trente-neuf

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emma ;

Assise face au miroir de ma coiffeuse, je m'appuie sur le meuble et me regarde à travers le reflet.

Un soupire s'échappe de mes lèvres et je ferme les yeux.

L'année scolaire se clôture bientôt, enfin.

Elle clôture mes années lycées, et prend une place particulière dans mon cœur, car elle est celle qui m'a fait le plus grandir.

J'ouvre à nouveau mes paupières et souris avant que mon regard se pose sur ma boîte à bijoux qui est grande ouverte, devant moi.

Esma a sûrement dû fouiller à l'intérieur sans la refermer, ce qui arrive plus que souvent, pourtant le collier qui en ressort m'interpelle, et l'étirement de mes lèvres se dissipe en même temps que mes doigts saisissent le collier de perles.
Je serre les dents alors que mon esprit me remémore des souvenirs d'antan, des bons, des mauvais.

Des joyeux, et des biens plus tristes.

Je dispose l'amas de perles dans le creux de ma paume avant de porter cette dernière à mes lèvres, puis je fais à nouveau face à mon reflet, pour cette fois-ci me détailler.

Maman, il est où papa ?

J'ai l'impression de me revoir enfant, et je ressens presque la même incompréhension qu'à cette époque-là, où je voyais ma mère pleurer, bien plus que rire.

Ma mère pleure souvent, de nerfs, de joie, quelques fois de peine, mais là, c'était d'épuisement, aujourd'hui je l'ai saisi.

Mais ce n'était pas le cas, avant.

C'est à cause de moi que vous vous criez dessus ?

Les yeux larmoyants de ma mère me reviennent à l'esprit et j'ai le cœur qui s'en retrouve meurtri, dès à présent j'ai envie de faire un bond dans le temps, pour pouvoir la prendre dans mes bras et être là pour elle.

Parce que moi à l'époque, je n'ai pas su faire.

C'est à cause de la dernière fois... ?

Elle avait essayé de m'expliquer maintes et maintes fois que je n'y étais pour rien, pourtant moi la seule chose que j'avais retenu, c'est que lorsque j'avais appelé mon père en panique, il était arrivé précipitamment avant de faire les gros yeux.

Comme quand je faisais des bêtises.

Puis il avait crié, et moi j'avais pleuré, avant que lui aussi, fasse comme moi.

Les paroles de ma mère bercent ma conscience pendant un bon moment, se mélangeant parfois avec le souvenir du bruit des sanglots que mon père avait eu cette journée là, ce qui me noue la gorge.

Je repose le collier sur la coiffeuse, puis triture ma bague en jouant brièvement avec la lune en diamanté, sans pour autant chasser les souvenirs qui se montrent être coriaces, et bien plus douloureux.

Car les pleurs de ma mère n'ont pas cessé, les absences de mon père non plus, et même si aujourd'hui tout ça appartient au passé, je n'arrive pas à oublier.

J'arrive pas à oublier à quel point j'ai cru qu'un jour, mes parents allaient se séparer, à quel point j'ai cru que mon père n'allait jamais se relever, emportant le chagrin de ma mère avec lui.

Ça duré un an.

C'est long, un an.

Surtout quand on ne comprend pas grand-chose à ce qu'il se passe.

 𝗍𝗋𝖺𝗃𝖾𝖼𝗍𝗈𝗂𝗋𝖾 ; 𝐭𝐨𝐦𝐞 𝐭𝐫𝐨𝐢𝐬Où les histoires vivent. Découvrez maintenant