someone like you. - idy 3

rupture.

Mai 2034.

Je m'essuie les mains tout en m'observant dans le miroir qui domine les lavabos. Je parais fatigué, presque épuisé. D'ailleurs, un bâillement me prend par surprise, mais je ne fais pas de geste pour le camoufler. Je jette le papier à usage unique dans la poubelle et me frotte vigoureusement le visage pour me réveiller parce que le restaurant a beau être fermé, je dois encore tout ranger et nettoyer. Je quitte les toilettes et retourne dans les cuisines où ma mère est déjà en train de faire la plonge, les deux mains dans l'eau jusqu'aux coudes.

— Excuse-moi, Eomma.

Elle ne me répond rien, mais me fait signe que ce n'est rien. J'entreprends de laver tous mes plans de travail avec application. Naturellement, je commence à siffler l'air de la chanson qui sort de la vieille radio que nous avons toujours pendant le service.

— Kwang Sun ? m'interpelle ma mère alors que je suis en train de rincer la lingette microfibre.

Je me contente d'une onomatopée pour lui indiquer que je l'écoute. Elle me dit alors, en coréen :

— Tu sais que Dae-Dae...

Je grince des dents à ce surnom.

— A son audition dans dix jours.

Un nouveau son de ma part, ne saisissant pas où nous mène tout ça.

— Il doit aller à Londres.

Je balance ma lavette parce que, ça y est, ça fait tilt en moi. Je prends appui sur l'évier et attends la sentence.

— Il faudrait que tu l'accompagnes.

Comme je m'en doutais. Je soupire, désabusé.

— Il est au courant ?

— Nous lui dirons demain. Nous voulions en discuter avec toi avant.

Je ne peux retenir le rire jaune qui passe la barrière de mes lèvres. Je me redresse pour tenter de me reprendre.

— Je vais m'en occuper, tu devrais rentrer, lui proposé-je.

Je me mets à ses côtés et relève les manches de ma blouse.

— Tu es sûr ?

Je hoche la tête tandis qu'elle me regarde. Un sourire parfait ma proposition à laquelle elle ne peut pas résister étant elle-même fatiguée de notre service.

— D'accord, je vais juste finir la salle et je partirai, m'explique-t-elle.

Sur la pointe des pieds, elle vient déposer un baiser sur ma joue et me remercie. Elle attrape le torchon qui pend à son tablier et retire toute l'eau de ses avant-bras. Je prends alors sa place et commence à récurer une poêle. Ses pas résonnent sur le carrelage m'indiquant qu'elle s'éloigne de moi.

— Ça ira pour toi ? me demande-t-elle tout de même.

Je tourne le haut de mon corps vers elle. De là-bas, je vois les ressemblances entre elle et Dae. Ce petit corps frêle qui donne l'impression qu'ils vont se casser en deux si le vent souffle trop, mais qui en fait, est plus résistant et puissant que les autres. La forme de leurs yeux. Mais surtout cette capacité à me donner envie de les protéger tous les deux quoi qu'il se passe.

— Bien sûr. File maintenant !

— Fais attention en rentrant à la maison, d'accord ?

— Oui, Eomma.

Elle m'adresse un sourire, rassuré par mes mots donc j'évite de préciser que je ne pourrais rien faire si un sociopathe me kidnappe et me torture ou qu'une voiture me renverse. Sereine, elle part dans la salle pour refaire les tables pour le lendemain. À peine quelques minutes plus tard, la sonnette de la porte du restaurant m'annonce qu'elle vient d'être ouverte et alors que je pensais que c'était ma mère qui quittait les lieux, la voix d'Adele s'élève :