Outer Banks - Tome 1

Chapitre 1

   Allongée sur ma planche, les vagues me bercent. Leurs bruits m'apaisent.

   J'aime rester sur ma planche de surf durant des heures entières, surtout lors des après-midis tranquilles où je peux m'évader loin des regards indiscrets. Si mon frère découvrait mon petit secret de surfeuse, il s'empresserait de me pourrir la vie. Pas question qu'il me prive de ces moments précieux, bien que je sois certaine de pouvoir lui rendre la pareille. Moins on se chamaille, mieux je me porte. Croyez-moi, vivre sous le nom de Thornton n'est vraiment pas de tout repos : une mère d'une froideur polaire et d'une exigence maladive, un frère aussi agaçant qu'un moustique en pleine nuit... Je survis comme je peux.

   Je me redresse doucement sur ma planche pour observer l'horizon. Le soleil commence à disparaître derrière la ligne de la mer, transformant le ciel en une toile d'aquarelle teintée de rose et d'oranger. Je soupire, imprégnant cette image dans ma mémoire, avant de plonger mes bras dans l'eau pour rejoindre le rivage. Lorsque j'atteins enfin la terre ferme, je ne tarde pas à ranger ma planche dans le petit cabanon. Le sable colle à mes pieds tandis que je me sèche rapidement et remets mon short délavé et mon débardeur. Je décide de longer la plage, les pieds effleurant l'eau fraîche, profitant de ces derniers instants de calme.

   Ce soir, une fête est organisée. Topper et Rafe insistent pour que je vienne. Ils préparent sûrement un coup foireux, mais qu'importe... les fêtes, je ne peux pas y résister.

— John B ! Arrête !

   Cette voix attire mon attention. Mon regard se pose plus loin dans l'eau, où les Pogues s'amusent à s'éclabousser comme des gosses. Je lève les yeux au ciel, partagée entre l'amusement et l'envie. J'aimerais pouvoir vivre ces instants de complicité avec des amis sans arrière-pensées.

   Kiara tente maladroitement de couler John B, mais il se défend avec malice, attrapant ses épaules pour la faire basculer sous l'eau. Le rire de Pope résonne tandis que JJ, assis sur sa planche, observe la scène d'un air rêvasseur avant de tourner la tête dans ma direction. Mon cœur rate un battement. Merde. Je suis restée plantée là à les regarder comme une voyeuse. Pour sauver la face, je lui adresse un majeur bien haut avant de reprendre mon chemin, le menton levé.

   Une vingtaine de minutes plus tard, j'arrive enfin devant chez moi. Mes cheveux, presque secs, retombent en vagues désordonnées sur mes épaules. Une lueur d'excitation me traverse en pensant à la soirée à venir. Peut-être que ce soir, pour une fois, les choses seront différentes.

— Ou étais-tu, Aïkida ?

   Je soupire. Je n'ai même pas encore ouvert la porte d'entrée qu'elle trouve déjà le moyen de me harceler avec ses questions, criant depuis la fenêtre de la cuisine. Comme toujours, elle a l'oreille tendue. Je ne lui réponds pas immédiatement, préférant me concentrer sur la serrure qui refuse de coopérer avec moi.

— J'ai traîné un peu partout.

— Où exactement ? Insiste-t-elle, sa voix empreinte de suspicion.

— Je vais te répondre comme à chaque fois, maman : je ne peux pas te dire exactement puisque j'ai bougé dans tout Outer Banks.

— Vers les Pogues ? Dit-elle avec dégoût dans la voix qui m'épuise depuis des années.

   Je serre les dents pour m'empêcher de lever les yeux au ciel. Son aversion pour les Pogues est quasi obsessionnelle. Et moi, je n'ai aucune envie de rentrer dans un débat sans fin.

— Non de partout sauf là-bas.

   La porte d'entrée claque derrière moi, et je me permets un soupir de soulagement. Mais ma tranquillité est de courte durée. Une pression soudaine sur ma tempe me fait sursauter, et je me retourne rapidement. Topper, mon frère, vient de m'embrasser d'un geste brusque et familier.