Chapitre 41

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Souleymane

Dans ma voiture, je pris une énième inspiration.

_Allez mec, tu vas y arriver ; m'encourage Charles.

Facile à dire.

J'avais quitté Lou très tôt dans la matinée ~elle n'était pas encore réveillée~. J'étais bien tenté de rester mais disons que... je n'avais pas vraiment envie de rencontrer un certain homme appelé Richard armé d'un fusil de chasse qui pourra facilement faire disparaître mon corps. Et pourtant... c'est ce que je m'apprête à faire.

Je regardai devant moi et vis le père de ma femme sortir de chez lui. Je pris, une fois de plus, une inspiration, avant de descendre.

_M. Lecharp ? Appelai-je.

Je me répétai une seconde fois pour qu'il m'entende. Enfin, il me regarda. Il fronça directement les sourcils. Un renvoi dans le cinquième arrondissement, je dois faire tâche.

De là où je me trouvai, je le voyais serrer son volant. Attention, je suis du côté de sa voiture, pas devant. Je ne suis pas assez fou pour prendre ce risque. Quoi que... ce que je vais faire n'est pas mieux non plus.

_Qu'est-ce que tu me veux ?

Ok. Pour la politesse, on repassera.

_Je veux vous parler.

Waw, j'ai l'air si sûr de moi.


_Ah oui ? Et de quoi ? Me demande-t-il en dirigeant sa main vers ce que je suppose la clé.

Dans sa voix, je pouvais clairement distinguer que cette petite discussion ne l'enchante pas. Il semble même se retenir. De me foutre son poing dans la tronche ou de me coller une balle dans la tête ? Peut-être les deux.

_De votre fille.

Son geste fut suspendu, son regard vers moi se fit encore plus sombre. Oh oh. Il descendit de la voiture et se dirigea vers moi.

_C'est toi le salopard qui a osé l'approcher ?

_Non.

Il s'arrêta. Il s'attendait sûrement à une affirmation.

_Je suis l'homme qui a osé l'approcher, pas le salopard. Entre nous, je pense que le salopard serait plutôt son ex.

Je me baissai immédiatement pour éviter son coup de poing. Et bougeai mon corps à gauche pour éviter un deuxième. Merde. Je ne vais quand même pas me battre contre lui.

_Bon. Et si vous m'écoutiez d'abord ? Hein ?

_Je n'ai rien à entendre d'un...

_Parce que ça vous plaît de voir votre fille dans cet état ? Le coupai-je, n'ayant aucune envie d'entendre des blasphèmes.

_Je t'interdis de parler de ma fille.

_C'est pourtant ce que nous allons faire; tonna-je avec autorité.

L'homme en face de moi semblait surpris par mon ton. C'est vrai que je parle doucement, mais il ne faut pas me pousser à bout.

_Aimez-vous votre fille monsieur Lecharp?

_Evidemment. Quelle question !

_L'aimez-vous vraiment ?

Il fronça les sourcils face à mon insistance.

_Il me semble; repri-je; que quand on aime quelqu'un, on ne lui fait pas de mal. En fait, on fait tout pour éviter de lui faire mal. Pourtant, vous, vous faites exactement le contraire.

Il ouvrit la bouche mais je continuai, ne lui laissant pas le temps d'en placer une:

_Votre fille m'aime. Elle est amoureuse de moi... Et moi aussi. Ne la voyez-vous pas différente depuis quelques mois ? Plus souriante, plus gentille, plus ouverte, plus... heureuse?

_... Comment est-elle depuis une semaine ? A-t-elle toujours le goût de la vie ? Est-elle toujours aussi joyeuse ? Non. Elle qui vous souriait tout le temps ne le fait plus. Elle qui était si gourmande mange à peine. Elle qui vous disait tout le temps de mes mots d'amour ne veut même plus vous voir. Elle ne sourie plus, ne rie plus. Tout ça pourquoi ? Parce que vous lui avez privé de son bonheur. Et pourquoi ? Pour une histoire d'égo, de racisme. Comme quoi un homme noir ne la mérite pas. Tout ça, parce que pour vous, les noirs ne sont pas des hommes. Ils ne sont que des putains de sauvages. Nous ne sommes pas sauvages. Nous sommes des hommes. Egaux à vous que vous le vouliez ou non. Que vous le reconnaissiez ou non. Continuez de croire en vos convictions arriérées si ça vous chante, mais un père qui aime sa fille, ferait tout pour la rendre heureuse. Ferait tout pour qu'elle soit heureuse.

_... Et c'est avec moi qu'elle est heureuse. Que vous le vouliez ou non. Continuer de l'éloigner de moi, de la traiter de la sorte ne fera que vous éloigner de votre fille. Et si vous n'arrêter pas, vous la perdrez.

Je serrai mes poings pour que mes mains arrêtent de trembler ~de fureur~.

_Viens mon gars, on s'en va.

La petite bourgeoise.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant