La robe

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PDV de Ludmila:

-  Lù! Ma belle, où es-tu?

Alors que je lançais le deuxième cycle du lave-vaisselle, j'entendis la voix mélodieuse de ma patronne au loin. Son ton toujours amusé et jovial me tira un léger rire. Je me redressai et lui répondis:

-  Je suis à la cuisine Linda.

-  Encore le lave-vaisselle qui fait des siennes, j'imagine? Il faut que j'appelle le réparateur, je vais le noter parce que je vais oublier de le faire.

-  J'ai téléphoné ce matin, déclarai-je. Il doit passer demain matin aux alentours de dix heures.

-  Tu es un ange, mon enfant. Je te l'ai déjà dit au moins?

-  Pas assez à mon goût, lui répondis-je en riant.

-  Oh attends une seconde, tu as dit dix heures comme dans dix heures du matin?

-  C'est effectivement ce que j'ai dit Linda, confirmai-je en continuant de ranger la cuisine.

-  Ah non, non, ce n'est pas possible, il faut que j'annule sa venue. Nous sommes de sortie ce soir et j'ai besoin d'un quota d'heures de sommeil par nuit pour répondre présente le lendemain matin.

Alors que je m'apprêtais à décliner son offre en utilisant pour la énième fois l'excuse des révisions, ma patronne approcha son index de ma bouche. Son geste me coupa dans mon élan. Elle poursuivit donc, son éternel sourire bienveillant plaqué à ses lèvres:

-  Figure toi que j'ai gagné à une tombola! Je commençais à désespérer de ne jamais rien remporter et ce matin en relevant mon courrier, j'ai découvert quatre places pour aller voir un opéra au Teatro Real. Heureusement que j'ai vérifié la boite aux lettres puisque que les billets ne sont valables que ce soir. Ainsi, ma chère Lù, tu vas enfiler ta plus belle tenue, un magnifique spectacle nous attend.

Son offre était très généreuse mais j'allais refuser. Depuis mon arrivée dans la capitale espagnole, je m'étais créée une routine réconfortante. Une espèce de métro-boulot-dodo qui me permettait de garder un certain contrôle sur ma nouvelle réalité, un fil conducteur qui m'axait sur mes objectifs de vie. Je me sentais en sécurité dans ce cocon que je m'étais fabriquée et je n'avais aucune envie d'en sortir, même pour une soirée en compagnie de ma vieille dame préférée.

-  Je n'aime pas quand tu prends cet air jeune fille, me sermonna Linda en me sortant de mes pensées. Tu essayes de trouver une excuse pour refuser poliment mais je t'avertis tout de suite, je ne tolérerais qu'une seule réponse: un grand « oui »! D'ailleurs, avant que tu commences à déballer tes arguments un à un, laisse moi te présenter les miens. Les filles, vous pouvez entrer.

Intriguée par cet appel de ma patronne, je me retournai vers la porte d'entrée et découvris Violetta et Nata, les mains pleines. Elles me saluèrent et déposèrent leurs nombreux sacs au sol. Vraisemblablement, toutes les deux revenaient d'une après-midi shopping. Stupéfaite, je jetai un coup d'oeil à Linda, qui ne s'arrêtait plus de sourire. Chaleureusement, elle les invita à se mettre à l'aise et leur proposa un thé.

-  Je me suis permise d'appeler tes deux amies, ça aurait été franchement bête de gâcher deux places pour le Teatro Real, tu n'es pas d'accord ma belle?

-  Oui, vraiment trop bête, répétai-je sans réelle conviction.

Ma patronne m'avait piégée sans difficultés et surtout sans aucune gêne. Je n'en revenais pas. Alors que je m'installai auprès d'elles, je découvris bien vite que je n'étais pas au bout de mes peines.

-  Comme je savais que tu ne serais pas enchantée à l'idée de sortir ce soir, je me suis dit qu'une nouvelle robe te motiverait un peu plus!

Mes yeux menaçaient de sortir de leurs orbites. Nata, Violetta et elle m'avaient achetée une tenue pour l'occasion. Je ne savais pas comment réagir. Une partie de moi se sentait quelque peu blessée par ce geste. Bon sang, je restais tout de même Ludmila Ferro, reine incontestée du bon goût et icône des tendances et de la mode. Puis, d'un autre coté, cette attention m'attendrissait. Toutes trois avaient pris le temps de choisir quelque chose pour moi, pour me mettre en valeur.

-  Avant que tu ne dises quoique se soit, laisse nous te montrer la robe, lança Nata, visiblement inquiète.

Je me forçais à afficher un sourire. Les sourcils froncés de ma meilleure amie m'indiquaient parfaitement son appréhension. Elle avait peur que je me mette en colère face à leur initiative. Elle devait certainement croire que mes vieux démons allaient me rattraper. A l'époque, rien ne me satisfaisait. Je passais mon temps à ignorer ses efforts et à rejeter ses propositions. Pourtant, Nata s'était accrochée. Elle avait persévéré, attendant patiemment que mon comportement s'améliore. J'allais lui prouver aujourd'hui que sa persévérance n'avait pas été vaine.

-  C'est très gentil. Oui voilà, c'est très gentil à vous d'avoir pensé à moi en faisant votre shopping mais... commençai-je avant d'être interrompue.

-  Pas de mais, Ludmila. Quand Linda nous a contacté ce matin en nous proposant cette sortie entre filles, Nata et moi avons tout de suite été enchantées à l'idée de passer du temps toutes ensemble, déclara ma demi-soeur. Ensuite, elle nous a expliquées qu'il faudrait certainement te forcer la main pour que tu acceptes.

-  Alors, on s'est dit qu'on te persuaderait plus facilement, si on te trouvait une robe incroyable à toi aussi. Avec tes cours et tes services au café qui te prennent pas mal de temps, nous savions que tu ne pourrais pas faire les boutiques. Perfectionniste comme tu es, trouver la perle rare, aurait été une longue quête sans fin. Nous avons donc pris l'initiative de la choisir pour toi. Regarde, j'espère qu'elle te plaira.

Sur ces mots, ma meilleure amie me tendit un sac. Délicatement, je dépliai les papiers de soie recouvrant la robe, puis je découvris la merveille. La fine équipe avait opté pour un robe bustier blanche dont les coutures étaient recouvertes de petites perles crèmes aux reflets dorés. Le jupon type années cinquante en tulle s'arrêtait mi-cuisses. Je l'adorais. Emue, je n'osais pas ouvrir la bouche, de peur d'éclater en sanglots. Elles avaient assimilé mes goûts et avaient choisi une robe magnifique. Les mots me manquaient pour exprimer ma gratitude. Ces quelques bouts de tissus assemblés avaient une valeur symbolique forte. Oui, mes amies m'avaient comprise. Alors que je la détaillai encore et encore, je fus interrompue par Linda:

-  Qu'en penses-tu, ma beauté? Elle te plait? Si ce n'est pas le cas, on a encore le temps de la changer. La boutique n'est pas très loin.

Doucement, je relevai la tête. Des larmes au coin des yeux, je me jetai au cou de ma patronne.

-  Elle est magnifique, murmurai-je à son oreille en raffermissant mon étreinte. Merci beaucoup.

-  Je t'en prie, mais tu devrais plutôt remercier tes amies. Elles ont longuement hésité et discuté pour te choisir le modèle parfait.

Je me retournai et ouvris les bras pour serrer Violetta et Nata contre moi.

-  Le geste me touche énormément les filles, merci infiniment, prononçai-je en me décollant de mes amies. Finalement, vous avez à peu près bon goût quand vous essayez vraiment.

-  Est ce que ça veut dire que tu es d'accord pour sortir avec nous ce soir, tenta ma demi-soeur, un rictus satisfait se dessinant sur ses lèvres.

-  Seulement si vous faites un effort vestimentaire. Je ne peux pas m'afficher aux côtés de ploucs dans une si jolie tenue.

-  Ça, c'est mon amie, ajouta Nata en levant un poing victorieux au ciel. Bien, Mesdames, allons nous préparer.

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1232 mots

NDA: Teatro Real: Théâtre Royal de Madrid est l'une des plus grandes salles d'opéra d'Espagne. 

Voici le vingt-sixième chapitre, j'espère qu'il vous plaira. Oui, cette fameuse soirée nous réserve des rebondissements! Je m'excuse s'il y a des fautes d'orthographes, je n'ai pas pris le temps de faire plusieurs relectures comme je peux le faire d'habitude. En ce moment j'ai énormément de choses à faire mais je tenais à vous poster la suite de cette histoire. D'ailleurs, je vous informe qu'on arrive bientôt au bout de cette fiction. J'en profite donc pour vous remercier d'avoir lu mon travail, de l'avoir aimé et de l'avoir commenté.  

Lettres d'une supernovaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant