La Fortune se moque

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La porte s'ouvrit, tandis qu'il s'en approchait. Au fil de ses pas, la vie s'éloignait de lui. Jae-Sun entra dans la maison des Rosea sans une once d'hésitation. En réalité, il ne savait même pas quel était son plan, mais il en avait une vague idée. Il se munit de son plus grand talent d'improvisation et se grandit au maximum, s'offrant un air hautain et fier qui concordait avec celui de Candice. Cette dernière en robe cyan et en talons hauts donnaient l'impression de s'être remise de la mort de ses enfants. Il ravala une grimace de dégoût et arbora à la place un large sourire.

— Vous êtes ? minauda Candice. Nous attendions le secrétaire d'un de nos associés. Vous êtes trop jeune pour travailler pour lui.

— Park Jae-Sun, j'aimerais m'entretenir avec vous si possible. Je crois que nous avons des choses à nous dire.

Les lèvres de Candice s'étirèrent.

— Ah oui ? Dans ce cas, je serais une bien mauvaise hôte de vous laisser repartir.

Elle pivota et se dirigea vers l'escalier central en bois ciré. Une employée s'inclina et tendit les bras pour ranger ses affaires sur le porte-manteau. Elle était sûrement la nouvelle gouvernante dont Margot avait parlé. Jae-Sun secoua simplement la tête. S'il devait mourir dans peu de temps, il tenait à garder sa fidèle veste en cuir. Il nota que personne n'enlevait ses chaussures ici et il les imita donc. L'étudiant s'apprêta à suivre Candice qui avait déjà disparu à l'étage, mais une main se serra autour de son poignet et il ne put empêcher un bond en arrière. En relevant la tête, il croisa le regard sévère de Chul-Hei.

— Salut, mec ! Euh, je suis un peu occupé, là.

Il tenta de se dégager, mais Chul-Hei raffermit sa prise et fit signe à la gouvernante de s'éclipser, elle s'exécuta sans rechigner. Le jeune majordome lui répondit par un rictus et Jae-Sun crut qu'il pouvait se détendre, mais il s'agissait d'un sourire sarcastique.

— J'ai retrouvé mes cartons du lycée et, tu vas rire, il n'existe pas de Park Jae-Sun ! Ni aucun type qui te ressemble de près ou de loin.

Jae-Sun fit mine de rire, mais il s'arrêta aussitôt face au visage colérique du majordome. Il redevint soudainement sérieux.

— Bon, écoute, nous en discuterons plus tard. D'accord ?

— Tu connais mon nom, rétorqua Chul-Hei. Comment ? Et pourquoi ? T'es un stalker ?

— Je n'ai vraiment pas que ça à faire, mec ! Tu n'aimerais pas que ta maîtresse attende. N'est-ce pas ?

Il renvoya un sourire en coin vicieux que Chul-Hei singea.

— Ou alors, je peux expliquer à ma maîtresse qu'un type bizarre m'a accosté dans la rue avec des informations sur moi et qu'il est de nouveau là ! Je me demande comment elle réagirait. Trouve une excuse pour justifier le fait que tu connaisses mon nom et là où je vivais avant.

— C'est toi qui as évoqué Séoul en premier ! soupira Jae-Sun. S'il te plaît, mon entrevue avec les Rosea est très importante. Je te promets que tu pourras poser toutes tes questions après. S'il te plaît ?

Chul-Hei sembla s'attendrir quelque peu à son ton désespéré et l'étudiant commençait à penser qu'il vaudrait mieux mourir avant de sortir de cette maison, sinon le majordome le harcèlerait pour avoir ses réponses. Finalement, il lâcha son poignet et Jae-Sun dissimula son soulagement en tournant la tête sur le côté. Il regarda les escaliers en constatant que Candice s'était engouffrée dans une des pièces sans un intérêt pour lui.

— Deuxième porte à gauche, marmonna le majordome. Dépêche, elle déteste patienter.

Le jeune regagna la cuisine d'où, il le savait, la gouvernante avait essayé d'épier leur conversation. Elle faillit s'écrouler contre la porte à son entrée et il la réprimanda durement, mais ses mots furent étouffés. Jae-Sun inspira profondément et monta les marches une à une sans empressement. Il était déjà venu ici en tant que voleur, mais il se sentait encore moins le bienvenu que la première fois. De l'extérieur, la maison avait l'air moderne et épurée ; pourtant, à l'intérieur, elle avait des allures de manoirs européens et anciens. Du bois s'étalait du sol au mur et les meubles avaient clairement été importés de France. 

Avenge the FallenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant