si je peux me permettre, que c'est ce manque qui avait rend froid les yeux de mon père, qui avait froncé les sourcils de ma sœur.

En réalité, depuis longtemps, tout était de ma faute, et je ne le savais que trop bien.

Pourtant, je ne voyais toujours que la vérité. Et malgré tout, je ne me sentais jamais aussi vivant que lorsque j'étais ailleurs. Et Dieu sais que j'étais souvent ailleurs.

Ma mère était la seule qui n'en était pas dérangée. Elle voyait en moi quelqu'un de spécial. Et puis un jour, je l'ai frappé. Je n'ai jamais vraiment su pourquoi, peut être que c'était moi que je voulais frapper pour lui avoir ainsi volé son temps. Mais le fait est que c'est sur elle que j'ai porté mon coups.

Je voulais qu'elle s'éloigne de moi, je voulais lui rendre sa liberté. Et je l'ai fait. Elle s'est éloignée de moi, je lui ai rendu sa liberté. J'ai eu beau pleurer toutes les larmes de mon corps que ça n'aurait rien changé. Le mal était fait. J'étais le mal.

Croyez moi, la bonne société est la pire chose qui ne me soit jamais arrivé. Les chuchotements m'ont rendu complètement fou, et le trop plein d'alcool m'a fait me montrer en spectacle plus d'une fois. Je ne sais pas pourquoi toute cette violence existe en moi.

Soudain, quelqu'un toqua à ma porte, me sortant de mes pensés. Plus personne ne riait en bas.

- Henry, s'écrie la voix de ma sœur, j'entre !

Ce n'était pas comme si je l'en avait priée. Victoire avait cette fâcheuse habitude de toujours prendre les choses pour acquise là ou il n'y avait pas d'acquis. Sans que je ne fasse vraiment attention à elle, continuant d'écrire accroché à mon bureau, elle vint s'assoir sur l'un des fauteuils derrière moi. Elle ne disait rien, et je ne disais rien non plus. J'aurais rapidement oublié sa présence si elle n'avait pas finit par s'exclamer :

- Ambre Leward est revenue en classe aujourd'hui. Mais tu n'étais pas là bien sur.

Brusquement, je me retrouvais vers la jeune fille, interloqué.

- Eh ! Ne me regarde pas comme ça ! Je dis la vérité c'est tout !

- Que lui as-tu fait encore ? Répondis-je, le timbre étonnamment posé.

- Encore ? Mais pour qui me prend tu, continu a-t-elle, les yeux mi-clos, Ambre est mon amie.

Un sourire se dessina sur ses lèvres. Elle mentais, évidemment ; elle s'était toujours montré odieuse avec Ambre. Et je n'ose même pas imaginer ce que ce fut les jours où je n'étais pas là pour le voir.

- Alors d'après toi, on piège ses amis, on les humilie publiquement, on leur dit qu'ils ne méritent pas de vivre ?

Elle se mit à rire, mais pas du même rire que tout à l'heure ; un rire bien plus sournois, bien plus mesquin.

- C'est elle qui est venue se plaindre à toi n'est ce pas ? Ce qu'elle peut être faible...

- Non. Elle n'aurait jamais fait cela ! Criais-je en me levant de mon siège. J'ai mes sources, c'est tout.

Recoiffant ses cheveux blonds d'un geste de main las, elle ajoute :

- Je venais juste te dire qu'elle semblait perdue sans toi.

Sa voix était calme, comme un souffle. Elle baissa les yeux. Elle regrettait quelque chose, je pouvais en être sûr. Je connaissais ma sœur mieux que quiconque, pour le meilleur et pour le pire.

- Je réitère ma question Victoire, que lui as-tu fait ?!

- Tu ne te mettrais jamais dans un tel état pour ta sœur, cette paysanne t'es montée à la tête, dit-elle en se redressant, comme pour se positionner au même niveau que moi.

Dangereusement, je m'approchais d'elle. Pourtant cette fois, le monde n'était pas flou, cette fois ma colère était réelle. Nos visages n'étaient plus qu'a quelques centimètres quand je me mis à hurler :

- Tu es rongée par la jalousie Victoire ! Tu n'es qu'une garce qui se complait dans le malheur des autres ! Et cette paysanne comme tu l'appelles est bien plus riche que toi, et pas seulement de biens.

Mes mots étaient secs, tranchants, mais ne lui ôtent pas son sourire impertinent des lèvres et ma rage devint incontrôlable. De ma main, j'agrippai son cou fin, serrant du plus fort que je pouvais.

- Cette fille est bien meilleure que toi ! Contrais-je d'hurler, en secouant le corps de ma sœur dont s'échappaient des millions de cris. Tu sais qu'elle t'as protégé, tu le sais n'est ce pas ?! Qu'elle a renoncé à te dénoncer par clémence d'esprit ?! OSES ME DIRE QUE TU NE LE SAIS PAS !!

Soudain, la porte de ma chambre s'ouvre, et mon père se précipite sur moi pour me détacher de ma sœur avant de me gifler de son épaisse main froide et robuste.

- Mais enfin mon fils ! Si j'ose encore vous appeler comme ça, vous ne cesserez dont jamais de faire du mal à ceux qui vous aiment ?!

Je ne répondais rien. Victoire sanglotait dans les bras de ma mère, toussant ça et là avant de s'écrier, la voix languissante :

- Henry, j'ai besoin de vous, j'ai besoin de mon frère, vous n'êtes pas ce monstre que vous prétendez être je suis votre sœur, je vous connais mieux que quiconque.

La porte se referme derrière moi, ma joue est encore chaude. Est-ce donc mon destin, de blesser tout ce que je touche ?

L'absenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant