Chapitre 54

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Holly

Lorsque j'ouvre enfin mes yeux il est près de dix heures, je tremble encore de la veille et la moindre parcelle de mon corps m'est douloureuse, j'ignore pourquoi, comme si toute la douleur mentale ressentie jusqu'à maintenant se répercutait soudainement physiquement.
Ignorant toute la douleur me submergeant, je bondis du lit situé dans la chambre d'amis des Davis et déambule jusqu'au salon. Me postant face au salon, dos contre un mur, je ne peux m'empêcher de les observer silencieusement, déchiquetant leurs paquets cadeaux avec entrain. Le petit Henry hurle de joie tandis qu'il découvre une bande-dessinée de super-héros dans le paquet plus ou moins bien réalisé ! Toute cette joie rayonnant dans la pièce me fait un bien fou, de même qu'elle m'assène de regrets ; j'aurais peut-être dû rester à Miami, passer les fêtes avec ma famille en ignorant Kerian. J'étais tellement obnubilée par le fait de vouloir me trouver loin de lui que je n'ai pas le moins du monde réfléchi aux répercutions de mes actes. Après tout, toute cette crise aurait pu être si facilement évitée, il aurait simplement fallut que Kerian me dise la vérité, qu'il ne me mente pas encore une fois. Je suis si stupide que j'aurais pu lui pardonner cet acte, uniquement parce-que lui et moi n'étions plus ensemble bien-entendu.

- Holly, souffle la douce voix de Rebecca alors qu'elle se tourne vers moi.

- Je vais m'en aller, je ne veux pas vous déranger plus longtemps.

- Attend, gronde monsieur Davis. J'ai un cadeau pour toi.

- Un cadeau ?

Mes joues virent au cramoisi.

- En fait... je m'avance sans doute un peu, mais je pense que cela pourra te faire plaisir. Le directeur du Miami Herald, un grand ami à moi, s'apprête à prendre sa retraite. J'ai son appui pour récupérer son poste au journal.

- Félicitation !

Sur le moment, je ne vois pas vraiment le but de cette discussion.

- Je ne veux pas continuer d'élever mon fils dans une ville telle que New-York. Et puis... la chaleur de Miami manque cruellement ici !

Je glousse alors qu'il reprend :

- Si je venais à obtenir ce poste, j'aimerai que tu nous suive à Miami.

- Quoi ?

Rebecca arbore un sourire radieux tandis qu'Henry sautille littéralement de joie.

- Ecoute, je sais que Miami te manque, je suis prêt à te nommer rédactrice en chef du Miami Herald si je venais à obtenir le poste que je convoite. Etre loin de sa famille et de ses amis est une chose atroce, une chose que je ne souhaite à personne. Tu es quelqu'un de très intelligente, Holly, tes articles sont à couper le souffle et je pense qu'un poste tel que celui-ci ne te serait que bénéfique.

Intérieurement, j'explose de joie, je dois d'ailleurs me contenir pour ne pas me mettre à hurler. Je n'y crois pas, je ne peux pas croire qu'une telle opportunité s'offre à moi. Le New-York Times a toujours été un rêve pour moi, mais tout ce que j'ai laissé à Miami me manque, je ne veux plus vivre éloignée de mon frère, pas maintenant qu'il s'apprête à être père, ma famille me manque, les Duchemin me manquent. Puis d'un coup, une pensée traverse mon esprit : Rachel. Qu'est-ce que je pourrais bien faire sans elle ?

- Tu n'es pas obligée de me répondre tout de suite, je comprends qu'après... ton séjour à Miami tu puisses avoir besoin d'y réfléchir à deux fois ! Mais sache que si j'obtiens de poste, alors je souhaiterai vraiment que tu nous suive.

- Merci beaucoup, je... je vais y réfléchir mais... je suis vraiment honorée de cette proposition.

Il se met à sourire tout en avançant dans ma direction.

- Il a neigé toute la nuit et les rues sont gelées, ce serait plus prudent que tu restes ici encore aujourd'hui.

- Et nous serions ravis que tu te joignes à nous encore ce midi, nous recevons quelques membres de la famille de Ian.

- Non, je regrette, je ne peux pas. J'ai assez abusé de votre hospitalité ! Mais je serais ravie de déjeuner avec vous après les fêtes !

Monsieur Davis me prend chaleureusement dans ses bras, je peux ressentir toutes la culpabilité émanant de l'homme aux cheveux brun. Je ne sais pas encore si je dois réellement lui en vouloir d'avoir fait ce qu'il a fait pour que Kerian et moi nous retrouvions, après tout, il semble y avoir mis tant de cœur que j'ai bien du mal à le lui reprocher !
Et après qu'Henry ait accouru dans mes bras pour enfin me dire au revoir, je suis Rebecca jusqu'au pied de l'immeuble.

- Essaye de ne pas en vouloir à Ian, il ignorait toutes vos... histoires !

Elle passe délicatement sa main sur ma joue avant de fermer elle-même l'épais manteau qu'elle a eu la gentillesse de me prêter.

- Je ne lui en veux pas, je veux dire, pas vraiment. Il a essayé de faire de son mieux.

- Et pour cette histoire avec Kerian... tu ne dois pas oublier que lui et toi n'étiez plus ensemble. De la même manière que tu as trouvé ce Leo comme lot de consolation, il est retombé dans les bras de cette fille. Vous aviez tous les deux besoin de quelqu'un pour passer à autre chose, de quelqu'un pour vous persuader que vous étiez capable d'oublier l'autre. Le fait est que vous vous êtes, tous les deux, rendus compte que c'était bel et bien une chose impossible. Est-ce que tu veux donner la satisfaction à cette fille de se dire qu'elle parvient encore à faire ce qu'elle veut de votre couple ? Tu es plus forte, Holly, cesse de douter de toi, cesse de douter de vous.

Une larmes roule sur ma joue alors que j'écoute attentivement son sermon. Elle n'a peut-être pas tord. Bien qu'il n'y ai pas d'horrible histoire d'argent liée à ma relation avec Leo, je l'ai bien utilisé dans le but d'oublier Kerian. Et tout comme lui, je ne lui ai pas dit, peut-être pour les mêmes raison que lui : la peur de la réaction de l'autre. De la même manière qu'il savait pertinemment que je haïssais Luna, je savais qu'il détestait Leo. Alors peut-être sommes nous finalement dans le même bateau.
En accourant jusqu'à un taxi garé devant l'immeuble des Davis, cette idée ne me quitte pas. Et si elle avait raison ? Et si j'avais blâmé bien trop sévèrement Kerian ?

- Emmenez-moi à Chelsea, sur la vingt-et-unième s'il vous plaît.

Il rit à gorge déployée tout en faisant volte-face dans ma direction, son portable à la main.

- Vous pensez vraiment que je vais conduire avec tout ce verglas ?

Sa mauvaise haleine tout comme sa dent en or me répugnent.

- Vous pensez réellement que je vais faire ce chemin à pied avec ma valise ?

- Ton beau petit cul ne me fera pas risquer de perdre cette bagnole, chérie.

Il me dégoûte, ce type est écœurant.

- Vous me dégoûtez.

Mon grognement alors que je tiens fermement mon bagage le fait d'autant plus marrer. Une folle envie de lui en coller une se saisit de moi. Je ne suis définitivement pas d'humeur.
Sortant alors du taxi en claquant la porte assez fort pour le faire sursauter, je dois prendre sur moi pour ne pas entrer me réchauffer dans le premier café s'offrant à moi. Le chauffeur lubrique avait raison, le verglas couvre bel et bien les rues de New-York, et je dois manquer de me ramasser au moins cinq fois avant de finalement me décider à traverser. J'aurais peut-être plus de chance de l'autre côté de la route !
Et alors que je me met à traverser la route, je dois me tenir à ma valise pour ne pas chuter sur les passages cloutés. Retrouvant un peu de stabilité, je m'attelle à finir de traverser cette satanée route quand un horrible bruit de klaxon me fait faire volte-face, mais avant que je n'ai le temps de comprendre ce qu'il se passe, une affreuse douleur me saisit à l'épaule tandis que ma tête semble se cogner contre je ne sais quoi. Et puis plus rien, la fraîcheur hivernal ne semble plus le moins du monde m'atteindre alors qu'un épais voile noir semble m'absorber.

Soulmate - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant