Les flammes de la passion | 2

Chapitre 26 | Double jeu (2)

L'après-midi se déroule parfaitement bien, si bien que j'en viens à proposer :

—Estelle, je me disais... Samedi prochain je fête mes vingt-neuf ans en organisant une fête à la maison. Tu devrais venir !

Estelle semble touchée par ma proposition. Elle pose une main sur sa poitrine et accepte :

—Je viendrai avec plaisir.

Je souris, contente de m'être fait une nouvelle amie. J'en viens même à penser à Thomas. Je me dis qu'il a de la chance d'avoir Estelle. Elle semble gentille, sans histoire et attentionnée. En bref, elle est la copine parfaite pour Thomas. Et contrairement à moi, elle ne semble pas du genre à hésiter. Si un choix se pose à elle, je suis sûre qu'elle décide immédiatement, quitte à vivre avec des remords. C'est toujours mieux que les regrets. J'en sais quelque chose...

Savoir que Thomas a trouvé quelqu'un de bien et qui lui correspond me mets du baume au cœur. Il est évident que je préférerais qu'il soit en couple avec moi, mais je préfère largement savoir qu'il a retrouvé l'amour avec une personne comme Estelle.

Nous quittons le café et profitons de la brise marine en marchant le long de la Promenade des Anglais.

—D'ailleurs, intervient Estelle. Si ce n'est pas trop indiscret, je me demandais comment s'est déroulée ton histoire avec Thomas.

Je m'arrête nette et Estelle rectifie, gênée :

—Laisse tomber. Je n'aurais pas dû demander...

—Non, la rassuré-je. C'est juste que je ne m'y attendais pas.

Nous reprenons notre marche, tandis que je luis raconte dans les grande ligne notre histoire :

—Nous nous sommes d'abord rencontrés au lycée, en Terminale. Cependant, j'étais en couple avec un garçon qui s'appelait Lisandro. Je me suis ensuite séparé de Lisandro et je me suis mise avec Thomas. Nous avons dû rompre, car je partais étudier à New-York et je ne suis pas fan des relations à distance. Durant ces années, nous avons peu à peu perdu contact et entre temps, Lisandro est venu étudier dans la même ville que moi et nous nous sommes remis ensemble. Puis, il y a trois mois et demi, Thomas est venu me retrouver à New-York. Cela a mis le bazar dans mon couple et j'ai découvert que Lisandro, à qui j'étais fiancée, me trompait. Bref, on s'est séparé et je suis revenue en France pour prendre de la distance avec New-York.

—Sacrée histoire, note Estelle.

Je hoche la tête. Cependant, je trouve ça curieux, que Thomas ne lui ait rien raconté. Après, ce ne sont pas mes affaires.

—Et toi ? la questionné-je. Quelle est ton histoire avec Thomas ?

—Thomas et moi, ça date. Nous nous sommes rencontrés quand il était en troisième. J'avais seize ans et demie à l'époque. Je l'avais embrassé à une soirée, mais je ne pensais pas à plus. Il se trouvait que le petit était extrêmement attaché à moi et me suivait un peu partout. Je ne comprenais pas trop ce qu'il cherchait, jusqu'à ce que je capte son message subliminal : il voulait faire sa première fois avec une fille expérimentée. J'ai donc accepté et ai couché avec lui. Bon, entre toi et moi, c'était une catastrophe, mais comme on dit : « C'est en forgeant que l'on devient forgeron ».

Je regrette déjà de l'avoir lancée sur ce sujet. Mais il serait impoli de ma part de la couper, donc je l'écoute, tout en enfonçant mes ongles dans la paume de ma main, dès que j'ouïe un passage qui me déplais.

—Thomas était présent à pas mal des soirées auxquelles je me rendais, puis qu'il me suivait partout tel un petit chien. Il semblait vraiment très attaché à moi et je ne voulais pas le blesser, seulement, je finissais toujours super bourrée à ces soirées, ce qui faisait que je couchais avec Thomas à chaque fois, alors que je le refusais en étant sobre, car je ne voulais pas lui donner de faux espoirs. Bref, je te passe les détails, mais nous avons convenus d'être sex-friends. De cette manière, il pouvait améliorer ses compétences et moi, écoute on ne va pas se mentir, j'avais envie de pouvoir avoir quelqu'un avec qui coucher quand je le souhaitais.

Quand Thomas m'avait raconté l'histoire avec Estelle, il ne m'avait pas parlé de cela. En même temps, je ne peux pas le lui en vouloir, mais d'un autre côté, j'ai l'impression que quelque chose cloche dans cette version de l'histoire. Estelle continue :

—Jusqu'au jour où je me suis rendue compte qu'il était de plus en plus bon au lit. Je me suis dit que l'entraînement avait porté ses fruits, mais Thomas m'a avoué qu'il ne couchait plus avec moi, mais qu'il me faisait l'amour, car il m'aimait. Or je ne ressentais pas la même chose pour lui. Je le considérais comme mon petit poulain. Bref, je l'ai largué, peut-être pas de la meilleure des manières. Bon, ensuite, on s'est revu dans un bar à Nice et quand cela a dérapé entre nous, j'ai ressenti ce qu'il avait ressenti à l'époque. J'ai ressenti de l'amour envers mon petit poulain devenu un pur-sang arabe. Au final, je ne regrette rien. Je suis contente qu'on se soit séparé pour mieux se retrouver.

Rendez-moi sourde, je vous en prie. Cette fille est un vrai moulin à parole, il faut que je le note pour la prochaine fois. Bien qu'Estelle soit remontée dans mon estime et que je ne sois plus sur la défensive avec elle, j'ai l'impression qu'elle n'est pas honnête envers moi. La petite voix dans ma tête me persuade que c'est parce que c'est la copine de Thomas et que je suis encore réticente, mais je n'ai pourtant pas l'impression que cela soit ça.

—Sacrée histoire aussi, conclue-je gênée.

—Oui, comme tu le dis.

Nous approchons de chez moi, mais avant que nous nous séparions, Estelle se poste devant et change totalement d'attitude. Ses doux traits angéliques se froncent, tandis qu'elle pose ses poings sur ses hanches. Elle me met en garde :

—Donc si tu n'as pas compris, Thomas et moi c'est pour la vie. Je sais que tu es revenue à Nice pour lui, mais sache qu'il m'aime moi. Tu ne signifies plus rien pour lui.

—Je ne comptais pas, dis-je totalement perdue et désemparée. J'ai discuté avec Thomas et...

—Thomas est bien trop gentil pour dire ce genre de choses, alors je m'en occupe. Laisse-le, oublie-le. Ne t'approche pas trop près de lui, ou tu auras à faire à moi !

Si un regard pouvait tuer, je serais morte sur le champ. Elle me glace le sang. Le petit ange s'avère être un diable, tout comme Lisandro. Elle joue un double jeu avec moi depuis le début.

—Sur ce, poursuit-elle, je te souhaite une bonne soirée.

Elle tourne les talons de manière dramatique et s'éloigne. Avant de n'être trop loin, elle me lance de dos :

—Thomas et moi viendrons à ta soirée ! Ne t'en fais pas, je le surveillerai, avec ou sans ton invitation.

Mon sang ne fait qu'un tour, après qu'elle ait disparue de mon champ de vision. Je viens de faire affaire avec la version féminine de Lisandro. Qu'Ambre ne me dise pas que le destin ne veut pas me punir.

***

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