Sur un air de Chostakovitch

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L'étudiant était en train de se détendre devant une émission amusante, la joue reposant sur son poing, jambes surélevées sur sa table basse, lorsqu'une jolie jeune femme en costume traversa son mur. Il sourit en saluant Margot.

Oppa ! Ils habitent dans le district de Suyeong, dans une maison relativement humble comparée à leur réputation. Je suis rentrée en métro, sept arrêts à peu près, une demi-heure environ. Je ne devrais pas avoir de mal à nous guider demain. 

Jae-Sun acquiesça en souriant grandement, tandis que Margot se jetait dans son canapé, semblant fatiguée. Elle ôta sur-le-champ sa paire de talons et pesta en les regardant méchamment.

— Tu ne marchais jamais avec des talons aussi hauts à l'école, indiqua Jae-Sun en retenant difficilement un gloussement moqueur.

— Sans blague. Je n'ai pas besoin de mon intuition pour le deviner.

— Et dire que tu vas passer l'éternité avec ces trucs aux pieds !

Quand elle pivota vers lui, elle se rendit compte qu'il était au bord du fou rire et la mine crispée de la faucheuse le fit craquer. Jae-Sun rit de bon cœur pendant qu'elle injuriait les talons, les faucheurs et même le Seigneur. 

— Pour le coup, pouffa-t-il en se calmant, je ne pense pas que ce soit la faute du Seigneur. Il doit avoir d'autres occupations que les uniformes des Anges de la Mort.

— Peu importe, je les déteste tous.

Elle croisa les bras et s'enfonça dans le canapé en bougonnant. Jae-Sun finit de rire et se concentra sur ce qu'elle venait de lui dire. Il était content qu'elle soit parvenue à rapporter la précieuse information. Maintenant qu'ils connaissaient l'emplacement de la maison des parents de Laura, ils pourraient s'y rendre sans peine et le coréen jouerait le rôle d'un ancien ami d'école dans le but d'attendrir leur cible. D'ailleurs, puisqu'il était très peu social et n'avait même pas été capable de se souvenir du patronyme de sa meilleure amie, Margot avait trouvé toute seule.

— Alfieri. Laura Alfieri. 

— Ton intuition ? s'enquit-il.

— Le nom était inscrit sur leur portail ! Intéresse-toi un peu aux autres de temps en temps. 

Son sourire ne se fana pas et resta figée sur ses lèvres ; néanmoins, l'étudiant fut secoué par les mots de la faucheuse. Non seulement il avait l'impression de ne pas avoir suffisamment vécu et de s'être privé de vie sociale toutes ces années à cause de ses nombreux fardeaux et de sa réserve légendaire, mais en plus il ne pourrait plus y remédier puisqu'il mourait bientôt. Il se racla la gorge et se força à penser à autre chose. Un détail le turlupinait et il questionna Margot : 

— La technique de la veste a bien fonctionné ? 

— Oui, ta veste m'a été bien utile ! J'ai réussi à monter dans la voiture des Alfieri sans trop d'ennui. Par contre, dans le métro, c'était plus compliqué. Je me suis accrochée à ta veste. C'est comme si j'étais sur le point de me faire éjectée du métro à tout moment. A part le sol et quelques murs, je ne peux vraiment plus rien toucher... C'est agaçant.

— Au moins, tant que tu as la veste, tu seras capable de toucher à tout ! 

C'était une solution temporaire. Après la cérémonie, elle avait troqué son blazer rouge pour la veste en cuir du coréen qu'elle avait attachée autour de sa taille. 

— C'est vraiment bizarre ce fonctionnement, commenta-t-il. Si je te donne un objet qui m'appartient, il disparaît du monde visible.

— Heureusement ! Imagine la tête des gens si une veste volait à travers la ville !

Avenge the FallenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant