Lettres d'une supernova

Une dernière mission

PDV de Federico:

Mes bagages en main, je tentais de prendre mon mal en patience, assis dans l'immense hall de l'aéroport. Voilà quelques heures que j'avais lâchement fui ma réalité. Après avoir quitté ma chambre d'hôtel précipitamment et laissé un message à Leon, j'avais pris le premier taxi qui passait par là. Je lui avais tout d'abord demandé de rouler dans la capitale espagnole sans se soucier du compteur. J'avais eu besoin d'un moment pour me remettre sur de bons rails et faire ce qui était juste. Après tout, j'avais encore quelques points à régler avant de quitter définitivement la vie de ma supernova. J'avais un plan et je comptais m'y tenir malgré mon cuisant échec de ce soir. Même si elle ne voulait pas de moi dans sa vie, elle méritait de connaitre une existence paisible avec une vie professionnelle épanouissante, des amis sur lesquels elle pouvait compter et bien évidemment une famille aimante. Je m'étais déjà occupé des deux premiers points. YouMix ne tarderait sans doute pas à l'appeler dans les jours qui arrivent pour lui proposer une nouvelle collaboration. J'avais même réussi à obtenir un communiqué officiel de leur part. Il devait mettre en lumière le licenciement abusif de mon étoile après le fiasco avec le Ken espagnol. En effet, elle n'avait fait que révéler au grand public l'instrumentalisation de la vie des artistes par le géant de la musique. Les gens avaient le droit de connaitre la vérité à propos des manigances de YouMix, toujours plus assoiffé de buzz. Les dirigeants n'avaient eu de cesse de mentir, de duper, de tricher, de polémiquer et même de changer la nature profonde de leurs musiciens pour faire fleurir leur business. Penser à eux m'irritait encore plus que je ne l'étais déjà. Je pris donc une grande inspiration. L'horloge de l'immense hall de l'aéroport indiquait déjà quatre heures passées. Il ne me restait plus que quelques minutes à attendre. Je devais aller au bout de mon projet. Ludmila méritait une vie meilleure après son année chaotique.

-  Dernier rappel, les passagers du vol 6889 à destination de Rome, sont priés de se présenter à la porte D dans les plus brefs délais.

L'annonce sonore résonna dans l'aéroport quasiment vide. Un sourire nostalgique étira mes lèvres. Bientôt, je retrouverais mon pays d'origine. Toutefois, je n'oubliais pas ma dernière mission. Après avoir consulté une dernière fois ma montre, je me dirigeai vers le grand panneau d'affichage. Toutes les avions en partance et en provenance du monde entier y étaient répertoriés. Muni de ma valise, je pris la direction du bon terminal. L'avion ne devrait plus tarder. Assis face à la porte d'embarquement, je tapais nerveusement du pied. La patience ne faisait pas décidément pas parti de mes vertus. Les minutes semblaient s'étirer sur des heures.

Alors que je commençais à ne plus y croire, quelques personnes, bagages en main, firent leur apparition dans le terminal. Leurs mines fatiguées indiquaient que leur voyage avait été long. Je plissai des yeux dans l'espoir de fendre la foule. Debout face à tous ces gens, j'essayai de trouver mon homme. Soudain, je sentis une main s'abattre sur mon épaule:

-  Federico, mon garçon, merci d'être venu me chercher.

L'homme me tendait sa main droite. Je la serrai tout en le détaillant. Il portait un costume trois pièces noir impeccable. Son sourire soulignait des sillons nasogéniens marqués et ses cheveux grisonnants étaient parfaitement coiffés. Lentement, mon regard se souda au sien. Il avait les mêmes yeux que sa fille. Deux belles billes vertes avec quelques touches d'un marron intense.

-  Monsieur Ferro, c'est un plaisir de vous rencontrer, lui répondis-je finalement. J'espère que votre voyage n'a pas été trop pénible.

-  Ne t'en fais pas mon garçon, rien qu'un père ne puisse surmonter pour sa fille. Ne perdons pas de temps, comment va Ludmila? J'ai été très inquiet quand j'ai reçu un appel de l'avocat de Priscilla. Encore plus quand j'ai reçu celui de German et le tien.