Une main nécessaire

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Margot s'assit sur le canapé et ignora le regard du coréen.

— Tu le savais.

Ce n'était pas une question, mais une constatation. Margot avait discuté avec le défunt juste avant de le guider vers l'au-delà et il lui avait demandé de prendre soin de l'étudiant à sa place. Elle avait bien évidemment accepté. Jae-Sun ne répondit pas et de toute façon elle n'attendait rien, souhaitant au plus vite tourner la plage. A chaque mort dont elle se chargeait, elle était convaincue de ne pas être capable d'endosser ce rôle et d'abandonner un jour ou l'autre. La jeune blonde balaya cet événement funeste et l'enterra profondément dans sa mémoire. Elle aspirait à oublier.

— Il faut trouver un moyen d'entrer chez toi. Nous n'avons plus le choix.

— Ce n'est pas chez moi, rétorqua-t-elle sèchement. Je n'ai plus de chez moi, Jae-Sun. C'est trop dangereux, en plus.

— Margot..., soupira-t-il, je vais mourir.

— Oui, et j'apprécierais que tu restes en vie jusqu'à la fin du compte à rebours ! trancha-t-elle.

— Deux jours, c'est tout ce qu'il me reste. Crois-moi, je ne rechignerais pas pour quelques heures de plus ou de moins. Sans compter que je ne veux pas rencontrer ta famille. Le but est seulement de s'infiltrer dans la maison pour lire le contenu de l'envelopper mystérieuse, c'est tout.

Il hésita à rajouter son idée, puisque Margot s'était renfrognée.

— J'ai peut-être un plan. Enfin... Les Rosea ont plusieurs employés. N'est-ce pas ? Pour glaner des informations supplémentaires, j'ai pensé que nous pourrions rendre une petite visite à l'un d'eux, incognito, poser nos questions et repartir. Et puis, si ça peut nous donner un moyen d'entrer dans la maison, nous devons essayer.

Elle acquiesça et ils se mirent immédiatement en route vers la maison des Rosea dans un silence qui s'allégea au fil des secondes. Plus la mort disparaissait de ses pensées tourmentées, plus les traits de son visage se décrispèrent. Ils arrivèrent rapidement au pied des murs gris et ils décidèrent de patienter au coin de la rue, là où la caméra de surveillance au-dessus du portail ne les filmerait pas. Ils profitèrent de ce long instant pour faire le point, lister de nouveau tous les suspects potentiels et rappeler les dernières preuves utiles. Au moins deux heures s'écoulèrent ainsi, mais ils ne perdirent pas espoir.

Un employé finit par quitter son poste. Un jeune homme que Margot reconnut, puisqu'il avait accueilli Jade. Ils le suivirent de loin pour qu'ils s'éloignent de la maison et ils réfléchirent à comment l'aborder sans avoir l'air étrange – c'était surtout elle qui méditait sur la question, car Jae-Sun était trop occupé à ne pas le perdre de vue. Elle prit soudainement de l'avance en le rattrapant et fit signe au coréen de ne pas s'inquiéter. La faucheuse aspirait à découvrir son prénom qui servirait ensuite à l'approcher.

Il marchait vite, tenant sa veste à bout de bras. Elle se souvenait que les employés portaient tous des badges. Elle se contorsionna donc pour repérer son prénom, mais la veste était totalement noire, sans aucun indice. Il l'avait sûrement laissé chez les Rosea et l'avait glissé dans son sac. Par chance, il s'arrêta dans un restaurant à sandwichs et le serveur entama immédiatement une conversation avec lui. Il était probablement un client régulier. Margot lança un regard à son ami dehors et elle hocha la tête pour lui faire comprendre qu'elle était sur le point de réussir.

— Tu me fais une petite réduction, Hyung ?

— Chul-Hei ! ronchonna le serveur. Tu es trois fois mieux payé que moi, n'abuse pas !

Le jeune homme gloussa pour se moquer de son ami et Margot n'écouta pas davantage leur conversation. Elle rejoignit Jae-Sun et lui confia le prénom. Quand Chul-Hei sortit du restaurant avec son repas à emporter et qu'il s'engagea dans une énième rue, l'étudiant pressa le pas et formula des phrases clichés dans sa tête. Son cœur battit à tout rompre et il préféra ne pas y songer une seconde de plus au risque de se défiler. Il combla l'espace entre eux en effectuant un bond en avant, attrapa son bras et esquissa son plus beau sourire faux.

Avenge the FallenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant