Chapitre 38 - Memoria

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La question de Remus laissa Hermione sans voix. Elle qui avait tant œuvré pour garder son secret enfoui se voyait trahie par une simple photo. Après plusieurs instants de silence, le lycanthrope reprit la parole, voyant que la jeune femme ne semblait pas pouvoir avoir la capacité de lui apporter une réponse acceptable.

- Tu sais, j'ai essayé de trouver une explication rationnelle à... tout ça. Sans y parvenir. Et puis j'ai mis bout à bout tous les petits éléments qui étaient étranges à ton sujet. Ton arrivée dans la grande salle. Ton passé qui ne colle pas ; tu as affronté beaucoup trop de choses, beaucoup trop d'événements qui n'ont jamais été relayés par quelque source que ce soit. Et tout ce que tu sais sur Voldemort et les horcruxes. La seule, unique explication est complètement folle, mais après tout, lorsque vous avez éliminé l'impossible, ce qui reste, si improbable soit-il, est nécessairement la vérité.

Il marqua une pause, la regardant droit dans les yeux. Lorsqu'il reprit la parole, sa voix était solennelle.

- De quelle année viens-tu, Hermione ?

Si elle avait redouté la question fatidique, l'entendre lui fit l'effet d'une douche froide. Elle se mit à bégayer, incapable de formuler une quelconque parole. Remus, en voyant sa panique, s'empressa de la rassurer.

- Au moins, ta réaction me montre que je ne me suis pas trompé. Je ne suis pas en colère que tu nous aies caché cela. Je veux dire... Comment étais-tu censée nous l'apprendre ? J'aurais aimé que tu nous l'avoues, mais peut-être était-il mieux que ça se passe ainsi.

- Je... Ce n'est pas une question de confiance, Remus. Je n'existe pas ici. Je ne sais même pas comment Dumbledore a avalé mon histoire pathétique. Lorsque je finirai Poudlard dans trois mois, je n'ai nulle part où aller. Mais j'aurai le temps de m'en soucier, si j'achève ma mission. Je me suis retrouvée à cette époque, sans aucun repère sauf des souvenirs d'autres personnes, à devoir me construire une nouvelle vie. Comment étais-je censée vous le dire ?

Remus ne répondit pas mais répéta sa première interrogation.

- Quand ?

- 1998.

- Si tu es ici, j'imagine que Voldemort...

- Nous avons perdu, oui. Définitivement.

Le silence se fit.

- Mais je suis revenue pour donner une autre chance au monde sorcier. Nous étions en cavale depuis un an avec Harry et Ron, à nous cacher des rafleurs. Ils traquaient les traîtres à leur sang et les nés-moldus. Nous avons fini par nous battre de front, mais nous n'avons pas...

Elle ne put finir sa phrase, la voix nouée par l'émotion.

- J'ai trouvé une solution complètement folle et j'ai tenté ma chance. Je n'avais plus rien là-bas.

La main de Remus vint se poser sur la sienne, en soutien.

- Je ne t'en veux pas, répéta-t-il. Et ce n'est pas mon histoire ; je ne dirai rien aux autres pour l'instant. Mais tu dois leur dire.

- Demain.

- Demain, acquiesça-t-il. Je te libère pour ce soir, je peux bien attendre quelques heures de plus pour des explications. Sirius a déjà bien dû t'épuiser.

Il secoua la tête et leva les yeux en se rendant compte de sa phrase, mais n'ajouta rien pour autant.

- Bonne nuit, Remus.

Il acquiesça et elle remonta dans son dortoir. Elle ne put dormir cette nuit, rongée par l'anxiété.

Le lendemain, elle alla prendre son petit-déjeuner dans la grande salle et fut rejointe par les Maraudeurs, la poussant à afficher un sourire de façade. Le regard appuyé bien que bienveillant de Remus n'apaisa en rien ses craintes et elle se tendit dans les bras de Sirius, qui ne remarqua rien sur le moment. Avant de quitter la table, elle leur demanda d'un ton faussement léger qu'ils la rejoignent à vingt-et-une heures dans la Salle sur Demande en inventant un prétexte bidon pour écarter le pauvre Peter, ce à quoi ils acquiescèrent, et elle s'enfuit rapidement, incapable de supporter plus longtemps la tension ambiante.

Aut vincere, aut moriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant