Quand la menace sonde l'insondable

Chapitre 30 : Amertume.

-Ouvrez ! Vous n'avez pas le droit ! Ordonna-t-il en essayant de forcer la poignée en métal.

-Les paroles ne fonctionnent visiblement pas avec vous.

-Ouvrez cette putain de porte immédiatement !!!! Hurla-t-il en donnant maintenant des coups de pieds contre celle-ci.

Rogue avait déjà lancé un sort de discrétion afin de n'alarmer personne aux alentours.

-Je fais ça pour votre bien Potter.

-Ne prononcez plus jamais mon nom, espèce de DÉTRAQUÉ ! Ouvrez cette porte ou je vous jure que je casse toutes vos putains de fioles.

Rogue affichait un visage impassible malgré qu'il commençait à ressentir en son obscur intérieur une sorte de déchirure.

Ses fioles étaient également protégées par un sort. Harry tapait contre un voile invisible. Le professeur savait que son élève ne bronchait guère.

-Vous vous fatiguez. Attendez calmement ici. Je vous libérerais dans trois heures. Répéta-t-il d'une voix qui demeurait froide.

Harry se remit dorénavant à cogner contre la porte. Il entendit les pas de Rogue s'éloigner. Il se stoppa et essaya de reprendre son souffle. Le silence régnait maintenant.

Son souffle était saccadé.

-Putain de Serpentards. Ces plaies ! Putains de plaies ! Hurla-t-il d'une voix brisée. Il frappa encore contre la porte un bon moment jusqu'à n'en plus avoir la force. Il s'affala au sol et tint sa tête entre ses mains. Cela lui rappelait son enfance meurtrie. Une enfance qui se résumait à être enfermé dans ce foutu dessous d'escalier, seul et abandonné.

Il commençait à trembler.

Toutes ces horreurs vécues chez les Dursley refaisaient surface. Les mots de Draco résonnèrent dans ses oreilles. Cette humiliation. Ces rires mesquins. La phrase poignante du professeur Rogue. Sa poigne contre son épaule. Son côté gauche qui cogna contre l'étagère du fond. Cette porte qui se refermait. Cette obscurité.

Cette solitude.

Aucune larme ne coula tant il semblait perdre le contrôle. Il se releva et cogna encore contre cette porte.

Encore.

Et encore.

Il défoulait sa haine.

[...]

Rogue s'en alla d'un pas encore plus pressé que d'habitude vers le stade où le match avait débuté. Il rejoignit Dumbledore, sous l'œil suspect des amis du jeune Gryffondor, qui lui lancèrent des regards des plus méprisants.

-Que vous êtes irresponsable, vous aussi. Lui siffla l'homme lugubre.

-Je suppose que vous avez entreprit de prendre une décision drastique. Répondit le barbu en fixant le match se dérouler. Sans Harry.

-Et comment ! Vu que vous me laissez inlassablement faire le sale boulot ! Le directeur de Poudlard ne se salit jamais les mains, c'est une tradition ici. Répliqua-t-il d'un ton qui intrigua l'attention des autres professeurs. Ceux-ci se reconcentrèrent presque aussitôt sur le match qui commençait à devenir avantageux pour les Serpentards.

[...]

Si une personne, qu'elle soit élève ou professeur, traversait le couloir et passait près de la porte de la réserve du professeur de potion et directeur de la maison Serpentard Severus Rogue, aucune perturbation ne pourrait l'intriguer.

Étrangement, ce silence n'était révélateur.

[...]

-Je suis certain qu'il lui a fait quelque chose. Marmonna Ron.

-On est du même avis que toi. Répliquèrent les jumeaux d'un ton dénué de leur légendaire enthousiasme, voyant que les paris n'était en aucun cas en leur faveur. Sachant qu'Harry ne participerait guère au match, tous les élèves avaient entreprit de parier pour les Serpentard. La côte était minime, certes, mais les bookmakers demeuraient tout de même perdants.

-Le pire c'est que Gryffondor est en train de perdre !

-Ron ! On dirait presque que tu t'inquiétes pour lui car sans lui le match sera perdu ! Lui lança Hermione, transparaissant son inquiétude qui s'amplifiait de plus en plus.

[...]

-Comment osez-vous clamer quelque chose d'aussi impensable ? Lui lâcha Dumbledore d'un ton étonnamment calme en se tournant vers Rogue.

-Je ne clame rien. Je constate juste. Pensez-vous réellement que je prends du plaisir à le séquestrer de la sorte ? Se trahissa-t-il.

Il se tut instantanément, remarquant ce qu'il venait de dire. Dumbledore arqua un sourcil, subjugué par les mots de son vieil ami.

-Reposez-vous, Severus. Vous semblez... hors de votre état normal.

Rogue le fixa longuement puis s'en alla, sans prononcer mot. Foutu Gryffondor, pensa-t-il.

[...]

Harry lança maintenant des sorts contre la porte. Qui demeurait sans dégâts.

C'est à bout de souffle qu'il s'effondra au sol, l'impuissance s'ajoutant au dégoût.

Il n'eut même pas la force ni la volonté de prononcer un Lumos afin de s'extraire de cette obscurité accablante. Ni même de vérifier sa montre. Il resta au sol, le dos appuyé contre ce mur invisible qui protégeait les fioles du professeur, les coudes sur les genoux. Il ressentit une chaleur lui parcourir les phalanges, mais n'eut aucune réaction. Son visage commençait à picoter tant il fronçait les sourcils, mais il ignora cela également.

-Je te hais. Prononça-t-il tout bas. Si tu n'avais pas entreprit de me posséder, espèce de SALOPERIE, rien de tout cela ne serait arrivé. Rien de tout cela. Rien. Pas même... ce... sentiment que je ressens. Rien. Ni même cette colère. Ces espoirs. Cette douleur. Rien.

[...]

-Nous devrions le suivre. Proposa Hermione en voyant le professeur s'en aller.

Elle ne prit la peine d'attendre la réponse de Ron, supposant qu'il allait sûrement répliquer « Mais Hermione ! Gryffondor est en pleine remontada ! ». Elle l'entraîna par le bras puis descendit les escaliers rapidement afin de rattraper le professeur.

-Hey ! Pas si vite ! L'alarma le roux, manquant de peu de se casser la figure.

-Il faut se dépêcher Ron ! Tiens, on est arrivé en bas. Il se dirige vers le château. Vite, ne traîne pas !

Les commentaires de Lee Jordan résonnaient dans toute l'enceinte. Par on ne sait quel miracle, Gryffondor réussit à se hisser ex æquo avec Serpentard. Le match n'était qu'à sa moitié.

[...]

Si une personne, qu'elle soit élève ou bien professeur, écoutait à la porte de la réserve du potionniste de renommée enseignant au château, elle entendrait sûrement un silence des plus apaisant. Un silence tout à fait banal pour une réserve de potions.

Comment pourrait-elle insinuer qu'un tel silence côtoyait une amertume aussi présente ?