bombe.

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Mars 2034.

La dernière chose que j'ai envie de faire, c'est de rentrer chez moi. Pourtant, je n'ai pas eu le cœur de dire non à Hugo quand il m'a proposé de sortir de la forêt. Je suis certain qu'il serait resté avec moi si je l'avais fait et nous aurions poursuivi notre conversation, mais cela aurait été égoïste de ma part. Il veut sûrement retrouver sa famille et son géant de petit-ami. Puis de toute manière, il faut bien que moi aussi je retourne chez moi. J'avais déjà séché le travail ce soir alors si je ne suis pas à la maison quand mes parents vont rentrer du restaurant, ça n'allait pas le faire.

Pendant de longues secondes, mes yeux fixent sans vraiment les voir les étoiles que la nuit tombée nous offre. Depuis que nous sommes arrivés en Angleterre, je me pose beaucoup de questions sur ce qu'il y a après la mort. Un camarade de classe à Londres m'avait raconté que les défunts rejoignaient les cieux et que chacun des astres était l'un d'eux. Cela me renvoyait à l'affirmation de ma mère disant que grand-mère prendrait soin de nous. Malheureusement, vu mon quotidien, j'ai bien peur que l'espoir de Dae pour qu'elle ne le fasse pas ait avorté depuis longtemps.

Alors que nous arrivons dans ma rue, Hugo serre presque imperceptiblement ma main qu'il n'a pas lâchée. Même s'il me suit juste pour retrouver Dae, je suis content qu'il soit encore à mes côtés parce que je ne suis pas prêt à revenir à la réalité, à ma vie. Il est le seul à connaître ce côté sombre de moi-même que je déteste et savoir qu'il l'accepte et ne la juge pas me réconforte.

— Je serais bien resté sur le talus en fait, dit-il en ralentissant.

— Et moi donc !

Mon regard balaie la façade de la maison de mes parents et dans un excès de courage, je récupère mes clés et prie pour éviter de croiser mon frère. Malheureusement, alors que nous sommes au bout de l'allée, la porte d'entrée s'ouvre avec tellement de force que j'ai l'impression pendant un moment qu'elle est sortie de ses gonds et tombée par terre. Mais, par je ne sais quel miracle, elle est toujours là, contre le mur et me laisse apercevoir un Elliott fou de rage.

Dans un autre contexte, cela m'aurait peut-être fait plaisir et même rire. Hugo s'arrête sans que je m'en rende compte, mais sa main dans la mienne me tire en arrière et je l'imite aussitôt.

— Ça va, je ne vous gêne pas trop, j'espère, grogne le géant.

Mes yeux passent à plusieurs reprises entre Hugo et Elliott qui se foudroient du regard. Ça me fait un pincement au cœur et ça m'embête pour Jeff. Il est indéniable qu'ils s'aiment bien plus que je ne pourrais jamais le comprendre ou même le concevoir. Cependant, à cet instant, ils vont se disputer et je n'ai rien à faire entre eux. Je tapote l'épaule de Hugo.

— Bon courage, lui chuchoté-je.

A contrecœur, je lui lâche la main et me dirige vers la maison sans un regard pour Elliott. Je referme la porte derrière moi, mon dos rencontrant la planche de bois. Ma tête bascule en arrière, les yeux fermés, et souffle un coup pour tenter de soulager toute ma colère et ma peine. Je me frotte les cheveux en grognant.

— Tu joues à quoi, Kwang Sun ?

Mes yeux s'ouvrent tandis que je sursaute, surpris par la voix de mon frère. Son épaule appuyée sur le chambranle qui mène au salon, il a les bras croisés devant lui et me regarde comme si j'étais le diable en personne. Il me parait soudain plus vieux et sérieux que d'habitude. Je me décolle de la porte, en enfonçant les mains dans les poches de mon manteau. Je tente de lui faire croire que je suis détendu alors que je bous de l'intérieur.

— Aucune idée, commencé-je en haussant les épaules, faussement désinvolte. Une partie de Uno ou une...

— Tu sais très bien que je ne parle pas de ça.

someone like you. - idy 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant