57. Audrey

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L'obscurité vient encore une fois me chercher. Tu viens me délivrer de ma honte? Tu viens les décharger du fardeau que je suis? J'arrive...  
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 Qu'est-ce qui se passe? Je me fais bousculer par un infirmier. Les contours de mon champ de vision se rétrécissent. Ils entrent dans la chambre d'Aï. Akaashi et Bokuto en sont expulsés sans ménagement. Ils sont blancs comme des linges. J'arrive en titubant à côté d'Ilyas, qui semble sur le point de faire un malaise. Je suis juste allé me chercher une bouteille d'eau. J'en ai eu pour moins de vingt secondes. Qu'est-ce qu'il s'est passé? Qu'est-ce qu'il se passe? Pourquoi est-ce que le médecin lui fait un massage cardiaque? "C'est ma faute. C'est ma faute. C'est ma faute. C'est ma faute." Bokuto répète ces mots comme une litanie. J'ai envie de pleurer. J'ai envie de le frapper. J'ai envie de m'effondrer. J'ai envie de dormir. Je ne veux pas rester ici. Je ne veux plus voir personne. Je dois partir. Je. Dois. Partir.

– Pourquoi ce serait ta faute? Il s'énerve soudainement Ilyas.
– Je n'ai pas arrêté de parler. Je l'ai épuisé. Vous me dites souvent que me regarder m'activer suffit à vous fatiguer. J'étais tellement heureux qu'elle se réveille. Elle était faible, et je savais que je devais faire attention, mais c'était plus fort que moi. J'ai épuisé ses dernières forces.
– Dans ce cas, nous sommes tous responsables. Je lâche.

Le silence s'abat sur nous comme une masse. Je suis fatigué. Une infirmière nous dit que l'heure des visites est terminée. Nous partons. De toute façon, nous n'avons plus rien à faire ici. Akaashi doit tirer son ami par le bras pour qu'il le suive. Nous sortons et l'air froid de la nuit me donne une gifle. J'ai le ventre affreusement tordu. Ilyas passe un bras autour de mes épaules et salue les volleyeurs. Je leur lance un regard équivoque, j'ai la gorge nouée. Akaashi nous fait un signe de tête mais Bokuto garde le menton rentré dans sa veste de sport. Il glisse un regard vers nous. Si je ne le connaissais pas, je prendrai sûrement la mouche. Il nous tourne le dos et prend la direction de l'arrêt de bus. Notre appartement n'est pas loin de l'hôpital.

Je laisse Ilyas dans le salon pour aller prendre une douche d'abords chaude, puis froide. J'entends Ilyas s'activer dans la cuisine. Quand je sors, je le trouve recroquevillé sur le fauteuil, un livre entre les mains. Nous avons des boules lumineuses, il s'en sert pour lire.

– J'ai regardé ce que nous avions dans les placards. Tu as des restes dans le frigo. Je n'ai pas faim.
– Moi non plus.

Notre mère est partie en Italie pour essayer d'arranger les choses avec son père. Je n'y tiens pas spécialement, mais je peux comprendre son souhait. Notre père est mort quand nous étions enfant. Nous avons un beau-père, mais il a deux filles en bas âge. Il doit sûrement être chez lui en train de les coucher. Pour être honnête, ça m'arrange. Je ne souhaitais pas partager ce moment de détresse avec quelqu'un d'autre que mon petit frère.

J'ai rencontré Aï en arrivant à l'académie de Fukurodani, dans la partie lycée. Elle y était déjà depuis quatre ans, puisqu'elle y était entrée au début du collège. Elle avait deux ans de moins que moi. Ilyas venait d'intégrer sa classe. Nous étions tous les deux en internat. Ce jour-là, j'essayais de défendre tant bien que mal mon frère contre les moqueries dues à sa couleur de cheveux. Elle était assise non loin depuis le début de la dispute et nous observait. Bokuto était allongé à côté d'elle. Les bras derrière la tête, il nous observait aussi. Elle était intervenue quand le plus âgé des tourmenteurs avait levé la main. Sa voix avait stoppé net le jeune homme.

– On peut savoir ce que tu fais?
– Qu... Quoi?
– Je te demande ce que tu fais. Tu ne sais plus parler?
– B... Bien sûr que si. Je... euhm... C'est eux qui m'ont cherché!

Aï, appuyé sur son bras, s'était relevé brusquement avant de se tourner vers Bokuto. Je me rappelle avoir été impressionné qu'une simple question provoque chez lui une réaction pareille. Elle n'avait pas été menaçante ou insultante. Sa voix avait même des intonations curieuses, comme une enfant qui demande pourquoi le ciel est bleu. Quand elle reporta encore une fois son attention sur nous, les quatres oppresseurs sursautèrent et baissèrent la tête. J'avais beau la détailler, je ne comprenais pas leurs réactions.

A l'Approche Du Crépuscule(Haikyuu) [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant