En quittant la maison des Alfieri, un bruit assourdissant fit sursauter Jae-Sun qui était perdu dans ses pensées. Il chercha la source et se rendit compte qu'une vieille dame riait tellement fort qu'elle faisait trembler les murs des maisons. Trois autres la joignirent et il se retrouva à les regarder bêtement. Une cinquième déboula dans la rue, les bras chargés d'un gros bac rempli d'eau. Elle le portait difficilement, pliée en deux par le poids et piétinant jusqu'à ses amies. Elle manqua même de le renverser ; elle pesta et le posa un moment pour soulager son dos.
Ni une, ni deux, le coréen accourut et attrapa le bac sans un mot. Il s'inclina tout de même devant son aîné et le transporta sur toute la longueur séparant sa maison du coin où les grand-mères s'étaient installées. La ruelle étant fermée au passage des voitures, elles avaient pris place à la vue et aux oreilles de tous. Il le déposa près de ces dames qui le scrutèrent toutes en chuchotant des compliments.
— Aigo ! Quel gentil garçon ! gloussa celle avec des gants roses.
— Voilà, Halmoeni ! fit-il timidement sous les regards scrutateurs de ces femmes.
Avant qu'il n'ait pu leur souhaiter une bonne journée, la grand-mère qu'il avait aidé le rejoignit, glissa son bras autour du sien et l'attira à sa suite vers sa maison. Jae-Sun n'osa pas lui faire comprendre qu'il était occupé et se laissa entraîner, en jetant un regard désolé à Margot. Toutefois, la faucheuse semblait divertie. Elle était à côté des vieilles dames qui murmuraient entre elles. Il était prêt à parier qu'elles louaient sa politesse. La femme le tira à l'intérieur et ils se dirigèrent dans sa cuisine.
— J'ai deux autres bacs, là. Tu peux les porter pour moi ?
— Euh, oui, bien sûr, Halmoeni.
— Tes parents t'ont bien élevé !
Il la gratifia d'un charmant sourire auquel elle ricana. Elle tourna les talons, saisit sa paire de gants violets et sortit en laissant la porte ouverte. Jae-Sun souffla en voyant la taille des bacs et la quantité d'eau qu'ils contenaient. Il jaugea tour à tour la porte et le sol de la cuisine, quand Margot arriva dans son dos. Elle pouffa à son air défait.
— Pas capable de les soulever ?
— Essaie donc toi ! Ils ont l'air vraiment lourd !
— Tu as une trop grande bonté, Oppa ! Aller, aide ces grand-mères ! En plus...
Elle s'interrompit et se rapprocha de lui.
— Nous pourrions obtenir des informations, puisqu'elles sont du quartier.
— Génial, maugréa-t-il. L'atelier kimchi n'était pas prévu sur ma liste de choses à faire avant de mourir !
Néanmoins, il se pencha et prit le premier bac. Il grogna et expira péniblement dû au poids, mais il réussit à l'apporter aux vieilles femmes qui n'avaient apparemment pas terminé leur messe-basse à son sujet. Au deuxième, il eut plus de mal, transpira quelque peu et respira bruyamment. Il le lâcha brusquement et un peu d'eau s'échappa. La dame aux gants violets avait déplié un siège pour lui et il s'y jeta.
— Comment faites-vous d'habitude ?
— Ce n'est pas si dur ! Ah, ces jeunes ! se moqua gentiment celle aux gants verts.
Il était littéralement épuisé et elles osaient dire que ce n'était pas si dur ! Il ne cacha pas son air amer et enleva même la sueur de son cou d'un revers de main, ce qui fit rire les vieilles dames. Il leur répondit par un rictus sarcastique. Elles eurent au moins la générosité de lui tendre un morceau de papier pour qu'il puisse s'essuyer correctement. Il se débarrassa de son manteau d'hiver, puis constata que les températures étaient toujours basses et le remit, préférant avoir chaud un moment que de tomber malade par la suite. Jae-Sun s'apprêta à leur poser quelques questions, mais un bac atterrit à ses pieds et une grand-mère aux gants jaunes s'enquit :
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Avenge the Fallen
Mystery / ThrillerMargot Rosea étudie dans une école internationale à Busan. Sa famille s'impose sur le marché coréen comme étant l'une des plus fortunées et considérables. Cependant, Margot meurt subitement. Et elle revient miraculeusement sur terre dans la peau...