Chapitre 10

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Erin, Yoann et Marc étaient restés terrés dans la cave de l'immeuble D-8 toute la journée. Les vas-et-viens des habitants dans le hall d'entrée et la vie fourmillante des rues de la Cité ne leur permettaient pas de sortir en plein jour. Cette nuit, les soldats partiraient à leur recherche. Leur marge de manœuvre était infime.

Quand vint l'heure du dîner et que les habitants se regroupèrent dans les deux réfectoires prévus à cet effet, ils profitèrent du calme ambiant pour s'éclipser. Erin ouvrit la marche. L'ingénieure était de loin la plus délicate et la plus discrète du trio. De plus, son petit gabarit la rendait plus difficile à repérer par rapport à la grande stature de Yoann et l'embonpoint de Marc.

Les trois amis sortirent de leur cachette à pas de loup. Ils débouchèrent dans la rue, déserte. Le soleil n'était pas encore couché en cette soirée d'été. La visibilité qu'il leur offrait était à la fois une opportunité appréciée et une prise de risques importante. Ils suivirent leur itinéraire initial en longeant les remparts d'acier de cette immense prison. Leur progression était lente ; ils prenaient d'extrêmes précautions. Après une quinzaine de minutes, ils arrivèrent enfin en vue des hautes portes qui enjambaient le périphérique. Au sommet de la tour de guet, deux gardes assuraient leur permanence. Dans cette configuration, il leur était impossible de s'échapper sans se faire remarquer. Les trois amis allaient devoir réajuster leur plan.

- Faut les neutraliser, lança Erin d'un air décidé.

- Comment tu veux t'y prendre ? Questionna Marc, perplexe.

- J'ai une idée, dit Yoann. Le centre d'entraînement n'est pas loin de l'entrée Est de la Cité. On y va, on dérobe des armes, et on sort d'ici.

- Tu veux nous faire traverser tout le secteur H alors qu'on a une porte de sortie juste ici ?! Sans compter que le centre d'entraînement est le dernier endroit où on a intérêt d'aller !

- Justement, il s'attendent sûrement à ce qu'on soit n'importe où sauf là-bas. C'est le seul endroit où ils vont potentiellement baisser leur garde, ce qui nous donne un sacré avantage. Il faut juste être très prudents et prier de ne pas tomber sur eux par hasard.

S'en suivirent quelques secondes de silence marquées d'une profonde réflexion. Ils ne disposaient plus de beaucoup de temps avant que l'heure du couvre-feu ne sonne, et une fois la nuit tombée, les recherches des soldats de la Cité allaient s'intensifier. Erin et Marc finirent par acquiescer, non sans appréhension. Les trois fugitifs se mirent donc en route, emmenés par Yoann. Ils se faufilaient habillement entre les hauts immeubles du secteur H et arrivèrent bien vite au niveau de l'artère principale de la ville qui séparait la moitié Ouest de la moitié Est. Cette avenue était l'endroit de passage privilégié ; sa traversée s'annonçait donc délicate. D'autant plus que les quelques premiers résidents ayant fini leur repas commençaient déjà à repeupler les rues. Ces derniers n'étaient évidemment pas au courant de l'avis de recherche concernant les trois sudistes, mais ils pourraient aisément les dénoncer si les soldats en venaient à interroger la population. La discrétion était donc de mise.

Le trio passa en revue ses différentes options ; il n'y en avait pas énormément en réalité. Contourner la rue était tout bonnement impossible, et s'y engager innocemment en espérant ne pas être vu relevait de l'inconscience pure. Ils préférèrent donc attendre le couvre-feu, cachés derrière un local à poubelles. Ils attendirent ainsi le crépuscule sans dire un mot. L'attente fut longue et pesante. Plus le soleil déclinait, plus l'angoisse montait. Quand vint enfin l'heure, Erin jeta un œil furtif aux alentours. Tout semblait calme. Mais au moment où ils s'apprêtaient à sortir de leur cachette, un groupe de soldats déboula d'une rue perpendiculaire. Les trois fugitifs s'affalèrent en catastrophe derrière les poubelles pour ne pas se faire voir. Le bruit attira l'attention de leurs oppresseurs qui avançaient maintenant dans leur direction. La panique s'installa instantanément. Marc remarqua alors qu'un chat rôdait non loin de là, sûrement en quête de restes de nourriture qui auraient été jetés là. Il s'empressa de le chasser afin de faire diversion.

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