someone like you. - idy 3

talus.

Mars 2034.

Mon cœur tambourine dans sa cage. Mes parents n'ont toujours pas dit le moindre le mot, mais je sais déjà ce qui m'attend. Je l'ai compris dès que Dae Hyun nous a balancé qu'il avait rompu avec Ady. Le temps que l'information atteigne mes neurones et c'en était fini. Ma vie basculait... Alors cette discussion qu'ils veulent avoir avec moi aujourd'hui n'est qu'une confirmation. Un détail. Un couteau qu'ils se font un plaisir de replanter dans ma blessure.

— Kwang Sun, tu es l'aîné, commence mon père en coréen, les doigts liés devant lui sur une des tables du restaurant. Après ce qui est arrivé à l'entreprise familiale...

Ma mère pose une main réconfortante sur celle de son mari. Parler de cet épisode de notre vie est toujours une torture pour lui. Une honte.

— Nous t'avons donné un rôle plus important que...

— Je sais, le coupé-je.

Je ne désire pas entendre à nouveau tout ce qu'ils attendent de moi. La pression sur mes épaules est déjà considérable comme ça.

— Dae-Dae a...

Il suffit de ce surnom pour apporter une preuve de différence entre mon frère et moi. Pour nos parents, je suis Kwang Sun et lui, Dae-Dae. En fait, je me demande si ce n'est pas ça qui me brise le plus...

Je n'écoute pas la suite. Déjà, mon esprit semble ailleurs. Et puis cela ne servirait à rien. Ils veulent que j'accompagne mon frère à Londres, pour m'occuper de lui, prendre soin de lui, lui faciliter la vie. Je le ferai. Je n'ai pas besoin de réfléchir à ça parce que je me connais. J'ai été élevé ainsi.

— J'irai avec lui, déclaré-je.

Les poings serrés, je me lève, au bord des larmes. Je déglutis. Mon regard passe de mon père qui a cessé de parler, à ma mère à ses côtés. Ils sont tous les deux confus. Je les aime et les respecte, mais à cet instant, je ne peux plus rester dans la même pièce qu'eux. Ils me font trop mal, m'en demandent trop. Je tourne les talons et m'enfuis d'ici.

Je cours pour arriver au plus vite à mon refuge et pouvoir pleurer tout mon saoul. Si j'ai croisé des voisins, cela ne m'a pas marqué. Je grimpe le talus et crie à m'en faire exploser les poumons. Mes larmes dévalent à toute allure mes joues. Je retire mes lunettes et essuie grossièrement mon visage avec mes poings, mais cela ne sert à rien. Elles sont trop nombreuses et reviennent sans interruption.

Je ne devrais pas me mettre dans un tel état. Cela n'a rien d'étonnant, je m'y attendais. Pourtant... J'avais encore un infime espoir qu'ils voient enfin mon frère comme n'importe quel jeune homme de dix-huit ans et le laissent vivre sans escorte.

Je hurle à nouveau et balance mes lunettes qui atterrissent contre un arbre. Mon corps lâche et tombe au sol. Mon cœur s'est arrêté à son tour. Il a compris. Ma vie vient de voler en éclats.

Je suis comme un animal blessé, pris au piège.

Une demi-heure plus tard, je suis calme. Comme toujours. Craquer et crier comme je l'ai fait ne sont pas dans mes habitudes. Je réagis rarement ainsi, je déteste ça, ce n'est pas dans mon éducation de toute manière. Mes parents m'ont toujours appris qu'il fallait garder ses émotions pour soi. Le monde n'a pas besoin de savoir comment je me sens à chaque seconde, parce qu'il va déjà trop mal.

Seul Dae dans la famille se permet des excentricités comme pleurer ou crier devant des gens. Il a cette capacité à tout extérioriser qui m'impressionne. Et m'énerve tellement. Mais surtout, il a cette liberté que mes parents lui laissent et que je lui envie.

Je ferme les yeux et prends une profonde inspiration, fatigué de ressasser constamment la même chose. Éreinté de faire encore la liste de nos différences. Épuisé d'être aussi jaloux de mon petit frère... J'ai vingt-deux ans et je passe ma vie à détester Dae pour des trucs dont, pour la plupart, il n'est pas responsable. Je devrais être plus mature, plus digne, plus altruiste...