Violet Odair

Dans l'attente de la fin

Quand nous nous réveillons, le soleil est encore haut dans le ciel. En s'appuyant l'un sur l'autre, nous parvenons à nous assoir. Des larmes me montent aux yeux en voyant l'état épouvantable de mes jambes. Nous avons été drôlement touchés par l'acide. Du pantalon jusqu'à la chair profonde, tout est brulé. Nos bras sont moins affectés, il n'y a que d'énormes plaques rouges. J'ai envie de pleurer, de m'apitoyer car qui sait, peut-être je ne pourrais plus jamais utiliser mes jambes ? Comment ferais-je pour nager ? Et même, dans l'immédiat, si un nouveau danger arrive, comment ferai-je pour m'enfuir ? Bryen enlève son sac de son dos et en sort son contenu. Il prend alors un parachute envoyé par nos sponsors. Encore une fois, ma déception est immense lorsque je me rends compte que ce n'est que de la soupe. J'espérais tellement que ce soit l'autre parachute, celui des médicaments. En réalité, celui-là, c'est moi qui le garde mais il ne nous ait plus d'aucune utilité puisqu'il est vide. Nous n'avons plus aucun moyen de nous soigner à présent. Bryen ouvre la conserve de soupe, en boit plusieurs gorgées et me la tend pour que je fasse de même. Au début, je n'ai pas envie d'accepter. En refusant, je souhaite montrer aux sponsors que ce n'est pas de ça dont j'ai besoin : ce que je veux plus que tout c'est de la même pommade miracle que la dernière fois.

« Il faut que tu en manges Violet, m'ordonne Bryen, c'est tout ce qu'on a maintenant. »

Il regarde le sol dépité. Il a raison, cette soupe est la seule nourriture qui nous reste. La Corne d'abondance ne contient plus que des armes et tous les courants d'eaux doivent sûrement être en réalité des bains d'acide. Tout ça est mis en place pour nous amener à nous entre-tuer, pour que les Jeux finissent au plus vite. C'est vrai qu'ils ont du commencé il y a une bonne semaine, ce n'est pas très courant qu'ils durent autant. J'accepte donc de prendre la soupe et j'en bois alors quelques gorgées. Je serais incapable de dire quels légumes la composent, elle a un goût étrange mais très doux à avaler pour la gorge. Je vois ensuite Bryen de lécher ses blessures, je le regarde perplexe.

« La salive désinfecte et guérit les plaies. Essaie vas y, me dit-il. »

Je commence donc à me lécher les mains puis tous les bras. Je ne sais pas à quoi m'attendre. Est-ce que toutes mes plaies vont se renfermer proprement maintenant ? Aucune idée, je ferai bien si son astuce fonctionne vraiment. C'est dans ces moments que je suis heureuse de l'avoir garder comme allié, car toute seule je n'aurai jamais eu l'idée de faire ça. Je ne suis pas assez souple pour me lécher les jambes, je les laisse donc comme ça. De plus, je crains que de la simple salive puisse les guérir. Pourquoi ne nous envoient-ils pas un parachute pour nous venir en aide ? Je pensais avoir compris la mécanique pour en avoir. On fait des scènes d'actions, de combats et en échange, ils nous aident. La séquence de l'acide et des papillons n'étaient peut être pas à leur goût. Ou alors, ils souhaitent vraiment que l'un d'entre nous meurent. Une troisième option me vient en tête. Peut être que les Juges interdisent maintenant que l'on reçoive de l'aide extérieure ? Je parie pour cette dernière, je suis persuadée qu'ils souhaitent en finir au plus vite de ces Jeux, ils deviennent trop longs.
Quand on a fini de se lécher les membres, Bryen me regarde en rigolant.

« C'est vachement agréable d'être recouvert de bave nan ? Un peu chaud et gluant, un vrai plaisir, pouffe t-il de rire.
- C'est toujours mieux que l'acide, repondé-je
- Ça c'est sur. »

On se tait ensuite tous les deux pour réaliser ce qu'on vient de vivre ces dernières heures. Malgré ces nombreux dangers, nous sommes encore tous les deux en vie, c'est un exploit.

« On devrait retourner à la Corne, continue t-il. »

Je pensais exactement la même chose que lui avant de voir l'état de nos jambes. C'est comme la dernière fois, après le combat de Kob, je suis incapable de marcher. Mais cette fois-ci, nous sommes deux dans ce cas là.