- Tu peux rouvrir les yeux, on est arrivés.
Aimée s'exécuta et découvrit une grande pièce aux murs entièrement rouges, au centre de laquelle trônait un un lit à baldaquins noir. Tyki la déposa délicatement sur le matelas, et ôta nonchalamment sa veste.
- Où est-ce qu'on est ? Le questionna-t-elle.
- Dans ma chambre. Ne t'en fais pas, personne ne viendra ici.
- Pourquoi ? C'est une autre de tes réalités ?
- Oui. Pour un voyageur comme moi, c'est bien pratique.
La jeune fille ramena ses genoux à sa poitrine, et y cacha son visage.
- Je parie qu'elle est déjà venue ici... Souffla-t-elle.
- Hein ? De qui tu parles ?
Elle ne répondit pas. Il se rapprocha et s’assied à côté d'elle.
- Je peux savoir pourquoi tu m'en veux ? J'ai un peu de mal à comprendre. Il réfléchit. C'est parce que tu voulais rester avec eux, c'est ça ?
- Rien à voir.
- Alors cesses de faire l'enfant et parles-moi.
Elle soupira, releva la tête et plongea son regard dans le sien.
- Cette Irène... c'est qui exactement ? L'interrogea l'adolescente. D'après ses dires, vous êtes assez proches.
- Tu es jalouse ?
En temps normal, il l'aurait sûrement lancé en pouffant à moitié, mais après ce qu'il venait de se passer dans la ville en ruines, il ne pouvait prendre ses inquiétudes que très au sérieux, surtout parce qu'il s'était posé la même question pour ce qui concernait Dio. Oui, lui aussi était jaloux.
Il enfouit son visage dans ses mains, pour finalement les passer dans ses cheveux en soupirant.
- Ce n'est que mon employeur, rien de plus.
- Ce n'est pas ce qu'elle m'a dit.
- Pour cette femme tous les hommes sont ses amants, tant qu'ils lui plaisent. Elle croit que tout est à elle, que tout lui revient. Elle pense que je suis tout naturellement fou d'elle et que je lui mange dans la main.
- Ce n'est pas le cas ?
- Laisses-moi rire ! J'ai plus de fierté que ça, Aimée ! Les femmes comme elle sont dangereuses, il vaut mieux pas s'y risquer. Et puis quand on a un caractère comme le mien, on finit vite par être agacé par ces personnes qui sont persuadées de nous contrôler.
- Alors pourquoi tu restes avec elle ?
- Pour le travail. Une fois que j'aurais accompli la tâche pour laquelle elle m'a payé, je partirais en quête d'un autre emploi.
Aimée ne le comprenait pas. Il avait ses propres principes, mais ils lui échappaient complètement. Il se releva.
- Tu es rassurée maintenant, princesse ?
- Plus ou moins... Marmonna-t-elle.
Il se détendit et lui tendit la main.
- Viens, on ne va pas rester enfermés ici toute la journée.
- Hein ? Et où est-ce qu'on va ?
- C'est une surprise. Tu vas voir, tu vas aimer.
Elle sortit à son tour du lit et entrelaça ses doigts avec ceux de Tyki. Il ouvrit un portail, et ils entrèrent ensembles. Ils arrivèrent bientôt dans une grande prairie ensoleillée. Les oiseaux chantaient, des papillons virevoltaient, et les fleurs dansaient au gré de la brise légère. Un véritable petit bout de paradis. Aimée était émerveillée par tant de beauté.
- Incroyable...
- Tu aimes ? S'intéressa Tyki.
- Qui n'aimerait pas ? C'est vraiment beau.
Elle se tourna vers lui.
- C'est toi qui l'a créé ?
- Non. Admit-il. Cet endroit est bien réel : on se trouve sur une plaine dans le sud de la France. Je viens souvent ici : c'est apaisant.
Elle admira une nouvelle fois le paysage.
- On est en France hein... ? Souffla-t-elle. Je comprends pourquoi tu aimes cet endroit...
Il déboutonna l'un des boutons de sa chemise.
- Tu veux aller te baigner ?
- Hein ? Où ça ?
Il lui désigna une petite rivière un peu plus loin.
- Mais j'ai pas de maillot de bain...
- Qui s'en soucie ? Rigola-t-il. Il n'y a que nous ici.
- On peut vraiment ?
- Bien sûr qu'on peut ! Allez, cesses de te prendre la tête !
Il commença à se déshabiller, et elle l'imita bientôt. Aimée resta tout de même en sous-vêtements, comme Tyki. Il la pris ensuite par la main et l'entraîna vers l'eau scintillante. L'adolescente y déposa d'abord le bout de ses doigts de pied et frémit.
- Elle est un peu froide quand même...
- Mais non...
Elle hésita un instant, puis abandonna et s'immergea dans l'eau froide.
- Oh bordel j'aurais jamais dû faire ça ! S'écria-t-elle sous le choc.
- Ahah, tu es bien plus chochotte que je le pensais !
Tyki s'approcha doucement pour venir l'enlacer, et lui transmettre ainsi un peu chaleur. Il plongea le visage dans son cou et l'embrassa.
- Si tu savais depuis combien de temps je rêve de ce moment. Soupira-t-il. Je voulais tellement qu'on se retrouve comme ça dans la vraie vie.
Aimée rougit. Elle aussi l'avait toujours souhaité, et ça s'était finalement réalisé. Elle était vraiment heureuse. Elle repensa alors à ses amis de Saint Gabriel. Un léger malaise s'empara d'elle.
- Ils doivent sûrement s'inquiéter, pas vrai ?
- Tu parles de tes amis ? Questionna Tyki.
Elle acquiesça.
- Sûrement, oui. Répondit-il honnêtement. Pourquoi, ça te travaille ?
- Pas vraiment. Avoua-t-elle. Et c'est ça le problème. J'ai l'impression... que ça ne me concerne pas. Je me sens bien et je veux rester comme ça, peu importe les problèmes que ça pourrait causer. C'est horriblement égoïste, hein ?
Il sourit.
- J'emploierais plutôt le terme « humain ». C'est parfaitement normal de vouloir faire passer son bonheur avant celui des autres. Certains ont beau appeler ça de l'égoïsme, au fond on pense tous de la même manière. Et puis je commence à bien te connaître, Aimée. Ils sont gentils et tu les aimes bien, mais ils n'étaient pas là quand tu as souffert, et ils n'ont jamais cherché à connaître la Aimée que tu étais avant de rejoindre Saint Gabriel. Ils ne te connaissent pas, pas plus d'ailleurs que tu ne les connais. Alors forcément, votre amitié ne va pas plus loin que ça.
Il avait raison. Aimée était contente e s'être fait des amis, mais ses sentiments pour eux ne s'étaient pas encore développés. Il fallait bien plus que ça pour qu'elle s'attache véritablement à eux, bien plus que quelques discussions en cours et pendant les repas.
- C'est vrai. Lui accorda-t-elle. Les liens que j'ai tissé avec eux ne valent pas grand chose par rapport à notre relation : je me souviens qu'une nuit, j'avais craqué et passé la nuit à pleurer dans tes bras parce qu'on m'avait fait la misère à la maison.
Il resserra son emprise.
- Oui, c'était il y a un an. Tu sais que je m'étais fait du soucis pendant une semaine après ça ?
- Je suis désolée... sourit-elle.
Il l'embrassa de nouveau.
- Tu commences à avoir froid, on devrait sortir.
Ils s'exécutèrent et s'allongèrent dans l'herbe, au soleil. Les rayons de lumières réchauffèrent la peau de la jeune fille, et alors qu'elle se blottissait contre Tyki, elle finit par s'endormir.Lorsqu'elle se réveilla, le soir était tombé. Elle se redressa et remarqua que Tyki, qui avait enfilé ses vêtements, observait le ciel étoilé.
- Je n'ai pas osé te réveiller, mais le temps s'est rafraîchit : tu devrais te rhabiller. Lui conseilla-t-il.
Elle le fit puis revint s'asseoir à ses côtés, tout en admirant le sublime paysage qui s'offrait à elle : cet endroit était encore plus beau de nuit.
- Tyki ?
- Oui ?
Elle ramena ses genoux à sa poitrine.
- Ça me trotte dans la tête depuis un moment, mais jusqu'ici j'ai pas eu le courage de t'en parler...
- Qu'est-ce qu'il y a, princesse ?
Elle prit une grande inspiration.
- Quel est votre but exactement, à Irène et toi ? Qu'est-ce que vous cherchez à accomplir ?
Il se releva à son tour.
- En clair, tu me demandes de te révéler, à toi notre ennemie, le grand projet sur lequel on travaille ?
- C'est exactement ça.
Il rigola.
- Bah, c'est pas comme si on m'avait demandé de garder le secret ou un truc du genre. Sourit-il.
- Alors tu vas vraiment me le dire ? S'étonna Aimée.
- C'est toi qui me l'a demandé, non ? Bon, sois attentive, je ne te le dirais pas deux fois.
L'adolescente croisa les jambes, toute ouïe.
- Je ne sais pas si ton groupe et toi l'aviez remarqué, mais ces six derniers mois, des compatibles du monde entier ont soudainement disparus, en plus de ceux utilisés pour les chimères parlantes. Enfin, plus précisément, on les a enlevé et on leur à prélevé leur âme. Ils sont pour l'instant quatre-vingt-dix-sept, et notre but est d'arriver à cent.
- Et pourquoi faire ? Questionna Aimée qui tenta de faire abstraction de ces cent vies sacrifiées.
- Pour créer un cristal, mais pas n'importe lequel : ce serait la très recherchée pierre philosophale. Elle nous permettrait de créer un monde seulement peuplé par des compatibles, les élus des cieux : un monde « parfait », comme dirait Irène.
Aimée se figea. Tout ça lui paraissait bien sordide, et surtout irréel.
- Un monde uniquement peuplé de compatibles ? C'est impossible... Souffla-t-elle. Concrètement, comment vous allez vous y prendre ?
- C'est en fait très simple : chaque humain est en vérité un compatible potentiel, la seule différence étant l'apparition des capacités qui en découlent. En utilisant la pierre, on va forcer l'activation du facteur de compatibilité : les plus forts y survivront, et les autres mourront.
- Et tu adhères à ça ?
- Ce n'est qu'un boulot. Je ne me sens pas vraiment concerné...
- Enfin c'est quand même un génocide ! S'énerva-t-elle.
- C'est vrai. Mais ça ne change strictement rien pour moi : nous sommes tous les deux des compatibles, alors nous ne craignons rien. Je ne suis pas un altruiste : tu trouveras difficilement plus égoïste que moi.
Ça, elle l'avait bien compris, mais ça ne changeait toutefois en rien ses sentiments à son égard : elle l'aimait toujours autant. C'était d'ailleurs pour ça qu'elle était aussi résolue.
- Je ne te laisserais pas faire. Lui lança-t-elle.
- Tu comptes m'en empêcher ? Sourit-il. Et comment vas-tu faire ?
- Si je tues Irène, alors votre contrat sera annulé, pas vrai ?
Le sourire de Tyki disparut aussitôt.
- Abandonnes tout de suite cette idée. Irène est bien trop forte pour toi, tu y laisserais la vie à coup sûr.
- Tout comme tu es déterminé à aller au bout de ton travail, moi j'ai la ferme intention de l'arrêter.
Il soupira et se releva.
- Je ne t'en laisserais même pas l'occasion. Rentrons et allons nous coucher : la journée a été forte en émotions, et la nuit te portera conseil.
- Si tu le dis...
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Last Stardust || Inspiration D.Gray Man
Romance"J'ai chaud. J'ouvre les yeux. Je me trouve dans une grande salle de bain épurée, dont la buée provoquée par la chaleur du bain dans lequel je suis allongée brouille ma vue. Je sens un corps derrière le mien, et bientôt deux bras viennent m'enlacer...