Violet Odair

Et après...

     Que ce passe t-il ? Suis-je morte ? Nan impossible, avec l'adrénaline, je ressens les battements de mon cœur à travers tout mon corps. Au dessus de moi, le ciel se fracture et laisse entrer un hovercraft provoquant d'énormes coup de vents et un bruit assourdissant. Je n'entends plus rien, je ne ressens plus que mon poux. Que ce passe t-il ? Est-ce mon dernier lancé qui provoque tout ça ? Je ne visais que les geais. D'ailleurs ces derniers se sont volatilisés, il ne reste que les cadavres de certains d'entre eux. Je me lève et scrute les environs pour trouver une réponse. Je décide d'aller ramasser mon couteau au cas où je devrais encore me battre. Je m'avance de plus en plus vers la Corne quand soudain, tout devient plus clair. Je vois, gisé au sol, le corps meurtri de Bryen ayant reçu mon couteau en pleine tête. Trop d'émotions me viennent alors. Je ne sais comment réagir. Ai-je vraiment réalisé ce qu'il vient de se passer ? Nan, je suis incapable de l'admettre... Ce surplus d'émotions se transforme en paralysie. Je reste neutre et m'agenouille à côté de lui. Je retire l'arme de son front. Du sang commence alors à couler sur son doux visage. Je ne comprends toujours pas, nan je ne veux pas comprendre ce qu'il s'est passé. Je reste dans ma bulle, plus rien ne compte autour de moi. C'est comme si j'étais endormie, inconsciente, dépourvue de toute raison rationnelle dans une bulle indestructible. J'avance ma main tremblante  vers lui, et dépose deux doigts sur l'entraille de son front. Son sang colore mes doigts, je vois son regard vide dans ses yeux ouverts et c'est là que je réalise : je l'ai tué.
Toutes mes émotions jusqu'alors contenues, explosent d'un seul coup. Je pousse des hurlements de douleur, de tristesse, de culpabilité. Qu'ai-je fait ? Comment ai-je pu ? C'est impossible, et pourtant c'est bien la vérité. J'ai tué Bryen du district Un, mon noyé, mon fidèle allié, mon ami... Il était si pur, si aimable, si généreux à un tel point de vouloir se suicider pour me laisser gagner. Il ne méritait pas ça. Il voulait mourir pour moi car je l'avais sauvé de la noyade mais ensuite de jours en jours, nous étions devenus une équipe, un binôme solide, et c'était même moi, qui lui devenait plus redevable. C'est moi qui aurait du mourir, pas lui. Je serai morte depuis tellement de temps s'il n'avait pas été là, tous mes Jeux auraient été différents. Je ressens alors une énorme culpabilité et haine à mon égard.

« Je suis un monstre, je l'ai tué, crié-je en sanglotant. »

Je ne mérite pas de vivre, c'est lui qui devait survivre. Je vois alors, posée au sol, mon couteau ensanglanté.

« S'il n'est plus là, je ne veux pas vivre. Je ne mérite pas cette chance, marmoné-je entre deux sanglots. »

Je m'en veux tellement, jamais je ne réussirais à oublier ce que je viens de faire, je me sentirais coupable toute ma vie. Alors ma seule délivrance est la mort. Je me penche pour prendre le couteau mais avant même de pouvoir le saisir une énorme pince en métal m'attrape par derrière et m'élève dans les airs. Je me débats le plus possible, mon arme retombe au sol, tous mes efforts sont en vain. En m'élevant de plus en plus dans les airs, j'adresse un dernier regard à l'arène que je suis entrain de quitter. Je dis adieu au lac, à la Corne mais surtout à Bryen, je le laisse seul ici. J'espère qu'il ne m'en voudra pas...

La pince me remonte jusque l'hovercraft. Une fois à l'intérieur, des Pacificateurs m'attrapent chacun d'un côté et me couche sur un brancard. Je me débats le plus possible, je suis une bête sauvage qui, dans l'incompréhension et le surplus d'émotions, devient agressive. Mais ils restent malgré tout plus forts que moi. Un troisième pacificateur arrive par derrière et m'assomme.

Je ré-ouvre petit à petit les paupières. Je suis couchée, accrochée sur un brancards. Autour de moi, trois personnes, ressemblant à des médecins, m'auscultent. Très rapidement, je retombe dans le comas.

Je ne sais combien d'heures je suis restée inconsciente mais quand je me réveille, je me trouve dans une toute autre pièce entièrement blanche.