À la lisière de Moi

Chapitre 6

Yuna

Ma première décision de la journée est de mettre fin à ma pseudo relation avec Devon. Parce que je ne veux pas d'attaches, pas sur ce plan là. Je vais à la fac, j'ai autre chose à penser. Devon est gay, mais il fait partie des sportifs. Ce n'est pas encore super bien vu dans ce milieu. C'est totalement con, oui. Pas de scènes de ménages, on a fait ça bien. Il est tellement adorable ce garçon, j'espère qu'il pourra vivre sa vie comme il le souhaite, sans se cacher. Il le mérite.

Fé est d'une humeur massacrante en ce moment, et j'ai l'impression qu'il me suis à la trace. Bon, ça me dérange pas plus que ça quand il est de bonne humeur évidemment. Là, il se contente de froncer les sourcils et de contracter sa mâchoire. Ça doit être de famille, ce tic. Sa jumelle, Dee, n'en mène pas large. Elle a coupé les ponts avec Reyes sans ménagement. Ça serait plus simple si elle n'était pas folle amoureuse de lui.

- Yuna, il va me détester à vie. Mais je m'en fous tu sais. La fac est plein de pommes à croquer.
- Bien sûr. Une vraie salade de fruits !

Et moi au milieu de toute cette morosité, je vais plutôt bien. Toujours autant larguée par mes choix de vie, ça change pas, mais vraiment bien. Détendue, je dirai. Même quand on a une interro surprise, ça ne me stress pas. Le café de Jeff est miraculeux.

- On peut se marier avec une machine à café ? Faut que je me renseigne.
- Yuna, tu es droguée. Fais toi désintoxiquer, et vite.

Fé vient d'ouvrir la bouche, j'avais oublié le son de sa voix tellement il est muet en ce moment.

- T'as raison, mais je vais quand même m'en prendre un, pour être sûre.
- Toxico !
- Rabat-joie ! T'en veux un ?

Je lui fait mon sourire le plus innocent possible, qui ne l'est absolument pas. D'ailleurs, on vient de parler de mec et il n'a pas étranglé sa sœur. Y a un truc qui ne va pas.

- Supplément alcool. Tu le sors d'où ton jean ? Il est pas un peu grand ?
- Double dose de sucre, donc. Le baggy revient à la mode, mon cher.

Même si c'est vrai, l'explication "Ton cousin m'a arraché ma petite culotte et j'étais en jupe", n'a rien à faire dans cette conversation. J'ai mis un de ses boxers aussi.

- Les suçons aussi, apparemment. Ajoute sa sœur en me jetant un regard en coin.

Je tire la langue, attendant patiemment que la file devant moi déguerpisse. Encore plus quand je remarque Candace. Je passais une si bonne journée jusqu'à présent.

- Dis, Yuna. On se demandait avec les filles. Ça fait quoi d'être la pute des Taylor ?

Les ricanements de hyènes de ses chères copines sont aussi insupportables que sa voix. Mais je suis de bonne humeur aujourd'hui.

- J'en sais rien, j'étais pourtant sûre que tu le savais. Je suis déçue.

Son regard bouillant de haine ne me fait ni chaud, ni froid. J'ai répondu à sa question, je ne vois pas ce que j'ai fait de mal après tout. Les gens sont si indélicats de nos jours, c'est incroyable.

- Viens avec moi, je vais te montrer, miss Crawley.

Fé est de retour avec un sourire bien trop provoquant pour être aimable. Candace vire au rouge et part en faisant claquer ses talons sur le sol.

- Pourquoi miss Crawley ?
- Parce que c'est son nom.

Il répond comme si c'était évident que je devais le savoir. La seule fois que j'ai entendu ce nom, c'était quand déjà ? Ça va me revenir. J'ai besoin de café, et tout va aller pour le mieux. Dans le monde de Yuna, en tout cas. Pour le reste, tant pis.