Damoclès et le Fatum

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Margot retourna à l'appartement de Jae-Sun seulement pour le voir vide. Elle le chercha et l'appela jusqu'à trouver son post-it. Elle décida de se coucher un instant, fatiguée à cause de ses talons et de cette journée éprouvante. Elle se débarrassa aussi de sa veste et se blottit dans la couette. Son corps ne dégageait plus aucune chaleur. La jeune faucheuse espérait que son ami revienne avec des informations intéressantes et elle commença également à réfléchir sur une façon de le présenter à Jade. L'excuse de l'ancien camarade d'école ne fonctionnerait pas vraiment et puis la prudence était plus importante que tout le reste.

Elle gigota un peu, ne parvenant à tomber dans les bras de Morphée. Pourtant, ses paupières papillonnaient et elle se sentait épuisée. Elle leva les yeux en soupirant et aperçut sur la commande le dossier de Jae-Sun. La faucheuse le saisit et le relut une seconde fois. Demain, il n'aurait plus que trois jours à vivre. Le compte à rebours continuait de défiler et son cœur se serrait irrémédiablement à l'approche du moment fatidique.

Où irait-elle ensuite ? Elle ne se souvenait que de cet appartement, un endroit qu'elle appellerait presque son chez soi. Le seul lieu où elle était à son aise et pouvait souffler tranquillement. Elle n'y était ni oppressée, ni tourmentée. Qui plus est, la présence de Jae-Sun aidait beaucoup à le rendre confortable. Il était toujours délicat, silencieux et rassurant ; l'étudiant était devenu son pilier, l'unique homme qui occupait une place primordiale dans sa mémoire. Elle avait parfois l'impression qu'elle tenait plus à sa vie que le coréen. Tandis qu'il avait déjà entamé un processus d'acceptation et de résignation, elle était bloquée par sa peur de le perdre.

Serait-elle capable le jour de son trépas de l'accompagner dans l'au-delà ? Il le désirait plus que tout. Ce serait parfait qu'elle soit sa faucheuse afin de clore ces dix jours d'enquête. Mais, réussira-t-elle à mettre de côté ses propres émotions et lui tendre la main ? Ils l'ignoraient tous les deux. Chacun pressentait un au revoir bien différent de ce qui était initialement prévu. Ils soupçonnaient que Margot se défile ou craque à la dernière minute, et qu'elle fuit ce jour-là, parce qu'elle ne possédait certainement pas la force nécessaire pour assister à sa mort, impuissante et fébrile. Une épée de Damoclès se dessinait à quelques centimètres de sa tête, prête à le fendre, et Jae-Sun non plus n'avait pas envie qu'elle soit là à sa mort. Cette vision, il le savait, la hanterait pour toujours.

— Hum, Hum ! entendit-elle dans son dos. Je crains fortement de devoir t'importuner.

Encore ! songea-t-elle. Elle avait reconnu la voix pompeuse de Valentino. A ses côtés, le grand et imperturbable Justinien qui avait comme à son habitude un visage sans expression. Margot était tellement vidée d'énergie qu'elle ne réagit pas tout de suite, reposa le dossier du coréen et leur tourna le dos pour se réinstaller sous la couette. Le garçon prit une lourde inspiration et elle en comprit immédiatement le sens. Soit elle sortait du lit, soit ils l'en sortiraient eux-mêmes. Sauf qu'elle ne bougea pas d'un pouce, ce qui ne dérangea pas le faucheur pour s'adresser à elle. La blonde se questionna avec agacement : qu'avait-elle encore fait pour leur déplaire ?

— Cette fois, ce n'est pas Amriel qui nous envoie.

— A la bonne heure ! répliqua-t-elle sans dissimuler l'ironie.

— Les Archives ont exigé que nous récupérions un dossier que tu détiens.

— J'ai déjà déposé les deux derniers dossiers et j'ai signé ! Enfin..., je crois que j'ai signé. Bref, j'ai effectué le travail en bonne et due forme, alors laissez-moi me reposer !

Valentino essaya tant bien que mal de ne pas renverser le matelas. De toute façon, il avait gardé sa force d'enfant et ne serait pas en mesure de le faire. Il maintint une posture droite et assurée, en insistant :

Avenge the FallenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant