passion.

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24 Octobre 2034.

Ma tête bascule en arrière, m'arrachant une grimace quand une douleur me transperce au niveau des cervicales. Les yeux fermés, j'ai la désagréable sensation que la pièce autour de moi bouge un peu trop vite. La nuit dernière n'a pas été la meilleure que j'ai vécue. Le chat a cru bon de faire une insomnie et de me le faire savoir en venant miauler devant la porte de ma chambre après que je l'en ai viré vu qu'il me mordillait les doigts.

Mais surtout cette nuit quasi blanche m'a permis de réfléchir un peu trop à ce qui va normalement se passer dans moins de dix minutes. Ou plus vraisemblablement quand j'aurais trouvé le courage de sortir des vestiaires du boulot. Ce n'est pas grand-chose. Juste un déjeuner entre amis. Cependant, j'ai peur. Même s'il m'a promis de venir, je ne peux m'empêcher d'angoisser à l'idée qu'il me pose un lapin.

Pendant la semaine qui s'est écoulée, j'ai pris pleinement conscience qu'Ezra et ce déjeuner étaient les seuls éléments positifs de mon quotidien. Encore plus quand Dae m'a appris qu'il allait passer le dimanche avec un copain de sa promo ce qui m'a privé de la joie de le voir danser en cuisinant. La solitude m'a frappé avec une telle force cette après-midi-là que j'ai pleuré pendant un moment. Même Pancake a eu pitié de moi et il est venu se blottir dans mes bras.

Je crois que je n'ai jamais autant eu besoin de quelqu'un dans toute ma vie qu'aujourd'hui avec Ezra. J'ai eu, comme tout le monde, des hauts et des bas tout au long des années, mais je m'en sortais toujours avec mon frère à mes côtés. Pas parce qu'il me remontait le moral, mais parce qu'avec lui, j'avais un but. Donner le change pour ne pas l'inquiéter, le soutenir, le rendre heureux, le protéger, mais à présent, je n'ai plus ça...

Cependant, Blue, comme je me suis amusé à le surnommer, a pris une place trop importante, trop vite. Il n'est qu'un jeune homme rencontré dans une ruelle sombre, une nuit de nouvelle lune, il y a de ça quinze petits jours. Et pourtant, je sens que s'il n'est pas dans la salle de restaurant, je ne vais pas être bien.

C'est pour cela que je reste enfermé dans les vestiaires depuis trop de temps. Quand les vertiges commencent à me donner la nausée, j'ouvre les yeux et fixe un point devant moi. Il faut que je bouge, que je sache si Ezra est quelqu'un en qui je peux avoir confiance. Je respire à fond et me mets un coup de pied virtuel aux fesses. Je me passe une main dans les cheveux avant d'attraper ma veste et mon sac.

Dans un éclair de courage insoupçonné, je marche avec détermination jusqu'à la porte qui mène à la salle. Une énième inspiration pour calmer mon rythme cardiaque et je me jette la tête la première, ne pouvant plus faire demi-tour, surtout s'il m'attend. Je pousse le battant et mes yeux scannent à toute vitesse la pièce. Ils ne mettent pas longtemps pour le repérer à la même table que la semaine dernière.

Assis sur le bord de sa chaise, les mains sous ses cuisses, il est toujours le même dans son entièreté et ça me fait du bien. La seule différence est que, contrairement aux fois précédentes, le hoodie qu'il porte est bleu et paraît tout neuf. Mais surtout il n'a pas mis sa capuche.

Plus je m'approche de lui et plus je me rends compte du bonheur qui m'envahit à le voir ainsi. Il explose complètement quand je me retrouve debout en face de lui et qu'il lève les yeux vers moi. Il sourit et il me semble aussi soulagé que moi. Je prends le temps de me rassasier de son visage avant de m'installer.

Je remarque alors qu'il y a déjà des plats sur la table. Un peu moins qu'au dernier repas, mais bien assez pour nous deux. La plupart sont les mêmes que j'avais commandés moi-même. Pour une raison stupide, j'aime le fait qu'il ait retenu ce que j'avais choisi et préféré.

— J'ai cru que tu ne viendrais pas, murmure-t-il, les yeux posés partout sauf sur moi.

— Je suis désolé.

someone like you. - idy 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant