God's Shadows -Trahison-

CHAPITRE XIX

22:03

Le bruit devenait de plus en plus incisif et inquiétait davantage les nombreux convives repliés dans le grande salle principale. Les lumières s'étaient brusquement éteintes lorsque le bouclier d'Eleonore s'était désintégré après une dizaine de minutes.Toutes les personnes présentes avaient été dûment rassemblées prêt de la scène, le plus loin possible de toutes les ouvertures existantes. Les murmures se faisaient de plus en plus forts, signe que le sort d'apaisement qu'Alana avait utilisé commençait à se dissiper. Elle ne pouvait se permettre de réitérer l'expérience au risque de les énerver par mégarde. Des secousses se firent sentir tandis que des ombres bougeaient sur le toit de verre, bien trop rapidement pour être humaines. Des sanglots étouffés retentirent dans l'assemblée. Si ils avaient été discrets depuis le début, ce n'était plus le cas maintenant. Et ils n'avaient pas besoin de se faire remarquer. Alana se leva avec raideur et saisit un plateau de petits plats qu'elle laissa tomber abruptement devant les responsables du bruit ambiant.

— Goinfrez-vous autant que vous le souhaitez mais je ne veux plus vous entendre.

— De quel droit...

— Des gens se battent dehors pour vous gardez en vie. Se faire tout petit serait la moindre des choses pour les remercier ne croyez vous pas ? Mangez et tâchez de vous calmer, le prochain qui l'ouvre un peu trop fort ira prendre l'air.

Les poings serrés par l'énervement, Alana recula de quelques pas et s'écarta du groupe afin de se calmer. La migraine s'était considérablement accélérée depuis la dernière heure. Elle avait terminé en deux semaines la totalité de ses réserves d'algues pour le mois. La demoiselle s'était lamentablement fourvoyée en pensant qu'elle parviendrai à tenir vingt-quatre heures sans les effets relaxants de la plante. S'imaginer son odeur et son goût sur sa langue lui serra l'estomac de faim. Une faim qui la rongeait de l'intérieur et lui tordait les boyaux.

Un hurlement retentit à l'extérieur du bâtiment et glaça le sang de toutes les personnes présentes. Tout le corps d'Alana se crispa et les poils sur ses bras se hérissèrent. Presque automatiquement, le bracelet à son poignet droit se détacha et deux épées se formèrent dans ses mains l'instant d'après. Des exclamations de stupeur se firent entendre derrière elle mais elle n'y fit pas attention et ferma les yeux, se focalisant sur la provenance de la voix.

— Où allez-vous ?

— Je vais voir ce qui se passe dehors. Ne bougez pas et ne faites pas de bruit. Et peut-être que vous ne vous ferez pas tuer.

Elle sortit de la salle, le bruit de ses talons claquant contre le sol en rythme.

Le silence était inquiétant. Presque trop faux. Trop irréel. La fraîcheur du mois d'octobre accentuée par la bassesse des températures habituelles du pays la fit frissonner. Seule la sensation du pouvoir parcourant ses veines l'empêchait de claquer des dents. Des bruits de lutte se firent entendre, lointain. La protection d'Emilie était bien plus efficace que prévu : les bruits étaient couverts sur des kilomètres à la ronde et les combats n'étaient pas visibles par de simples mortels. Dans une demi-heure environ, des policiers arriveraient et ne remarqueraient que de faux impacts de balles dans les murs, les assaillants s'étant déjà enfuis depuis de longues minutes. Le relent d'une odeur fétide parvint à son nez qui se fronça en reconnaissant la senteur caractéristique des dokatrizs, très semblable à celle d'un macchabée.

Ses pas la portèrent devant une légère impasse faiblement illuminée par la lune. Toute ces détails lui rappelaient sans aucune doute le jour de son anniversaire, il y a quelques mois de cela. Un faible bruissement se fit entendre dans l'obscurité et Alana insuffla de son pouvoir dans ses épées qui s'illuminèrent assez pour qu'elle sache où elle mettait les pieds. Lorsqu'elle arriva au fond du cul de sac, les bruits se firent de plus en plus présents et se transformèrent en pas mêlés à des grognements.