Avenge the Fallen

L'approbation de l'aînée

A la suite d'une telle révélation, et conformément au caractère déterminé de la jeune blonde, Jade ne pouvait tout simplement pas prendre la route du boulevard principal et disparaître dans la fumée des pots d'échappement. Sans un regard, sans un mot, focalisée sur le corps pivotant de la secrétaire, Margot laissa ici le coréen et lui emboîta le pas. Elle comptait bel et bien assister à son entrevue entre cette femme qui à priori n'était ni une criminelle ni une menteuse et ses parents. Elle la poursuivit dans toute la ville, passant au travers de nombreuses personnes. Jae-Sun savait qu'il n'était pas en mesure de la suivre sur ce chemin ; il la regarda disparaître à un détour et il rentra chez lui, impatient des informations qu'elle rapporterait.

Le boulevard se rétrécit et elles s'engagèrent dans une rue moins large où beaucoup plus de touristes encombraient le passage et où les coréens jouaient des coudes pour se faufiler. Jade connaissait bien Busan et elle se souvenait encore de tous les raccourcis, au contraire de Margot qui avait l'impression d'être une étrangère. Alors que la secrétaire tourna à une intersection, la faucheuse heurta le corps d'un homme qui commença à lui crier dessus en une langue qu'elle ne reconnut pas, un pays de l'Europe de l'Est si elle devait deviner, puis il la siffla avec un sourire goguenard. Elle se dégagea rapidement et ne pensa même pas au fait qu'il mourrait bientôt. Mais, c'était trop tard, elle n'avait plus sa cible en vue.

Elle se retint de jurer et réfléchit logiquement. Elle savait déjà où cette femme se dirigeait. Margot chercha donc à se repérer, mais le nom des rues ne lui rappelait rien. Elle eut pour réflexe de quitter le bruit en prenant une route plus silencieuse et elle se concentra pour qu'une intuition la guide. Puis, elle faillit se frapper elle-même tant elle se jugeait stupide : la faucheuse se souvint brusquement de sa nouvelle nature et de l'avantage que représentait l'embarcadère. Elle se laissa tomber en arrière, atterrit dans la lumière bleue, ne salua pas Ray qui s'apprêta à lui parler et replongea.

La novice se permit de respirer profondément et de reprendre son souffle ; elle ne s'était pas rendu compte d'à quel point elle avait crispé ses muscles, serré la mâchoire et ses mains. Margot était forcément la première arrivée, mais elle entendit des klaxons et des bribes de conversations bruyantes au loin. Le quartier où se situait son ancienne maison était très calme, mais il devait être à proximité de rues de commerce. Elle se retourna enfin et vit pour la première fois son chez-elle. Une belle maison grise au toit triangulaire blanc, deux étages, un garage et un grenier, moderne et propre, au portail rouge aux nuances marron. Dans l'humble jardin, elle aperçut une allée de graviers clairs et des arbres de part et d'autre. C'était parfaitement entretenu. A la hauteur de la réputation des Rosea.

Des claquements de talons résonnèrent dans son dos et Margot se détourna de la maison. Elle remarqua à cet instant que ses yeux s'étaient humidifiés et que son regard avait insisté sur une fenêtre en particulier, sa chambre. Jade s'arrêta nette à une dizaine de centimètres du portail et soupira lourdement. Elle n'avait apparemment plus tant envie de rencontrer ses parents, ou alors ce lieu faisait remonter ses souvenirs. Elle tendit gracieusement son doigt manucuré et appuya sur la sonnette. Rien ne se produisit pendant une minute jusqu'à ce que les battants électriques du portail ne s'actionnent. La secrétaire entra sans hésitation, martelant les graviers souplement. Avant qu'elle n'ait pu toquée, une femme en tablier l'accueillit.

— Vous êtes ? s'enquit l'employée.

Margot vit quelque chose sur le visage de la secrétaire qui la surprit. De la nostalgie.

— Vous travaillez en tant que gouvernante pour les Rosea ?

— Oui, c'est exact. Vous avez rendez-vous ?

Jade parut subitement touchée de voir une autre femme à la place de Wanda. Elle avait connu la précédente gouvernante depuis des années, son remplacement devait la tirailler.