Chapitre 30

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Yuna

Sous son regard de feu, je me liquéfie littéralement. Je sais qu'il n'aime pas être pris au dépourvu, mais sans son besoin viscérale de contrôler le monde, on en serait pas là non plus. L'expression "ça passe ou ça casse" n'a jamais été aussi parlante que maintenant. Je me mettrai bien des gifles pour ça, mais c'est un peu tard.

Son jean sombre troué, son t-shirt qui se tend sous sa respiration laborieuse et son impassibilité feinte, me donne l'envie de m'aplatir comme une crêpe. Encore une sacrée bonne idée, McKinley ! Vraiment, bravo ! Sa main passe nerveusement dans ses cheveux, je compte le nombre de fois où ses doigts se crispent dessus. Sept fois. Il est furax. Chouette. Je me dandine d'une jambe à l'autre, faisant bouger le tissu de ma robe sans le vouloir. Elle est quand même courte, il s'agirait de ne pas trop la faire remonter.

Une seconde plus tard, je me retrouve plaquée sur le mur où j'étais collée avant qu'il arrive. J'allais lui râler dessus, mais le feu qui danse dans ses yeux, et son tic de mâchoire me coupe dans mon élan. Sa respiration est totalement erratique et la mienne commence à suivre le même chemin. Ses doigts fermement accrochés à mes bras, sans me faire mal, me brûle par ce contact. J'essaie de deviner ce qu'il pense, beaucoup trop agité et vraiment trop près, mon cœur manque un battement. Il pose sa bouche sur mes lèvres et me laisse pantelante. Le froid prend place à l'instant où il me lâche et qu'il part.

C'est tellement puéril, je ne me reconnais pas. Pousser le vice aussi loin, ce n'est pas moi. J'aurai jamais dû laisser mes copines me retourner le cerveau, mais je veux tellement être celle qui compte pour de vrai dans sa vie. Être la seule, son unique. Coincée au milieu entre ma tête et mon cœur, portant cette foutue robe qui ne me reflète pas, il est la drogue dont je ne peux pas me passer. Je me déteste tellement de ne pas être capable de m'en détourner et de me rabaisser à l'avoir allumer, comme toutes les autres. Ce que je peux être conne.

La douche m'a servie à me débarrasser de mes artifices, je devrais me sentir mieux mais la torpille plongée dans mon cœur est impitoyable. Jusqu'où je pourrais aller pour lui ? Aucune idée, et c'est bien ce qui me fait peur. Mon intérêt pour lui, l'attraction entre nous, c'est si fort que je vais probablement finir à l'asile.

May est rentrée avec moi, elle n'a pas dit un mot. J'espère que la faille entre elle et Fé va se résorber, c'est évident qu'ils vont bien ensemble. Je connais la fougue de ma meilleure amie et la patience divine de son prétendant. Deux opposés qui ne font qu'un. Je suis persuadée qu'ils finiront ensemble. Si ce n'est pas maintenant, ça sera plus tard, c'est évident.

- Incroyable ! Il a toujours ses couilles au moins ? Nan, parce que ça joue le bonhomme à faire le caïd à trois balles, mais devant le fait accompli, y a plus personne !

Son regard noir est aussi sombre que mon moi intérieur.

- Mmh.
- Putain, McKinley ! Bouge toi le cul, là ! Fais ton truc de peste, arrache lui ses parties et fais toi un collier avec. C'est insupportable de te voir sans réaction.
- Qu'est-ce que tu veux que je fasse au juste ? Que je me mette à genoux ? T'es gentille, mais non.

Les mèches de ses cheveux, revenues à leur couleur naturelle noir comme la nuit, bougent en rythme de son agitation.

- Vous êtes, toi et lui, de bons gros désastres affectifs. Et bordel, faut être aveugle pour ne pas remarquer que vous vous attirés comme des aimants. Rien que de vous voir, ça donnerait à un asexuel l'envie de partouzer dans tous sens !

Je devrais être habitué aux envolées lyriques si profondes de May, elle arrivera toujours à me surprendre. Et elle arrive également à me faire sourire.

À la lisière de MoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant