Chapitre XI (part. 1): Les débuts sont souvent déguisés en de douloureuses fins*

11 3 0
                                    

Henry

C'était déjà l'été, la fin de la classe, le temps du repos. Avant toutes choses, et pour terminer dignement l'année, nous avions prévus un pique nique dans l'un des parcs de la ville.

Les garçons avaient revêtis leurs costumes en lin et les filles leurs robes légères. Sauf Ambre, qui ne laissait absolument rien paraître, pas même un tout petit, minuscule, microscopique bout de peau. Que son visage, ses cheveux lâches et ses mains gantés.

- Avez-vous déjà fait un pique nique à la campagne ? M'interrogea-t-elle alors que nous étions assis côte à côte sur un immense draps posé au sol.

Cette question était sortie naturellement, et ne pas pour dire vrai même pas surpris.

- Nous avions une résidence au nord dans la lande, à côté d'un lac immense quand j'étais enfant, dis-je en m'allongeant pour regarder les nuages. Nous y allions chaques étés, vous auriez du voir comme l'eau scintillait sous les reflets du soleil. Alors, oui j'ai déjà déjeuné dans l'herbe, loin de la ville, et il n'y a pas meilleure sensation. Cette maison, ces lieux m'apaisaient le plus souvent. Mais un jour, mon père l'a vendue, j'en ai pleuré toute une semaine, vous savez.

Elle avait eut la délicatesse de ne pas me reparler, ni de mon baiser, ni de la lettre. À tel point que mon esprit se demandait parfois s'ils furent réels. Mais de tels sentiments ne peuvent pas s'imaginer, ils ne peuvent que se ressentir.

- Dans une autre vie, si je n'avais pas été Ambre Leward, et si vous n'aviez pas été Henry Spencer, si nous n'avions pas été les jeunes gens que nous sommes, je vous aurais emmené chez moi. Je pique niquais souvent avec Nathanaël quand j'étais enfant.

- N'est-ce pas ici chez vous ? M'exclamais-je, et puis qui est ce Nathanaël dont vous parlez ? Je sais si peu de vous, de votre vie.

Elle se mit à rire, comme pour éviter de répondre à mes questions, mais elle était bien loin de se moquer. Elle m'aurait parue presque épanouis, si sa voix n'était pas si mélancolique lorsqu'elle parlait de sa vie d'avant.

- Nous avons un point commun réel, Ambre, dis-je en me redressant légèrement sur mon bras.

Elle pancha légèrement la tête, intriguée, comme pour me demander de continuer.

- Nous avons tout deux un lieux chéris, et qui nous manque. Une vie passée que l'on regrette, comme si l'herbe était plus verte, comme si la lumière était plus brillante dans un passé trop lointain pour être réel. Vous savez, je me demande souvent si le passé est réel, en soit, rien ne nous prouves que nous avons vécus ce que nous avons vécus, le présent lui, est plus stable, il est certain, il est concret.

- J'entend encore les cloches de l'église de mon village sonner, dit-elle en s'allongeant à son tour, les yeux fermés.

Elle aussi, entendait les choses qui ne sont plus. J'aimais appeler ça faille spacio-sensorielle, mais cela sonnait trop futuriste pour oser le dire à voix haute. Le vent encore légé me caressait le visage, chamboulait l'ordre capillaire qui régnait sur mon crâne, cela aurait été agréable si le paysage avait été calme

- M'écrirez vous pendant l'été ?

Je pris son absence de réponse comme un oui, car rien que de penser qu'elle puisse aligner des mots sur une feuille en pensant à ma personne me faisait frémir.

- Dites moi, je peux vous poser une question disons... Personnelle ?

- Vous pouvez toujours essayer, répondit-elle en se relevant sur ses genoux.

- Pourquoi avez-vous décidés d'épouser Francis Leward ?

Dans un premier temps, j'ai cru que ma question était vaine. Son regard se jetait au loin et sa bouche demeurait close. Son teint s'était ternis,  mais elle restait magnifique, au milieu la foule, au milieu de toutes ces chemises, de tout ces jupons. Je ne voyais qu'elle. Sûrement parce qu'en réalité, il n'y avait qu'elle.

Au bout de quelques secondes, minutes, heures, en pris une grande inspiration et dit :

- L'amour n'existe pas.

Ce n'était pas la réponse que j'attendais, mais c'était là le mieux. N'importe quelle bonne raison m'aurait mis en colère de toutes façons. Quelque chose avait déclenché en elle une marée intérieur qui détruisait tout sur son passage, et j'étais incapable de savoir de quoi il s'agissait. J'étais incapable de faire cesser l'orage, mais je pouvais au moin assécher la rivière.

Si l'amour n'existe pas, la solitude, elle est bien réelle, et nos corps s'y heurtaient sans cesse. Victoire était seule dans sa jalousie, j'étais seul dans ma folie et Ambre était seule dans son silence. Personne n'était à blâmer plus qu'un autre.

Ma faim était insatiable, je voulais toujours, monter plus haut, courir plus vite, naviguer plus loin. Mes sentiments étaient contradictoires, se mêlaient, s'emmêlaient. J'étais incapable de déceler le vrai, du faux, le bon, du mauvais. Une chose était sure pourtant, je voulais tout ce qui pouvait exister de meilleur pour Ambre. Et si je n'étais pas tout ce qui pouvais exister de meilleur pour elle, alors je ne serais rien. C'était là la règle que je m'étais fixé.

- Vous ne mangez pas ? M'exclamais-je subitement, comme si cette pensée m'avait soudainement traversé l'esprit.

- J'ai beaucoup mangé se matin, j'ai peu d'appétit au déjeuner, chuchota-t-elle comme si elle eut été honteuse.

Le diable aurait parié qu'elle savait si bien mentir. Mais même les plus beau mensonges étaient détectable par mon odorat de menteur né.

- Ma sœur fait comme vous, vous savez, seulement elle, se goinfre de sucreries en cachette. Mais les apparence vous importent peu n'est ce pas, dans ce cas, pourquoi ?

Bien sur ma question suspendu le silence au dessus de nos têtes bien remplies, mais je m'y attendais.

- Je n'attendais pas de réponse. À vrai dire, je suis sur que vous-même ne les avez pas. Mais ça me rend un peu triste parfois, de voir la réalité en face. Je veux dire, c'est donc ça la nature humaine, être malheureux ?  J'ai tendance à trop philosopher et mon père me le reproche souvent, mais philosopher pour les autre c'est moins orgueilleux non ?

Petit à petit, le reste de la classe autour de nous s'éloignait. Parsemant, par moment des « bonnes vacances lister spencer ! » ou des « reposes toi bien champion ! » suivi d'un clin d'œil salace. Mon côté snob et hautain disait que ces gens là n'avaient que de l'eau dans la tête, le moi d'il y a un an aurait sûrement ris. J'ai tellement changé depuis que j'ai rencontré Ambre. Qui aurait cru que le silence avait le don de faire grandir les gens ?

- Ne les écoutez pas s'il vous plait, finis-je par renchérir, ce sont des animaux ! Il se fait tard, je vous raccompagne ?

Elle hocha la tête, et déjà je voyais cette journée magnifique se dissiper derrière nous. Une fois arrivés devant chez elle, elle me sourit avant de dire :

- Merci Henry, je vous écrirais, si vous voulez bien de mon amitié.

- Je voudrais toujours de votre amitié, Ambre, soyez en certaine, répondis-je alors qu'elle s'éloignait.

Je me suis retourné pour qu'elle ne puisse pas voir mes joues rouges et mon sourire niais avant d'enterrer définitivement cette journée de bonheur pur.

L'absenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant